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[Interview 2/3] Nicolas Batum: « Avec Nando et Tony, on n’est pas les mêmes sortes de leader »

En exclusivité pour Basket Infos, l’ailier s’explique sur son supposé manque d’agressivité offensive – et le mic-mac de Rio. Avant de nous plonger dans les autres offres que celle de Charlotte.

N’oubliez pas de retrouver la 1ère partie ici sur l’équipe de France, où il évoque notamment son rôle et les déclarations de Nando De Colo

Il paraît que Nicolas Batum aurait enfin « lancé sa saison », parce que tu as marqué 20 points (mercredi soir contre les Sixers). C’est le genre de commentaire qui te fait rire ?

Ouais ça me fait un peu rire, parce que ça fait combien, neuf ans que je suis en NBA ? Et surtout deux ans avec cette équipe-là, où je fais plus de choses. Donc oui, ce match là, je marque un peu plus, mais le match d’avant, je fais ce que je dois faire également. Ces idées-là, où il faut que je marque 20 points pour lancer la saison… Non. Je fais mon jeu, ce que j’ai à faire. Je sais ce que je dois faire. Mes coéquipiers aussi d’ailleurs.

Tu cherches quand même à être plus agressif sur ces moments-là, où tu marques 17 points dans le troisième quart temps (son deuxième meilleur total sur cette période en carrière) ?

C’est venu tout seul. Je n’ai pas décidé. On était à moins 10, on jouait très mal, j’ai eu des ballons, des tirs. Tu sais, je ne commande rien moi ! Je laisse le jeu venir à moi. J’ai mis des gros tirs, des tirs importants, j’ai eu un gros quart temps, c’est vrai, qui nous a permis de faire la différence, mais je n’ai pas forcément cherché ça.

Quand même, on voit bien que tu es dans un mode différent…

Peut-être, mais comme je te dis je ne l’ai pas prévu non plus. Je ne me suis pas dit : « je vais en prendre 15 dans le quart temps ». C’est vrai aussi que je peux être plus dans l’agressivité. C’est vrai. Mais là c’est venu dans le jeu.

Il y a quand même les attentes de te voir encore franchir un palier, ça doit se faire d’un coup où tu le vois dans une continuité ?

Mais c’est ça justement. Ce n’est pas changer, c’est continuer. Tu vois ce que je veux dire ou pas ? Je suis dans la continuité, c’est mon évolution. J’évolue depuis que j’ai connu Terry Stotts en fait. J’ai cette évolution d’année en année, même si j’ai eu mon petit trou il y a deux ans, mais j’évolue quand même. Je n’ai pas changé. Mon jeu a continué à évoluer et cela va être comme ça pendant les 4-5 prochaines années encore.

Tu n’aimes pas forcer en fait …

Non, non, non. Je n’aime pas. Je n’aime pas et je ne changerai pas. Je ne forcerai pas. Je ne ferai pas « ça » (dominer le ballon) pour faire plaisir aux gens. De toute façon, ce que je veux être, c’est faire plaisir, entre guillemets, à mes employeurs, à mes coaches, à mes coéquipiers… et à moi-même surtout. Je n’ai pas envie de forcer et changer mon jeu. J’ai ma vision du jeu, j’ai une certaine vision qui est la mienne et je veux jouer comme cela, c’est ce que je veux être et je n’ai pas à faire « ça » pour faire plaisir aux gens, aux commentaires, aux experts ou je ne sais pas qui.

 

« Parfois, j’ai l’impression d’être incompris »

 

Mais le Nicolas Batum qui domine au scoring avec les Bleus en Coupe du monde 2014, il se fait plaisir ?

Ouais, bien sûr, mais je n’ai pas forcé. J’ai laissé le jeu venir. Parce que c’est une situation où, à ce moment-là, c’est ce que je devais faire je pense. Tout le championnat du monde, j’ai fait mon rôle de mettre en situation tout le monde. « Où est-ce que Edwin (Jackson) veut avoir le ballon, qu’est-ce que Evan veut faire ? Est-ce que Joffrey veut avoir le ballon là ? ». Joffrey était le meilleur marqueur avant que je ne mette les deux derniers points. Pour moi, j’ai joué le rôle de leader d’une façon particulière. Que les autres n’ont pas forcément vue, mais j’ai essayé de mettre en place tout le monde. C’est comme cela que moi je vois le rôle de leader. C’est comme cela que je le vois. Et après, Nando (De Colo) a un rôle de leader différent et Tony (Parker) à un rôle de leader différent, On n’est pas les mêmes sortes de leader. Moi, c’était plutôt « donnez-moi le ballon pour mettre en place les situations, pour mettre en place les systèmes, pour mettre en place tout le monde et que l’on crée les décalages etc. ». On termine avec la médaille de bronze ! (Il grimace) On aurait dû être en finale, mais bon. Moi j’ai fait ce que j’avais à faire à ces championnats du monde-là.

