Road to the Ring : DeMarcus Cousins est-il vraiment un franchise player ?
Après quasiment 7 saisons infructueuses, les Kings ont décidé de tourner la page DeMarcus Cousins en envoyant le pivot à la Nouvelle Orleans. Si le talent du bonhomme est indéniable, force est de constater que la sauce n’a jamais pris à Sacramento, légitimant au fond l’idée de se séparer d’un « franchise player » qui ne fait pas gagner son équipe.
Jetons un coup d’œil à son profil.
Guillaume (@GuillaumeBInfos)
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D’un point de vue physique, Cousins est une véritable perle rare dans le paysage NBA. S’il manque clairement d’explosivité et de verticalité, c’est en revanche un combo unique de grandes mensurations physiques et de qualités athlétiques. Il est grand (2m11), avec de très grands bras (2m21), et arrive à se mouvoir avec une fluidité et une agilité tout bonnement incroyables pour un joueur de cette stature. Cousins est également un joueur très puissant, peut-être même la plus grande force brute de la ligue, même si malheureusement (comme nous verrons plus tard) il sous-utilise largement cette partie de son jeu.
Offensivement, son arme favorite reste le jump-shot. Et, quand on voit son efficacité, ses soucis de mécanique de tir, et sa réticence à travailler à l’intérieur pour plutôt tenter le jump-shot, on pourrait même dire : son arme favorite, à tort.
Le jump-shot reste l’arme qu’il utilise le plus en attaque, puisque sur la totalité de ses tirs, 57% sont de cette nature. Pourtant, il ne convertit que 35% de ces jump-shots, un faible pourcentage (seulement 42eFG% également) sur ses 11.7 tentatives par rencontre (c’est plus que LeBron, Durant, Butler, Lowry, Conley ou Paul).
La majorité des problèmes d’efficacité de DeMarcus Cousins résident dans sa mécanique de tir. Techniquement parlant, son tir semble se situer entre un véritable jump-shot, où le joueur s’élève puis relâche le ballon au sommet du saut, et un set shot, où le joueur pousse sur ses jambes et relâche le ballon sur un seul et même mouvement fluide.
La très grande majorité des intérieurs utilisent d’ailleurs le set shot. C’est en effet une mécanique plus appropriée à leur gabarit. Lors du jump-shot, la clé réside dans la capacité à s’élever proprement, et au-delà de ça, à trouver le bon point d’équilibre et le parfait timing pour relâcher le ballon au moment opportun. Pas une fraction de seconde avant, ni une fraction de seconde après. Or, cet équilibre aérien est bien évidement beaucoup plus difficile à maîtriser pour des énormes gabarits de plus de 110 ou 120 kg qui, d’une part, auront plus de mal à élever du sol correctement (et de manière identique d’une fois à l’autre) cette énorme masse, et qui d’autre part sont aussi bien plus affectés par les règles de la gravité.
Le tir de Cousins en est une parfaite illustration. Ses sauts de jump-shot sont très aléatoires, et la plupart du temps insuffisants, pas assez grands. Il relâche son ballon alors même qu’il n’a pas fini la trajectoire ascendante du saut, créant ainsi une discontinuité dans la transmission d’énergie. Dans le jump-shot, on utilise la force générée par le saut, et la mécanique des bras (déclenchés au moment idoine pour profiter de cette force) n’est là que pour la précision du tir. Dans le set shot, il y a évidement cette continuité puisque dans le seul et même mouvement, l’énergie créée par la poussée des jambes est de suite transmise dans les bras. Dans les deux cas il y a continuité de la transmission d’énergie, et il n’y qu’à se concentrer sur la précision de la trajectoire du ballon (en caricaturant un peu). Cousins, lui, déclenche la mécanique des bras alors que la poussée des jambes n’est pas terminée. Résultat : mauvaise coordination des deux forces, et une précision évidement bien plus compliquée à obtenir, puisque d’un tir à l’autre le dosage de la force d’envoi du ballon est différent. En NBA les seuls intérieurs shooteurs notoires l’utilisant sont Anthony Davis et Kristaps Porzingis, du fait de leur carrure légère et longiligne, plus facile à faire décoller du sol. Tous les autres (Aldridge, Horford, Jokic, Towns, Embiid, etc, tous eux même plus légers que Cousins) utilisent le set shot.
