[Interview] Frank Ntilikina : « On joue au basket pour vivre toutes ces émotions »
Choisi en 8ème position par les New York Knicks – historique pour un basketteur français ! – Frank Ntilikina vit une semaine folle, comme il le dit lui-même. Après avoir enchaîné immédiatement avec toutes les demandes et la pression new yorkaise, il est désormais dans un avion qui le ramène en France pour jouer le match 5 décisif des finales de Pro A. Basket Infos a pu recueillir ses réactions à chaud.
Frank, comment as-tu vécu ce moment ?
Beaucoup d’émotions. Beaucoup d’émotions quand j’ai entendu mon nom, quand j’ai été appelé pour aller sur la scène. J’ai vraiment pensé à tout ce que j’avais vécu pendant ma jeunesse. Cela m’a donné encore beaucoup de motivation pour travailler encore plus, et devenir le meilleur joueur que je puisse devenir.
Tu ne voulais pas que tes frères, ta mère et ton agent, qui étaient dans la Green Room avec toi, te disent quoi que ce soit en fait…
Je voulais vraiment vivre la Draft à fond quoi. Cela fait pas mal de temps que je la regarde et je voulais juste être à la place des futurs draftés. Et d’entendre le nom pour moi c’était le plus excitant ! De l’apprendre quand on l’entend et pas quelques minutes avant, ça me fait vraiment kiffer quoi. C’est comme cela que je voulais l’apprendre, et franchement ça s’est bien passé, ça m’a fait vraiment plaisir.
Tu t’étais déjà un peu joué le moment dans la tête ?
Un petit peu (sourire)… Quelques fois. Mais franchement c’est loin de ce que cela représente en réalité. Aller sur la scène et marcher vers Adam Silver, c’était… voilà quoi. On vit le rêve vraiment à fond. Et bon voilà, maintenant ce n’est qu’une étape par rapport à ce que je veux faire plus tard et ce que je veux devenir. Mais ça fait rêver et ça donne beaucoup de motivation pour aller chercher encore plus !
« Choisi en huitième position, ça importe peu »
Tu as parlé avec les Knicks juste après la conférence de presse, quel a été l’échange ?
Ils m’ont dit « félicitations » et je les ai remerciés de m’avoir sélectionné (en huitième position, historique pour un basketteur français). Ça prouve leur confiance et je leur ai dit à quel point j’étais motivé par rapport à ce nouveau challenge !
Choisi en huitième position, c’est historique pour le basket français…
Ça fait plaisir, c’est une belle reconnaissance, mais le numéro importe peu. Ça importe, bien sûr, mais ce qui importe surtout c’est après, c’est le travail que je vais mettre en ordre pour aller le plus loin possible.
Il y avait énormément d’informations qui t’associaient déjà à New York, tu t’y attendais en fait ?
A vrai dire, je ne me suis pas mis dans la tête à 100% que j’allais être pris par les Knicks. Je savais que mon nom était dans la discussion, après, on se prépare aussi au fait qu’il peut se passer plein de choses dans la Draft qui ne se contrôlent pas. De toute façon, quoiqu’il arrive ce soir je ne pouvais pas le contrôler, donc je voulais surtout vivre le moment à fond, avec ma famille, en profiter. Vivre mon rêve, qui devient réalité aujourd’hui. Ce qui est bien, et ça donne de la motivation. Je m’y suis préparé un petit peu et juste vivre ce que je vis maintenant cela fait vraiment du bien.
Avec tout ce qu’il s’est passé avec la franchise, notamment ces derniers jours avec les rumeurs de trades pour Kristaps Porzingis, tu as eu un peu peur ?
Peur, je ne sais pas si c’est le mot. Après, voilà, c’est le business. On sait que la NBA, c’est beaucoup de business, de transferts, d’échanges… C’est juste le monde de la NBA. Il faut juste apprendre et savoir se préparer. Après, tout ce qu’il se passe autour des Knicks, on va voir comment cela va se passer. Peu importe ce qu’il se passe, je me prépare à vivre tous ces nouveaux challenges.
Tu te vois déjà jouer au Garden ?
En fait, je ne peux pas réaliser avant que cela n’arrive. Par exemple, quand j’ai joué mon dernier match au Rhénus, c’est là que je me suis rendu compte que je serai drafté deux jours plus tard… C’est là où les émotions ont commencé à monter. Donc je ne pense pas pouvoir imaginer maintenant ce que cela me fera.