As-tu l’impression d’être incompris ?

Je pense ouais. Ouais. J’ai l’impression parfois de l’être. Après je peux être passif, soft… même moi quand je regarde le jeu je me trouve comme ça. Mais parfois j’ai l’impression que je ne suis pas forcément compris ouais.

Cela s’exprime comment ?

En fait, tout le monde pense que je dois être Paul George ou Kawhi (Leonard) ou Kevin Durant. (Il inspire) Bien sûr que l’on a ces attentes-là, surtout avec ce que je viens de signer. Mais moi, j’ai une vision du jeu qui est différente.

Du coup, tu es entre le super role-player et LE leader, ou ça dépend des fois ?

Je dois alterner entre les deux, c’est vrai. Quand j’ai signé mon contrat à Portland il y a 4 ans, on me dit : « ouais, il n’a pas les épaules d’un franchise player »… Mais je n’étais pas le franchise player ! C’était LaMarcus Aldridge le franchise player. Et quand j’ai vu (Damian) Lillard à l’entrainement (au premier training camp, juste après avoir signé), j’ai dit : « lui, c’est bon, il va être leader de cette équipe-là ». Ici pareil, Kemba Walker est le franchise player de cette équipe-là, je le sais. L’équipe de France, pareil, Tony Parker est le patron, maintenant c’est l’équipe à Nando, je le sais. Je n’ai pas de problème avec ça du tout moi !

 

« Pour gagner dans une équipe, il faut connaître la hiérarchie »

 

Mais pourquoi as-tu si facilement cette disposition à céder cette place ?

Pour gagner dans une équipe, il faut connaître la hiérarchie, il faut respecter les rôles, sinon tu n’avances pas ! Et je les connais moi. C’est juste une question d’intelligence et comment doit marcher une équipe. Le problème que j’ai eu cet été, là où j’ai mal géré (avec les Bleus), c’est que je pensais pouvoir avoir un peu plus d’impact, si on m’avait laissé l’avoir pour que cela aille mieux. C’est ça que j’ai mal interprété et que j’ai très mal géré. Ça j’avoue que je l’ai très mal géré. Mais j’ai demandé ! Dès le début. J’ai dit « sors moi du cinq, pour que j’ai un certain rôle plus important. Je pense que mon impact sera plus important. Parce qu’il y a déjà trop de playmakers et trop d’instabilité prise dans ce cinq de départ, et que je pense que pour le bien de l’équipe c’est une bonne chose que moi j’y sois ». Je l’ai demandé.

Mais pour être plus précis, qu’est-ce qui te fait dire que quelqu’un d’autre que toi doit prendre ce rôle, comme Lillard par exemple, alors qu’il n’a pas encore joué un match ?

Je préfère être honnête avec moi-même. Je ne vais pas inventer des choses. Dès le premier jour, j’ai vu ce gamin-là j’ai fait « ouais, il a un truc de spécial ». Tu le vois. Moi je l’ai vu. Beaucoup de gens l’ont vu, mais ce sont des choses que moi je ressens très, très vite. Même au début, alors qu’il était rookie et que j’avais le deuxième contrat de l’équipe, j’ai fait : « prends le match en main ». Et puis il me regardait « t’es sérieux ? ». Et je lui disais « oui, oui, tu peux le faire, ça va être toi, dans trois ans c’est ton équipe, donc fais-le dès maintenant ». Ce sont des choses que je sais, que je ressens et si je sens que c’est bien pour l’équipe, et bien je préfère me sacrifier comme cela. Et laisser ce boulot à quelqu’un d’autre.

Mais tu peux aussi le faire toi-même…

Je peux faire, mais quelqu’un peut le faire mieux que moi. (Pause) Je ne vais pas mentir, je ne vais pas mettre en péril l’équipe si quelqu’un d’autre peut faire mieux sur certaines choses. Il y a des choses que je peux faire mieux que d’autres, mais il y a des choses, sur certains secteurs, où je peux être bon mais lui peut le faire mieux que moi ! Et donc ça ne sert à rien de mentir, ça ne sert à rien de le faire – et je sais très bien que certaines fois je dois aussi prendre un match en main et essayer de scorer, comme j’ai pu le faire. Mais si je sens que quelqu’un d’autre peut mieux le faire, parce qu’il a de meilleures possibilités, ou de chances, de le faire que moi, bah je le laisse faire. Comme le fait Kemba (Walker). C’est quelque chose qu’il fait très bien.