Autre aspect de son jump-shot : sa mécanique des bras, elle même assez mauvaise. L’angle de son coude est bien trop petit, plutôt que les 90 degrés recommandés. Si le coude fait un angle droit, l’énergie générée par les jambes se transmettra de manière continue (toujours bien verticalement). Or, avoir le coude à ce point replié empêche cela, et créé une nouvelle discontinuité de geste. Également, cela entraîne une trajectoire de balle plate, à cause de l’effet « catapulte » ou effet horizontal du bras trop plié qui doit se déplier. En conséquence, le ballon arrive sur le cercle avec un plus petit angle, ce qui, trivialement, diminue le pourcentage de chance qu’il rentre dans le cercle.
Pour voir en image à quoi ressemblent tout ces problèmes techniques de jump-shots, vous pouvez regarder la vidéo qui y est dédiée.
Ainsi donc, son problème d’efficacité s’explique par sa mécanique de tir, mais pas que. En effet, sa sélection de tirs est elle aussi mauvaise. D’une part, il n’hésite pas à prendre beaucoup de tirs mauvais intrinsèquement. Des longues tentatives, tôt dans la possession, et/ou avec le défenseur en plein sur lui. D’autre part, lui-même se repose beaucoup trop sur le jump-shot. Dans des situations où le système n’a pas marché et où l’équipe s’en remet à lui, Cousins va d’abord et avant tout tenter sa chance sur un tir dans le périmètre en sortie de dribble la très grande majorité des cas (pour ne pas dire la totalité). Des longs deux points créés pour lui-même à coup de dribbles devant son défenseurs. C’est le genre de tir que l’on a beaucoup de mal à confier même à des arrières bien plus forts et plus efficaces, dans la NBA d’aujourd’hui (où l’on s’est rendu compte pull-up long 2pts était le pire tir du basket), alors que Cousins en prenne autant est évidement une chose regrettable.
Au-delà de ça, il est vrai que Cousins reste un shooteur intéressant, et d’autant plus par rapport à sa position de pivot. Il peut jouer très bien le Pick & Pop, il peut tirer à trois points en réception de passe (bien que là encore, il abuse et/ou n’est pas très efficace avec 35% sur 5 tentatives/m), et il peut même se créer son tir.
Le problème, c’est que le jump-shot de Cousins n’est pas juste un petit plus appréciable chez un pivot. Il l’utilise tellement souvent qu’on ne peut pas passer sur ces petits défauts, puisque ceux-ci deviennent alors très importants vu le volume de jump-shots tentés. Et son jump-shot n’est de plus pas assez bon pour être considéré comme une bonne arme principale. Kristaps Porzingis est par exemple un jump-shooteur avant tout, mais il est suffisamment bon pour l’être. LaMarcus Aldridge également. Chez Cousins, c’est un petit plus intéressant, qu’il a petit à petit décidé d’en faire son arme principale (fragile). Là où le bât blesse, c’est qu’il le fait au détriment d’autres compartiments du jeu où on l’attend beaucoup plus. On n’espère pas Porzingis dominer à l’intérieur, on veut qu’il utilise son jump-shot. Pour Cousins en revanche, c’est le cas, on veut le voir dans la peinture remuer la défense et la dominer, et pourtant il ne le fait pas du tout.
Son scoring intérieur, justement, est assez décevant. Il passe tout simplement beaucoup trop de temps dans le périmètre, et c’est rare de le voir imposer son énorme charpente sous les panneaux.
De ce fait, il n’a quasiment aucune opportunité en catch & finish. Et c’est dommage. Il n’est pas très explosif et ne peut pas jouer à volonté au-dessus du cercle, c’est vrai. Mais c’est pas tellement grave qu’il ne puisse pas dunker sur son défenseur si, quand il reçoit le ballon, il est capable de déblayer la raquette pour se dégager un lay-up ouvert et finir avec son bon toucher de balle. L’équipe autour de lui n’était pas extraordinaire, mais munie tout de même de deux bons meneurs de jeu capables de créer des opportunités de catch & finish à leurs intérieurs (Ty Lawson, particulièrement, qui même s’il n’est plus le génial créateur qui a fait survivre la carrière de Kenneth Faried en NBA à coup d’offrandes, est toujours un bon playmaker). Même sur Pick & Roll, il ne plonge que très rarement vers le cercle, préférant toujours s’écarter le Pick & Roll.
Autre indice de sa réticence à jouer proche du cercle, son nombre de rebond offensif en chute libre. Il ne prenait cette année que 7.1% des rebonds offensifs possibles, un très faible chiffre en général et par rapport à ses années précédentes (14% il y a quelques saisons).
Cousins est également un excellent joueur de transition, pour monter rapidement en contre-attaque ou même pour mener l’assaut lui même balle en main. Malheureusement, ce sont des qualités qu’il n’a pas pu démontrer cette année, étant donné que les Kings jouaient assez peu en transition. C’est également à noter que Cousins est parfois réticent à monter rapidement en terrain adverse s’il est trop en arrière ou ne va pas être le scoreur de l’action, et il lui arrive fréquemment de ne pas franchir la ligne médiane sur certaines contre-attaques.
