Kyle Korver à propos de son combat contre l’inégalité raciale : « Si tu as l’intention d’acheter mon maillot sois au courant de ce que je véhicule »
Kyle Korver, l’arrière du Jazz d’Utah a publié une lettre ouverte sur ThePlayersTribune. C’était l’occasion pour l’homme aux 16 saisons NBA d’aborder un sujet très sensible aux États-Unis : le racisme et les privilèges des blancs.
Dans sa lettre intitulée « Privilegied », Korver a décidé d’aborder différents sujets liés au racisme et surtout à sa place en tant que joueur blanc de la NBA. Pour cela, il s’est appuyé sur les expériences qu’il a pu vivre au sein de la ligue et en dehors.
» Il y a un tabou autour duquel j’ai beaucoup cogité ces dernières semaines », a écrit Korver. « C’est le fait que, d’un point de vue démographique, si nous sommes honnêtes: j’ai plus de points en commun avec les personnes présentes dans les gradins d’un match de NBA que chez les joueurs sur le terrain. »
Il est notamment question d’un incident impliquant Thabo Sefolosha lorsque Korver et lui étaient coéquipiers à Atlanta en 2015, mais aussi l’incident impliquant Russell Westbrook le meneur de jeu d’OKC avec un fan du Jazz le mois dernier.
Concernant l’affaire Sefolosha, l’ancien joueur des Hawks avait été arrêté en 2015 pour avoir a priori interféré sur une scène de crime. Il s’était ainsi retrouvé avec une fracture à la jambe pendant cette arrestation qui l’avait contraint à mettre un terme à sa saison. Il avait ensuite été acquitté et nous n’avions plus entendu parler de l’affaire. Korver regrette fondamentalement sa première pensée lorsqu’il avait appris l’histoire et soulève donc un plus gros problème.
» Le matin où j’ai appris que Thabo avait été arrêté, quelle était ma première pensée ? A propos de mon ami et coéquipier ? Ma première pensée a été : qu’est-ce qu’il faisait dans une boîte de nuit lors d’un back-to-back ? Quoi qu’il en soit, avant de connaître toute l’histoire, et avant même d’avoir eu la chance de parler à Thabo, je l’ai blâmé en quelque sorte. Je me suis dit que si j’avais été à la place de Thabo, dans un club tard le soir, la police ne m’aurait pas arrêté. Sauf si j’avais fait quelque chose de grave. Pourtant, impossible de me débarrasser de ce sentiment de malaise. Pourquoi ai-je eu l’impression d’avoir laissé tomber mon ami ? »
Concernant l’affaire impliquant Westbrook et un fan du Jazz, l’histoire est sensiblement différente, et le ressenti de Kyle Korver reste pourtant inchangé. Le meneur d’OKC avait tenu des propos très injurieux envers un fan du Jazz qui lui avait dit au préalable « Mets-toi à genou comme tu as l’habitude de le faire. » Ici, il ne fait aucun doute que le commentaire du fan était à caractère raciste et faisait référence à l’esclavage.
» L’incident a touché la totalité de l’équipe. » A écrit Korver. « Outre le sentiment de déception et d’épuisement face à ce genre d’incidents, il y avait surtout autre chose de plus difficile à cerner. Cela devenait limite une question d’existence, une personne “de couleur” dans un espace pour “blancs”. On en revenait donc au racisme aux États-Unis. »
Korver a par la suite mentionné son « privilège » d’être un homme blanc, expliquant que cela le mettait dans une situation complexe.
« Peu importe à quel point je m’engage, peu importe à quel point mon soutien est inébranlable pour la NBA et WNBA, je serai toujours renvoyé à ce point de vue privilégié. » A-t-il écrit. “Ce qui, bien sûr, signifie que, d’un autre côté, je pourrais tout aussi bien choisir de ne pas y participer. Chaque jour, on me donne ce choix – on me donne ce privilège – en fonction de la couleur de ma peau. J’essaie de me demander ce que je devrais faire. Comment faire en tant qu’homme blanc, comment faire partie de la solution en ce qui concerne le racisme sur mon lieu de travail ? Dans ma communauté ? Dans mon pays ? Nous devons soutenir activement les causes de ceux qui ont été marginalisés. Il s’agit de comprendre que les Noirs et les Blancs sont toujours différents en Amérique. Ces différences viennent d’une histoire infâme et pas d’une division faite par hasard. Il s’agit de comprendre que Black Lives Matter, et les mouvements comme celui-ci ont de l’importance.”
La résolution du problème est selon lui l’affaire de tout le monde y compris les personnes « privilégiées ».
« Le fait que l’inégalité soit si profondément ancrée dans nombre d’institutions parmi lesquelles nous avons le plus confiance est une mauvaise chose. Je crois que c’est la responsabilité de tous ceux qui sont privilégiés d’aider à redresser la situation. Donc, si tu ne veux rien savoir de moi, en dehors du basket-ball, alors écoute, je comprends. Mais si tu veux savoir quelque chose? Sache ce que je crois. Sois au courant de ça à propos de moi. Si tu portes mon maillot à un match ? Pense à cela. Si tu as l’intention d’acheter mon maillot pense ce que je véhicule. Si tu me suis sur les médias sociaux, sois au courant de cela. Si tu viens aux matchs du Jazz et que tu me supportes, sache que ce combat est le mien. Et si tu revendiques mon nom, mon portrait pour ta propre cause, d’une façon ou d’une autre je voulais que tu saches cela de moi.”
Voilà donc une bonne chose de faite pour l’ancien All-Star qui en avait très certainement gros sur le cœur.