Est-ce que tu leur permets de mieux le faire aussi quelque part ? Kemba passe de 41% à 28% à trois points quand tu n’es pas sur le terrain.

C’est ce genre de chose. C’est comme cela que j’ai réussi à mettre Lillard en place, c’est comme cela que j’ai essayé de mettre Aldridge en place… J’aime bien faire ça moi.

C’est parce que tu peux faire ces deux rôles que tu as eu ce si beau contrat (120 millions sur 5 ans, garantis)… Tu n’es pas le seul Français d’ailleurs, et vous êtes tous chez Comsport en plus (l’agence de Bouna N’Diaye et Jérémy Medjana, qui représente également Evan Fournier, Rudy Gobert et Ian Mahinmi), vous avez dû en parler, non ?

On s’est félicités, car on a la chance d’être dans un bon timing. Ça on le sait hein (sourire) ! On est tombé dans un très, très bon timing. Donc voilà, on est payé à notre valeur sur le marché, et on n’est pas forcément surpayés parce que dans deux ans ça va être pire ! Et mon contrat, c’est la moitié d’un contrat max ! Dans deux ans, un contrat max ça va être 200 ou 215 (millions de dollars, sur 5 ans). Donc on est dans les clous de ce que sera ce marché dans deux ans. La valeur du marché NBA est devenue considérablement énorme. C’est abusé. Mais on se rend compte de la chance que l’on a.

Que vous êtes-vous dit alors, ça a chambré un peu ? On sait que Rudy aime bien ça, sur les réseaux sociaux notamment…

On ne s’est pas forcément chambré. Et puis Rudy, cela a été plus tard pour lui, aussi. Mais quand on parlait avec Ian et Evan, on se donnait des conseils. Ou les avis des-uns des-autres. « Toi tu penses quoi de ça, vous pensez quoi de cette situation ? … ». On ne parlait même pas argent ! On parlait de la situation. Les contrats chiffrés sont ce qu’ils sont, mais si tu signes dans une équipe où tu gagnes 10 matchs par saison, où tu ne te sens pas bien… Non, c’est là où tu vas avoir des problèmes, où tu ne vas pas justifier ton contrat et cela va mal aller. C’est ça que j’ai recherché et je demandais aux gars : « vous pensez quoi de cette équipe-là ? ». Et des fois Ian ou Evan m’ont dit « non, non, non, non, non… Ce n’est pas pour toi ça. N’y va pas ».

Peux-tu nous dire quelles équipes ?

Non. Je ne peux pas. J’en ai eu 22 qui m’ont contacté en plus !

« Il y avait quatre contrats max sur la table en fait… »

 

Il se dit qu’il y avait deux contrats max là-dedans…

C’était quatre. (Il hoche de la tête puis sourit) Ouais, non, pas deux, quatre.

Tu as expliqué avoir privilégié Charlotte dès le début d’une certaine façon, mais est-ce que tu as hésité aussi ?

Bien sûr. Bien sûr. Quand même, il ne faut pas être fou. J’ai regardé certaines options, surtout par rapport à ces contrats max. Mais il n’y en avait aucune, basketballistiquement parlant, qui correspondait à ce que j’avais ici.

Il y en avait où tu t’es dit : « si je les rejoins, on peut être direct dans la course au titre » ?

(Il hésite, réfléchit, puis admet doucement) Ouais. (Pause, hoche de la tête), ouais.

Ça a dû être dur là…

Un peu ! Un peu… (Pause) Un peu, parce que justement on se demandait si j’allais avoir ce même rôle. Ça n’avait pas été évident comme décision à prendre, car je me dis : « t’es encore jeune Nicolas ». Donc est-ce que je choisis la facilité de suite, en étant dans un contender ? Parce que ce que j’aime bien ici, ce que Rich Cho (le GM) a prouvé avec Michael Jordan, c’est que là ils ont re-signé tout le cinq de départ, qui est plutôt jeune. On a fait une bonne saison l’année dernière, donc on est en train de grimper. Et ce que j’aime bien, c’est que l’année dernière on fait 48 victoires avec Kemba (Walker), Marvin (Williams), (Michael) Kidd-Gilchrist qui revient, Cody (Zeller) et moi dans le cinq. Et ça va être le même pour minimum trois-quatre ans. Donc ce challenge-là m’a plu. Alors, à partir de ce moment-là, pourquoi pas ?

 

Retrouvez la troisième partie de notre interview, notamment sur sa relation absolument unique avec son agent, mercredi.

Propos recueillis par Antoine Bancharel, à New York

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