Le jeu au poste est un autre domaine où l’on reste sur notre faim. Si Cousins possède cette image d’un joueur dominant poste bas auprès du grand public, il suffit de s’y intéresser d’un peu plus près pour constater ses défauts conséquents.
En premier lieu, c’est sa mentalité qui n’est pas irréprochable. Depuis son arrivée en NBA, c’est d’ailleurs un des principaux défauts qui lui est fait : sa tendance à vouloir toujours finir en finesse plutôt qu’en force. C’est vrai que Cousins possède une agilité excellente pour sa taille, et un bon toucher de balle. Mais il sous-utilise clairement ses superbes qualités physiques et athlétiques.
On le voit rarement faire usage de sa puissance pour dégager son adversaire du chemin ou l’enfoncer. Pourtant, quand il le fait, il est franchement inarrêtable, et il n’existe pas en NBA un seul défenseur ayant le coffre pour lui offrir une résistance équivalente. On le voit rarement prendre position très proche du cercle avant de demander le ballon, usant de ses jambes puissantes pour verrouiller son défenseur puis terminer le travail. On le voit rarement réaliser un deux moves puissants pour remuer le défenseur et enchaîner avec un hook shot incisif par dessus ce dernier.
Au contraire, Cousins n’arrive pas à établir de bonnes positions proche du cercle, bien qu’il possède la charpente la plus imposante de toute la ligue, probablement. Il essaye d’utiliser ses bras plutôt que la partie basse de son corps et sa puissance, et n’arrive donc pas toujours à obtenir la balle. Au contraire, il tente souvent de contourner son défenseur plutôt que de l’enfoncer ou lui shooter par dessus.
Au delà de ça, son footwork est assez mauvais. D’une part, c’est vrai qu’il possède une très bonne vivacité de pieds pour un intérieur. Mais d’autre part, ses fondamentaux sont très mauvais. De ce fait, il positionne toujours ses appuis de manière aléatoire, et d’un tir à l’autre. Il enchaîne les hook shots sur un appui, puis un autre sur deux. L’écart de ses pieds, et même l’orientation varient beaucoup sur des turnaround jumpers. Dans l’ensemble, Cousins ne semble jamais avoir appris les bases, les fondamentaux d’un footwork au poste bas. Il partait pourtant avec une splendide base (cette vivacité là de pied pour un joueur de cette taille et aussi puissant, on en croise pas tous les jours) mais personne ne lui a malheureusement appris à exploiter cela. Ce qui n’est pas si étonnant que ça dans une équipe de Sacramento toujours mauvaise, sans réellement de bons vétérans, dans une organisation assez dysfonctionnelle de manière générale, et lui même ayant très vite beaucoup de responsabilités et de résultats (et donc peut être pas envie d’apprendre).
L’exemple le plus criant de ce manque de bases sur son footwork est son spin move et/ou sa non utilisation du drop-step. La différence entre les deux, c’est que le spin est basé sur la vitesse de retournement pour prendre le défenseur par surprise, alors que le drop-step se base sur le placement des appuis pour sceller le défenseur et se dégager un bon tir. Cousins n’utilise que le spin move, ce qui marche assez bien puisqu’il est assez rapide. Mais d’une part, il est rapide pour sa taille mais pas extrêmement rapide de manière générale (ça ne marche pas aussi bien face à des postes 4, voire 5, très mobiles et bons défenseurs). Et d’autres part, les atouts de Cousins (taille, envergure, puissance, grandes jambes, etc) sont exactement ce qu’il faut pour exceller sur drop-step. Quand on sait que le drop-step est justement la base, le move primaire que l’on apprend aux joueurs au poste, cela montre bien le manque pas si négligeable que ça de Cousins au poste bas.
En revanche, la grande force de Cousins au poste bas est sa capacité à attirer les fautes. Malgré ses défauts, il est tellement imposant et donc dangereux que les défenses sont tout simplement incapables de le tenir et/ou préfèrent faire faute.
L’autre arme que Cousins utilise beaucoup pour scorer dans la peinture, c’est le jeu en pénétration. Là encore, tout comme pour le jump-shot, il faut contextualiser pour comprendre et juger. D’un coté, c’est évident que pour un intérieur, encore plus pour un pivot, cette capacité à attaquer le cercle est un vrai atout supplémentaire et non négligeable. Face à des intérieurs peu habitués à défendre sur isolation si loin du panier en reculant, c’est une arme surprise qui marche bien, et qui en plus offre du bon spacing à son équipe (si le pivot est balle en main dans le périmètre, et que les autres joueurs campent derrière la ligne à trois points, évidement que la défense est très étirée).
