Basketball Manager: Ma partie, Episode 9
StillBallin s’est collé au jeu de simulation de gestion sportive « Basketball Manager » qui offre la possibilité à son possesseur d’enfiler le costume de General Manager d’une franchise NBA. Alors qu’il teste cette réplique version balle orange de Football Manager pour la première fois, le chroniqueur a décidé de relever l’un des défis les plus relevés de l’histoire de la célèbre ligue américaine: faire gagner un titre aux Timberwolves de Minnesota.
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Comme les inspecteurs de police dans les films ou séries américains, j’ai épinglé et relié avec une ficelle les têtes d’affiche de mon équipe sur un grand tableau de liège planté au milieu de mon cerveau. Rubio est mon meneur, Wiggins mon shooting guard, Shabazz Muhammad son partenaire à l’aile et Karl-Anthony Towns est mon pivot. Mais qui, bordel, sera mon fichu ailier fort?
Évacuons dès à présent ce qui peut l’être. Kevin Garnett (2,11m, 39 ans) aura du temps de jeu mais pas au poste de power. En défense, il n’a plus la vitesse pour suivre les ailiers adverses, ni pour colmater les brèches à partir d’une position moins attachée à la raquette que celle de pivot. Adreian Payne (2,09m 24 ans) n’a même pas encore mérité d’avoir une vraie place dans la rotation, et si son profil très complet en attaque peut éveiller l’intérêt, j’attends encore de le voir le transposer suffisamment efficacement au plus haut niveau.
Damjan Rudez est une wild card qui pourrait avoir plus de temps de jeu que prévu si le besoin de shooteur fiable et de spacing prend la pas sur celui de la défense et du rebond. Il pourrait même potentiellement être titulaire si le staff et moi jugeons que la défense collective (la question du rebond comprise) s’en sort suffisamment bien malgré sa présence (ou parce que le croate aurait haussé son niveau de ce côté du terrain). Ou si Nemanja Bjelica ou Gorgui Dieng ne se montrent pas plus intéressants que lui et son tir par moment démoniaque (50% à trois points sur 2,4 tentatives par match à partir de février l’an passé).
Si les cieux du jeu sont bons avec moi, Nemanja Bjelica arrivera peu ou prou à distiller en NBA le joueur qu’il était en Euoleague lors du dernier exercice. La question de mon poste 4 sera alors réglée. L’ancien stambouliote (2,09 m, 27 ans) n’est pas un shooteur d’une consistance implacable mais il demeure diablement dangereux et inflammable dans ce registre. Normalement, largement assez pour que les défenses adverses se sentent obligées de le coller au train. Sa sélection de tirs peut parfois être discutable mais ici, il sera moins placé dans le costume du leader offensif qui était le sien à Fenerbahce que dans celui du catch-and-shooteur.
Certains diront peut-être que le confiner à ce rôle étroit de shooteur sur réception de passe serait gâcher son talent. Non, messieurs. Premièrement parce que je ne lui vois pas le potentiel du pilier d’une équipe de ce côté-ci de l’Atlantique mais plutôt celui d’un très bon joueur de complément. Et deuxièmement parce que chez moi, un catch-and-shooteur de qualité n’est pas qu’un catch-and-shooteur, notamment lorsqu’il y a quatre extérieurs sur le terrain et que le spacing ainsi développé ouvre d’immenses steppes entre les 7,23m et le panier seulement défendues par un ou deux gardiens isolés.
Mon catch-and-shooteur à moi -et Bjelica rentre plutôt bien dans ce moule- est une menace à trois points qui peut contrer le rush désespéré mais efficace d’un défenseur pour contester son tir, en drivant le bonhomme à rebrousse-poil et profiter de cette petite seconde de cinq contre quatre pour trouver un panier facile, que ce soit en attaquant directement le panier ou en exploitant le décalage de la rotation adverse afin d’aboutir à une position de platine.
Cette faculté n’est pas donnée à tout le monde. Elle requiert les qualités athlétiques et techniques du drive, une brûlante lecture du jeu, une réelle capacité de playmaking et une prise de décision à la fois rapide et juste. Bjelica était assez doué à ce petit jeu sur le Vieux continent, on attendra qu’il se fasse honneur à lui-même dans la grande ligue.
Bjelica a ainsi le potentiel de devenir un précieux rouage dans mon attaque, à la fois capable d’apporter du simple spacing et d’en tirer un profit supérieur à celui que générerait un simple shooteur. Son tir va peser sur les défenses, les obliger à en tenir compte et à s’étirer d’une main mais son combo punch drive/playmaking va en plus les obliger à danser avec l’imprévisibilité de mon attaque et de ses multiples possibilités.
Défensivement, je ne sais pas trop à quoi m’attendre. On peut craindre des limites athlétiques mais peut-être pas rédhibitoires. On peut espérer une intelligence et une dépense d’énergie suffisantes pour qu’il soit pourquoi pas d’avantage qu’un solide défenseur mais ce n’est pas dit. Je me contenterai de quelqu’un qui fait à peu près le boulot si l’apport offensif désiré est bien présent. La défense est avant tout un effort collectif.
Bjelica n’a pas le profil parfait du power forward que j’aimerai ficher à ce poste (celui-ci a l’apparence forcément un peu perturbante d’un Shawn Marion de l’époque des Suns équipé du shoot de Kyle Korver) mais le sien est peut-être deuxième sur ma liste. Reste encore à le voir lui sur un terrain américain et pas une pâle contrefaçon. Le changement brutal d’environnement entre l’Europe et la NBA, certaines limites de son profil plus restrictives que prévues et un tas d’autres choses peuvent se mettre en travers de la réussite de l’ailier. Cela, toutefois, n’apparaîtra au grand jour qu’après une mise à l’épreuve sur le parquet.