« Jouer avec Kristaps serait génial »
Et jouer avec Kristaps Porzingis ?
Jouer avec lui ce serait génial, je pense. On est tous les deux Européens, on a tous les deux un bon QI basket. Jouer le pick-and-roll avec lui, ce serait super. En fait je sais déjà que je jouerai super bien avec lui.
Que penses-tu pouvoir apporter ?
Je pense que je peux arriver aux Knicks avec beaucoup d’espoir. Je pense que je suis un joueur qui va faire confiance à l’organisation, s’engager dans le processus en cours, travailler dur et absolument tout faire pour être le meilleur joueur que je puisse devenir. Je pense être un meneur collectif, qui va donner de l’énergie. En fait, je pense être un poste 1 et 2. Je vais juste essayer de rendre mes coéquipiers meilleurs tous les jours, et je peux défendre dur aussi.
Il y a déjà beaucoup d’internationaux dans l’effectif, ça aide ?
Ça aide d’être dans un environnement où il y a déjà pas mal de joueurs internationaux, pour s’adapter. De pouvoir avoir leurs conseils, sur comment ils se sont sentis leur saison rookie, sur le terrain, c’est juste super pour moi.
Tu as pu goûter aussi à tout l’engouement médiatique autour des Knicks. Tu commences un peu à réaliser ce que ça va être ?
Je le comprenais un peu déjà avant. New York Knicks, l’histoire que l’équipe a… C’est une des franchises les plus connues dans la NBA. Maintenant, de le vivre sous l’aspect un peu médiatique, c’est vrai que c’est assez impressionnant. Mais bon, comme je disais plus tôt, cela fait partie du job. Le plus important, cela va être de rester concentré sur le plus important, et le plus important c’est le terrain.
Toute cette frénésie, l’enchaînement immédiat des demandes, cela a été un peu épuisant ?
Epuisant, je ne sais pas. Beaucoup d’émotions, oui. Epuisant… Je pense que je vais ressentir la fatigue quand je vais monter dans l’avion tout à l’heure (pour jouer le match 5 des finales de Pro A, deux ou trois heures après l’atterrissage). Après, voilà, je vais bien dormir, je vais me concentrer sur le match. C’était surtout excitant d’attendre ce moment avec impatience, et puis qu’il arrive, maintenant, ça fait vraiment du bien.
« Essayer de mettre les émotions de côté et remporter le match 5 »
Tu arrives à séparer les moments ?
Bah, là déjà je suis branché sur répondre à vos questions (rires) ! Mais dès que tout sera fini ici (il avait déjà passé plus de deux heures à faire des interviews pour divers sites et chaînes télévisées), je me rebrancherai à fond sur le match de demain et comment aller chercher cette victoire. Je vais essayer de me reconcentrer, me reposer, me préparer pour le match de demain (il s’apprêtait à prendre un avion à deux heures du matin ici, soit huit heures en France). Essayer de mettre les émotions de côté, toutes ces émotions qui se sont passées. Essayer de remporter le match… et on va voir ce qui va se passer !
Cette expérience du monde pro, en France, tu le vois comme un avantage ?
Je pense que cela m’a vraiment aidé de jouer contre des mecs déjà développés, des adultes. Et de jouer contre certains gars qui sont déjà allés en NBA en fait. J’ai pu jouer avec Rodrigue Beaubois, avec Mardy Collins aussi (qui avait joué aux Knicks de 2006 à 2008 et aux Clippers de 2008 à 2010, avant de passer une saison à Strasbourg l’an dernier). Donc en fait tous mes coéquipiers ont pu m’aider à faire cette transition, des jeunes aux pros. Ça aide énormément.
Comment résumerais-tu cette semaine ?
En fait, ça a été fou, mais aussi excitant ! Je crois qu’au final, on joue au basket pour ça, pour vivre plein d’émotions. Et c’est clair que cette semaine, c’est l’une des plus folles que j’ai vécu dans toute ma vie. Il va falloir essayer d’aller chercher le trophée demain… (aujourd’hui en France). C’est énorme.
Propos recueillis par Antoine Bancharel, à Brooklyn.