D’un autre coté, Cousins utilise tellement cette arme (beaucoup trop sans doute) que ses défauts ne peuvent plus être négligeables, et revêtent une bien plus grande importance. On ne s’attend pas à ce qu’un pivot puisse attaquer le cercle avec la science du jeu d’un Kyrie Irving, évidemment. Il suffit qu’il sache le faire un peu et ça devient rentable, même s’il y a dans le lot un peu de déchets (Karl Anthony-Towns, par exemple). Sauf que pour Cousins, ce jeu en pénétration représente une énorme partie de son jeu offensif, pas juste un petit truc en plus, et doit donc être considéré en tant que tel. En effet, le pourcentage d’échecs dans ce domaine, appliqué sur 15 tentatives par match plutôt que sur 2 ou 3 produit évidement bien plus de mauvaises possessions pour l’équipe.
En premier lieu, il convient de dire que Cousins n’est jamais meilleur en pénétration que lorsqu’il utilise sa puissance. Il n’a pas besoin de placer un premier pas rapide ou de dépasser le défenseur pour se créer de bons tirs. Même en drivant de manière contrôlé et sans accélération, il peut enfoncer son adversaire à coup d’épaule, le dégager de son chemin et conclure malgré le contacts au panier. Malheureusement, il n’opère pas suffisamment souvent de cette manière.
Cousins peut aussi aller scorer en finesse. Il possède un bon contrôle du corps et un bon toucher de balle pour scorer ainsi. Lorsque le spacing autour est bon, il est presque impossible à arrêter sur du tout droit avec son combo de vitesse et de taille. Plus encore, il aime bien placer un rapide crossover sur son défenseur avant d’aller conclure au cercle, certainement quelque chose que très peu d’intérieurs sont capables aujourd’hui en NBA.
Néanmoins, comme dit précédemment, on retrouve beaucoup (trop) de déchets dans son jeu de pénétration, et notamment du fait de ses petits déficits techniques.
A commencer par son dribble. Bien qu’il soit capable de réaliser de bons moves, Cousins ne contrôle pas bien du tout son ballon, et n’a pas les fondamentaux techniques (en terme de placement des appuis, position du corps, etc). Il perd d’ailleurs un très grand nombre de ballons sur ses pénétrations. Il ne descend tout simplement pas assez sur ses appuis lorsqu’il attaque sur du dribble. Deux conséquences à cela : son centre de gravité demeure donc très haut et il n’arrive pas à être assez rapide pour dépasser le vis-à-vis, et également le fait de rester haut le force à faire rebondir son ballon haut sur le dribble, ce qui donne beaucoup plus de temps et d’opportunités pour les défenseurs pour dévier ou voler le ballon. Également, au moment de monter pour le lay-up il protège très mal son ballon.
Il lui manque aussi de l’explosivité pour faire la différence régulièrement et efficacement. Que ce soit sur le premier pas, ou même pendant le drive ou pour finir. Il lui manque cette capacité d’accélération qui lui fait tant défaut, tout comme cela fait défaut à certains arrières ou joueurs extérieurs lorsque eux aussi souhaitent pénétrer. D’où l’importance pour Cousins d’insister plus sur des drives en puissance décrits juste au-dessus, plutôt que d’essayer sans cesse de contourner son joueur.
Ce manque d’explosivité, et son footwork trop aléatoire, ont des conséquences directes sur la qualité de ses lay-ups. Très souvent, il se retrouve à devoir prendre des tirs au cercle dans de très mauvaises positions, le corps totalement déséquilibré, en utilisant la mauvaise main avec le mauvais appui, etc.
Globalement, ce jeu en pénétration n’est donc pas une arme très efficace de son répertoire. Tout comme pour le jump-shot, il aurait sans doute intérêt à diminuer son utilisation pour se reconcenter vers le jeu intérieur pur (le jeu au poste bas tout en puissance, ou tout simplement le catch & finish en rôdant sous les panneaux pour des opportunités faciles de panier). Le jump-shot et la pénétration sont des outils assez uniques dans le répertoire d’un pivot mais Cousins en oublie presque que, justement, à la base, c’est un pivot. De plus, il possède trop de défauts dans ces domaines là pour faire gagner son équipe via ce genre de tirs, des défauts exacerbés par le trop grand volume de tirs de Cousins là-dessus.
