[Interview] Joakim Noah : « Je devais faire le ménage dans ma maison cet été »
Forcément interrogé sur l’actualité qui agite les États-Unis, via mais surtout au-delà des terrains de sport, le pivot des Knicks en a profité pour faire passer un message plus spécifique, qui le touche particulièrement. Avant d’évoquer la reprise sur les parquets.
Joakim, difficile de ne pas commencer par le sujet qui a secoué l’Amérique ce weekend. Que penses-tu de cette vague de réactions aux propos de Donald Trump contre les joueurs NFL et NBA qui protestent contre les injustices raciales et violences policières ?
Je pense que c’est super. On parle enfin de choses importantes. J’ai mes propres opinions, après avoir passé beaucoup de temps à travailler avec les jeunes qui sont dans des situations risquées. Et je respecte beaucoup ce pays, mais il faut regarder la situation en face. Du coup, je veux prendre ce qu’il se passe comme quelque chose de positif. Car on parle enfin de problèmes qui sont généralement balayés sous le tapis. Si cela fait parler de poser le genou (pendant l’hymne), derrière on évoque enfin des choses importantes.
Puisque c’est un sujet sur lequel tu t’es déjà pensé, que ferais-tu ?
(Il sourit et hoche la tête) OK, on parle pour de vrai là ! Ce que je ferai ? Les gamins auraient beaucoup plus de mal à mettre la main sur une arme à feu, déjà. Les gamins peuvent se procurer une arme dans ce pays… et on n’en parle même pas ! Ils s’entretuent à des niveaux alarmants, et ça reste tellement facile d’acheter des flingues, des munitions. On peut pointer du doigt qui on veut derrière, mais c’est tellement facile d’acheter une arme dans ce pays… Je commencerai déjà par là. (Il marque une pause) J’investirai plus dans ces communautés, ces quartiers. Il faut qu’il y ait plus d’investissement de la part de ces politiciens. Pour moi, la prévention commence là, dans ces centres. Si vous allez faire un tour dans ces quartiers, il n’y a pas grand-chose. Mais si on investissait sur ces gosses, je pense que la violence diminuerait.
Tu es un vétéran pour cette équipe, as-tu déjà pensé à un message ou une action pendant l’hymne et as-tu été contacté par d’autres joueurs ?
On n’en a pas encore parlé non. J’y pense depuis un moment déjà. C’est une question importante. Le club veut que l’on fasse quelque chose tous ensemble, avec l’organisation, ce que je peux comprendre. Mais on verra, je ne suis pas sûr.
« Je veux me racheter »
Si l’on revient au basket, quel est ton état d’esprit à l’entame de la saison ?
L’année dernière a été difficile, vraiment difficile pour moi. J’ai eu beaucoup de problèmes. J’ai utilisé l’été pour me regrouper, me reconcentrer. J’ai travaillé très dur et je suis excité de commencer le training camp. Je veux être un joueur positif pour cette franchise. Je me sens bien. Cela fait quatre mois et demi que j’ai eu mon opération à l’épaule, ça va. On va voir comment ça se passe, comment mon corps réagit aux contacts, ce genre de choses. Mais jusque-là tout va bien.
[Partez voir Knicks – Celtics à New York]
Il y a eu beaucoup de changements cet été…
C’est différent, c’est sûr. Carmelo représentait quelque chose d’important pour les Knicks, pour la ville… C’est vraiment différent de ne pas l’avoir, ni Derrick (Rose), avec qui j’ai passé toute ma carrière. Mais aujourd’hui, je suis dans une position où je veux me racheter. Pour moi-même, plus que quiconque. Je veux revenir. Je suis payé beaucoup d’argent pour être ici et je veux être en paix avec ça`. J’ai la sensation d’avoir travaillé vraiment très dur. Je sors de deux opérations très difficiles, j’ai eu une montagne très compliquée à gravir. Mais je me suis bougé le cul cet été et je suis excité de reprendre. On a beaucoup d’intérieurs. Des intérieurs de qualité. Donc c’est à moi d’y aller et d’amener du positif à cet effectif.
L’an dernier tu as dit avoir perdu confiance à un moment donné, où en es-tu ?
Je pense que la confiance vient aussi de tout le travail que tu fais. Quand je jouais pour Tom Thibodeau à Chicago, il avait l’habitude de me demander si ma maison était bien rangée. Et je ne comprenais pas ce qu’il voulait dire. Maintenant, je comprends, parce que j’avais besoin de faire le ménage dans ma maison… (Il sourit).
Propos recueillis par Antoine Bancharel, à New York