Il semble clairement y avoir un problème de hiérarchie dans son jeu offensif, comme si à force de vouloir montrer ses qualités hors du moule de pivot, il est arrivé petit à petit à ne s’appuyer presque que sur cela. Or, dans le rôle du joueur offensif qui enchaîne les tirs dans le périmètre et tente d’attaquer le cercle balle en main (le jeu d’un arrière, en somme), Cousins n’a tout simplement pas les atouts pour le faire, physiquement et techniquement. Et même si un défenseur intérieur est moins habitué à défendre ça qu’un défenseur extérieur, ce delta n’est pas suffisant pour compenser. Et il l’est d’ailleurs de moins en moins avec cette tendance à voir de plus en plus d’intérieurs mobiles et polyvalent défensivement, désormais préparés à défendre des arrières dans ces positions en cas de switch sur P&R ou autre.
Un DeMarcus Cousins qui domine à l’intérieur et à l’occasion s’écarte ou attaque balle en main, c’est un vrai profil complet et dominant. Un DeMarcus Cousins qui se concentre d’abord et avant tout sur du jump-shot et du drive, c’est beaucoup moins intéressant. Et ce n’est pas pour rien que Sacramento ne gagnait pas tant que ça dans une conférence Ouest pourtant plus ouverte que jamais (pour ne parler que de cette saison).
Un domaine en revanche où Cousins est clairement au-dessus du lot, c’est son jeu de passe. Quantitativement, Cousins était deuxième meilleur passeur de NBA chez les pivots avec 4.7 ast/m. Qualitativement, il ne possède pas le toucher de balle ou la créativité de certains (Nikola Jokic), mais se classe clairement dans le très haut du panier également.
Il possède une excellente vision de jeu, conférée en partie par sa taille et sa capacité à voir et passer par-dessus la défense. C’est également un excellent passeur poste bas, véritablement imperturbable. En effet, face au prises à deux, il est suffisamment grand justement pour ne pas paniquer et voir par-dessus pour trouver la faille générée par la prise à deux. Si au contraire l’adversaire choisit de surcharger le terrain (défense à la Tom Thibodeau) il peut également punir les infériorités numériques coté faible. Cousins est aussi un très bon passeur depuis le poste haut, en tête de raquette.
Plus encore, Cousins a montré une belle capacité à créer régulièrement en sortie de dribble, sur pénétration. Une qualité rare pour un pivot. Il attaque le panier et lorsque la défense se resserre autour de lui, il ressort pour trouver ses coéquipiers démarqués. C’est également un joueur altruiste, qui n’hésite pas à réaliser la passe supplémentaire pour transformer une bonne position de tir en une très bonne.
Malgré cet altruisme cependant, et même malgré toutes ses excellentes qualités de passe, Cousins peut s’avérer un véritable trou noir par moment. C’est-à-dire qu’une fois que la balle lui arrive, on est sûr qu’on ne reverra pas, quoi qu’il se passe ou quoi que la défense fasse.
Le problème majeur qui saute aux yeux et qui explique ceci, c’est que bien souvent Cousins décide de quoi faire plutôt que de réagir à ce qu’il voit. Au poste bas, particulièrement, il affiche deux mentalités différentes : les possessions où il va chercher à scorer à tout prix (et ne ressort pas la balle même si les 5 défenseurs sont resserrés dans la raquette), et les fois où il veut passer, levant la tête et cherchant la passe (en négligeant donc parfois son propre match-up et en n’étant pas agressif pour scorer). Il en va d’ailleurs de même en pénétration, où là encore, s’il décide de scorer, sa bonne vision de jeu se transforme en une vision tunnel où Cousins ne voit plus rien d’autre que le panier, quitte à louper des coéquipiers très largement ouverts.
En défense, DeMarcus Cousins est tout aussi aléatoire, capable de bonnes choses comme de mauvaises. Plus globalement, son niveau de jeu défensif reste tout de même beaucoup plus mauvais. Si en attaque on peut modéliser cela en une bonne action pour une mauvaise, en défense c’est plutôt du mauvais, ou très mauvais, souvent, avec à l’occasion quelques fulgurances.
Sur l’homme d’abord, Cousins est loin d’être irréprochable. Sa défense au poste n’est pas ce qu’elle pourrait être. Il ne bouche pas bien les angles, et se montre assez indiscipliné, cherchant l’interception quitte à laisser le tir totalement ouvert, ou tentant inutilement de contrer la balle alors qu’il aurait pu réaliser la bonne action défensive (et le stop défensif) rien qu’en laissant ses énormes bras bien tendus en guise de muraille. Plus encore, il laisse son adversaire prendre position très proche du cercle sans chercher à le repousser (il ne croise en plus pas souvent d’adversaire capable de rivaliser avec sa puissance, s’il voulait bien se donner la peine de l’utiliser).
Sur Pick & Roll, les quelques excellentes fulgurances aperçues ne compensent absolument pas pour toutes les mauvaises possessions produites. Par moment, il utilise en effet bien ses grandes mensurations associées à sa mobilité, qui en font un obstacle difficile à contourner ou difficile à shooter par-dessus.
Néanmoins, le reste du temps, c’est beaucoup plus mauvais. Que ce soit dans son timing, son placement pour boucher les angles, parfois même au niveau de quelle défense du Pick & Roll il doit pratiquer (switch, hedge, ICE, contenir, etc). Ses connaissances et sa science du jeu son clairement mauvaises et ça commence à devenir inquiétant et définitif, lorsqu’on sait qu’il en est déjà à sa 7e saison chez les pros (une bonne partie, peut être même la moitié, de ses bonnes années sont déjà passées).
Dans la protection du cercle, c’est la même histoire. Des fulgurances de temps en temps, mais globalement un niveau de jeu insuffisant, où apparaissent clairement les limites de son sens du timing, du placement, et même son envie et son niveau d’effort. Les attentes ne sont évidement pas pour Cousins d’être un protecteur du cercle d’élite, de l’acabit d’un Rudy Gobert ou Nerlens Noel. Mais avec ses atouts physiques (taille et bras) très au-dessus de la moyenne et ses bonnes aptitudes athlétiques (mobilité, agilité), il y a quand même de quoi faire beaucoup mieux. Marc Gasol a reçu un titre de défenseur de l’année en 2013 avec des bases physico-athlétiques inférieures à cela. Andrew Bogut est aussi devenu au fil du temps un magnifique protecteur du panier sans explosivité, pierre angulaire défensive de la meilleure équipe de ces dernières années.
Plus généralement, Cousins n’est pas très performant en défense collective. Il manque des aides évidentes, il perd de vue son attaquant et n’est tout simplement pas assez attentif, ou bien concède très fréquemment des tirs ouverts à ses vis-à-vis en les abandonnant pour dé-zoner et se rapprocher de la raquette. Là encore, le niveau d’effort est très largement insuffisant, dans à peu près tous les aspects de la défense. Un domaine où cela apparaît clairement notamment, c’est le jeu en transition, où Cousins se laisse beaucoup trop facilement distancer par les joueurs adverses ou ne fait pas l’effort de revenir (à temps, ou tout court).
En dehors de cela, Cousins demeure un bon playmaker défensif. Ses mains sont assez vives, et bien qu’il n’ait pas une bonne anticipation sur ligne de passe, sa longueur de bras à elle seule lui permet de dévier des ballons. Néanmoins, c’est regrettable que Cousins recherche tant l’interception au détriment d’autres aspect du jeu, et se mette aussi souvent en mauvaise posture ou à faire faute en tentant de voler des ballons à l’excès.
Egalement, ses performances au rebond (défensif comme offensif) sont très aléatoires, et très frustrantes. Là encore, tout est question d’envie, de technique, de fondamentaux et de connaissance de la bonne manière de faire les choses (pour le coté négatif), et de qualités physiques géniales, de puissance et d’excellents instincts (pour le coté positif). La somme de tout cela donne une assez bonne production (10.7/m) mais avec cette pensée qui reste dans un coin de la tête qu’il pourrait faire beaucoup mieux. Par exemple, il ne pose jamais de boxout sur ses adversaires pour les bloquer et prendre la position préférentielle, et se contente de miser sur ses longs bras. Les statistiques un peu plus avancées montrent d’ailleurs que Cousins (qui a les atouts pour être le meilleur rebondeur de NBA) ne performe pas si bien que ça, au final : 8e rebondeur défensif de NBA, mais seulement 31e au rebond offensif (quand on est au-delà de la ligne à trois-points, difficile en effet de récupérer des deuxièmes chances), et ramené à un temps de jeu égal de 36min, il n’est que le 20e meilleur rebondeur de la ligue. Frustrant. Encore.
L’un dans l’autre, la décision des Kings de se séparer de DeMarcus Cousins semble assez légitime, ou en tout cas peut se défendre. C’est surtout le timing, et la contrepartie acceptée qui est bien plus discutable, mais le choix en lui-même de partir dans une nouvelle direction se comprend assez. Bien que garder Cousins aurait aussi été une une option très intéressante (le talent, ça pousse pas sur les arbres), le divorce apparaît une bonne option pour la franchise mais aussi pour le joueur, à qui un nouveau départ peut être largement profitable.
Ce n’est pas le talent qui est à remettre en cause chez DeMarcus Cousins, et ça ne l’a jamais été. Au contraire, c’est peut être cela qui rend son cas aussi frustrant. C’est plutôt tout le reste qui lui fait défaut. De la mentalité aux fondamentaux du jeu, en passant son attitude hors terrain et la difficulté de gérer une telle personnalité qui, en plus, ne fait pas gagner son équipe, et n’a donc pas la légitimité d’être pénible. Quand LeBron James s’improvise assistant GM (voir plus), on laisse passer. Quand Kobe Bryant fait des siennes, on passe l’éponge. Quand Michael Jordan malmène coachs, joueurs et dirigeants, on l’accepte. Quand DeMarcus Cousins enchaîne les casseroles sur le terrain et en dehors aussi, sans aucun match de playoffs sur le CV en 7 ans, ça coince un peu plus.
Que ce soit dans la science du jeu défensif, le niveau défensif général même, le sens du placement, en attaque comme en défense, le travail des appuis et le footwork dans à peu près tous les compartiments du jeu, l’intensité à mettre sur le terrain, ou le travail de raisonnement à faire à tout instant pour réaliser de bons choix sur le terrain. Tout cela, c’est ce qui fait défaut à Cousins. Qu’il ait du basket plein les mains et des qualités physiques uniques pour son poste, on le sait depuis sa draft (2010). Mais ce sont les déchets, les défauts techniques, la mentalité et les mauvais choix qui le retiennent.
Si d’un point de vue talent, il est clairement dans les tous meilleurs de NBA, en terme de niveau de jeu et de valeur ajouté à une équipe, c’est en tout cas loin d’être le cas. Est-il cependant un meilleur joueur que Draymond Green ? Pas en termes de capacités individuelles, mais dans tout ce qu’il fait sur le terrain pour faire gagner ? Évidement que non. Classer les joueurs par talent individuel semble être ce qui passionne les foules, mais cela n’a pas grand intérêt au final. L’important reste le niveau de jeu, l’apport à son équipe et la contribution à la victoire. Bien que, c’est vrai, la comparaison hâtive (faite pour illustrer un propos et pas pour la comparaison en elle même) avec Draymond Green est contestable, du fait que l’un étant dans un rôle de première option d’équipe et l’autre non. Mais au fond, cela n’emmène-t-il pas à la question suivante : DeMarcus Cousins est il réellement un franchise player ?
Les faits ne plaident pas en sa faveur. Le contexte toujours néfaste et dysfonctionnel des Kings vient évidement nuancer cela, mais les faits sont là. Les joueurs ont changé, les entraîneurs ont changé, les directions ont changé, les seules constantes depuis 7 ans, c’est DeMarcus Cousins, et la défaite. A sa décharge, cependant, coachs, joueurs et directions se sont en effets enchaînées, mais sans que beaucoup dans le lot ne puissent réellement être qualifié de compétent.
Mais tout de même. Au delà de l’environnement autour, Cousins est très loin du statut de franchise player. C’est là un terme vaste dans lequel chacun y mettra la définition qu’il veut. Mais si l’on rattache à ce mot la notion de victoire, on peut distinguer deux catégories : les vrais bons franchise players qui font gagner (LeBron, Durant, Curry, Harden, Kawhi) et les borderlines, ceux qui aspirent à accéder à cette dernière catégorie sans arriver pour l’instant à franchir le dernier palier (George, Wall, Butler, Westbrook, Davis, etc). Gagner, dans le sens faire de son équipe un prétendant au titre, évidemment, pas juste obtenir un bon petit bilan au-dessus des 50% de victoires mais sans aucune réelle chance de viser le Graal. Le problème, c’est qu’actuellement, Cousins est lui même borderline du deuxième chapeau des borderlines du premier. Il n’arrive même pas à faire passer son équipe de mauvaise à correcte ou bonne, alors encore moins pour le palier suivant de bonne équipe à prétendant au titre.
Et ce n’est pas un fait inexplicable, ce n’est pas une notion ineffable. Très concrètement, Cousins n’est tout simplement pas assez bon, en attaque comme en défense pour porter son équipe. Un match de basket, c’est un certain nombre de possessions, et c’est à qui en convertira le plus qui gagnera le match. Or, en attaque, Cousins est un joueur inefficace et qui perd beaucoup de ballons, ne transformant donc pas beaucoup de possessions offensives des Kings en points. En défense, c’est beaucoup plus mauvais que ça. Ses déficiences offrent beaucoup trop de points à l’adversaire (d’autant qu’un intérieur à une importance immensément plus grande qu’un arrière dans l’impact défensif). Quand on fait le bilan, la balance penche plus du coté de l’adversaire que des Kings.
Ce qui est d’autant plus frustrant avec Cousins, c’est qu’il aurait pu (et/ou aurait du) faire partie du premier chapeau. Un pivot aussi dominant, pouvant scorer à volonté en un-contre-un, avec les qualités de passe pour exploiter les brèches qu’il génère dans les défenses, avec en options secondaires du drive et du shoot, parfaits dans la NBA moderne, et qui a les atouts pour faire le boulot défensivement, il n’y a pas beaucoup de profils plus idéaux sur le papier. Mais c’est sur le papier. Et le cas de DeMarcus Cousins illustre bien l’importance capitale et bien souvent sous estimé de la prise de décision dans le basket.
La différence également entre Cousins et les autres vrais franchise players de NBA actuellement, c’est le poste, et la part de responsabilités dans la défense que celui-ci implique. De manière tout à fait évidente, un pivot a une bien plus grande importance défensivement qu’un extérieur. Et le niveau défensif de l’équipe est beaucoup plus proportionnel au niveau de son intérieur que de son joueur extérieur. Un arrière qui se fait mettre dans le vent, la défense peut effectuer des rotations pour contenir et rattraper l’erreur. Un intérieur incapable de tenir la raquette, c’est panier directement assuré.
C’est peut être injuste, mais pour un pivot, être franchise player passe obligatoirement par (au minimum) un bon niveau de jeu défensif. Dans l’histoire, tous les grands pivots qui ont porté leur équipe n’étaient pas manchot en défense : Olajuwon, Robinson, Ewing (pour ne pas remonter trop loin), même Shaq, Duncan évidemment, ou plus récemment Dwight Howard à Orlando. Ce n’est d’ailleurs pas si injuste que ça. A même niveau de jeu et de développement, un joueur plus grand peut aussi faire plus de choses sur un terrain et avoir un plus grand impact (chez les joueurs d’avenir, les têtes d’affiches se nomment actuellement Towns, Embiid, Porzingis et autres : des intérieurs). Certes, un intérieur comme Cousins incapable de tenir sa raquette est plus pénalisé qu’un arrière. Mais l’épée est à double tranchant : pour peu qu’il soit bon défensivement, un intérieur a aussi un plus gros impact qu’un bon défenseur extérieur. Le Howard d’Orlando n’a jamais été un monstre offensif, mais son impact défensif a suffi à faire du Magic une place très forte de la Conférence Est et de la NBA.
Sur le papier, une nouvelle fois, l’association avec Anthony Davis semble très prometteuse. Au-delà de la somme de talent pur, jamais négligeable, les deux peuvent s’inscrire dans un jeu NBA moderne très aéré tout en apportant de la taille et de la mobilité en défense. Reste à voir désormais comment tout cela va se décanter sur le terrain.
Théoriquement, Cousins peut encore beaucoup progresser. Il part avec des superbes atouts, tant physiques que d’un point de vue basket. Un mec avec autant de petits défauts techniques dans tous les compartiments du jeu, mais qui tourne quand même à presque 28 points par match, c’est que le talent pur est quand même assez génial. De plus, comme souvent répété, l’environnement médiocre de Sacramento n’est réellement pas à sous estimer, bien que dans cet article nous nous soyons beaucoup concentré sur le joueur en lui même. Le manque de vétérans de qualité pour lui apprendre les fondamentaux du basket ou le tenir quand il faut, ou même tout simplement le manque de continuité dans le coaching, et le manque de cohérence de la part de la direction, tout cela à clairement pénalisé sa carrière aux Kings.
Seul problème : Cousins veut-il changer ? Et peut-il le faire ? Veut-il réellement modifier son jeu, ou n’est ce pas trop tard tout simplement ? Il est tout de même dans sa 7e saison NBA, et le succès individuel qu’il a déjà connu dans la grande ligue vient sans doute légitimer à ses yeux sa manière de jouer. Certes elle n’a pas fait gagner, cette manière de jouer, mais le fait d’avoir été chez les Kings avec tout ce que ça représente de mauvais, vient apporter un contre-argument. D’accord, Cousins n’arrivait pas à faire gagner son équipe en jouant de la sorte, mais c’était les Kings, c’était le bordel, donc le fautif c’était l’environnement, pas le joueur. Que ce soit faux (ou en tout cas complètement vrai) importe peu, cela fait sans doute partie du raisonnement de Cousins. La détérioration de ses choix au fil des années laisse en tout cas penser que lui-même n’est pas si ouvert que cela à une remise en question.
Une nouvelle page est en tout cas en train de s’écrire à New Orleans, et ce devrait être très intéressant de voir quelle direction va prendre la carrière de DeMarcus Cousins à partir de maintenant.