Le film Demolition Man continue de dérouler son récit sur mon écran de télé sans prêter attention à mes réflexions caverneuses. De son côté, Sylvester Stallone fait exploser le détecteur d’insultes du monde futuriste dans lequel il a été projeté et tente d’emballer Sandra Bullock.
A côté du serbe, l’idée d’un Gorgui Dieng positionné en power forward m’intrigue. Pas assez puissant pour tenir en un contre un les meilleurs pivots de la ligue, je me demande si sa mobilité et son assez efficace petit shoot à mi-distance n’en feraient pas une option intéressante à l’aile. Mon œil n’a pas assez observé le sénégalais à l’œuvre pour que je puisse réellement incliner mon opinion dans cette direction un brin aventureuse. On parle quand-même d’un joueur de 2,11m qui a joué pivot pendant la majorité de son temps.
Je clique sur l’onglet « Evaluation » du profil de l’intéressé et cherche parmi les rapports mis à ma disposition par mon staff celui qui est le plus détaillé. Celui-ci est l’œuvre de Marty Minlend, un jeune scout NBA de 31 ans qui a commencé sa carrière comme bénévole au sein de la franchise avant de finir par se voir offrir une place parmi le pool de ceux qui sont payés pour ça.
L’avis le plus développé n’est pas forcément le plus juste mais je ne connais pas encore les compétences de mon staff (mis à part peut-être celles de Flip Saunders et de son premier assistant, Sam Mitchell) et ce long texte me donne au moins l’assurance que le bonhomme n’a pas effectué ce travail par dessus la jambe. Il se peut cependant qu’il soit du genre à tirer des conclusions erronées de ce qu’il voit ou, plus grave, de croire voir des choses qui ne sont pas la réalité.
Je regarde rapidement ce que le scout Minlend pense de joueurs que j’ai la prétention de bien connaître tels que Wiggins, Rubio, Muhammad ou encore Pekovic. Si je ne suis pas d’accord avec tout (les qualités de shooteurs de Muhammad sont d’avantage que « moyennes » à mes yeux… cela dit, ce n’est pas forcément moi qui ait raison sur ces points dans le jeu), je pense pouvoir dire que son jugement est sûr. Ces légères craintes désormais écartées, voyons voir ce qu’il dit de l’ancien intérieur de Louisville.
« Gorgui Dieng présente des mensurations adéquates pour le poste de pivot: il mesure 2,11m et présente une séduisante envergure de bras de 2,22m. Pas forcément extrêmement explosif mais très mobile, sa vitesse est assurément un atout. Néanmoins, son manque de puissance lui pose beaucoup de problèmes. Un certain manque de force dans les jambes l’empêche de s’ancrer fermement au sol et de tenir ses positions face à la plupart des intérieurs classiques.
En attaque, sa vitesse et sa longueur en font un assez bon joueur de pick-and-roll dans le rôle du rolleur. Ses centimètres de corps et de bras lui permettent d’être un plus que solide finisseur dans ce registre. Il est un poseur d’écran appliqué à défaut d’être au niveau des élites. L’autre grande force de son jeu offensif est son tir à mi-distance. Dieng a une mécanique de tir assez lente que sa longueur ne suffit pas à compenser face à un défenseur suffisamment proche de lui, aussi a-t-il besoin d’espace pour tirer. Par contre, on peut le qualifier de fiable, ce qui n’est pas vraiment fréquent pour un joueur de sa taille. Il consacre une partie importante de son jeu à cette action.
Cependant, le sénégalais n’a jamais montré qu’il pouvait étendre sa distance de tir jusqu’à la ligne des 7,23m et à déjà 25 ans, il est légitime de se demander à quel point il pourrait devenir un shooteur à trois points intéressant à l’avenir. Il affichait une excellente adresse aux lancers-francs l’année dernière (78,3%) mais ce chiffre est une exception dans sa carrière (63,8%).
Dieng est un intérieur qui joue face au cercle et d’ailleurs, sa technique dos au panier est assez peu avancée tandis que son manque de puissance l’empêche de prendre les bonnes positions et de garder sa contenance face à la pression de l’adversaire. Il semble être conscient de cette limite car il ne s’essaye que très peu à cet exercice. De manière générale, il n’est pas à l’aise pour se créer son propre tir. Ses qualités de passeur sont toutefois à noter. S’il n’est pas au niveau de certains intérieurs de la ligue dans ce secteur, il trouve assez facilement ses coéquipiers quand ils sont dans une bonne position. Même s’il manque de puissance, il est un bon rebondeur offensif.
En défense, Dieng a tout les atouts pour exceller dans la protection du cercle, en aide et sur pick-and-roll grâce à sa combinaison de longueur, de vitesse et d’énergie. Sa carrière universitaire et sa première année en NBA allaient dans ce sens mais il s’est montré assez décevant en la matière pour sa seconde saison professionnelle, sans qu’on puisse réellement déterminer à quel point ces mauvais chiffres étaient de son fait, au regard de la médiocrité défensive collective de son équipe.
Sa bonne moyenne aux contres (1,7 blks/match, 12e de la ligue) cache d’importantes difficultés à protéger l’arceau (les opposants scorent à 55,8% dans cette zone quand Dieng est à proximité) et il commet encore trop d’erreurs. Dieng est un défenseur énergique, ce qui est une grande qualité, mais il a parfois tendance à trop en faire et une partie de ses erreurs viennent de là. Sa défense dans le périmètre peut-être très intéressante mais là encore, des erreurs régulières viennent nuancer son impact. Il est un très solide rebondeur défensif.
Sur le terrain, Gorgui Dieng est très compétitif et énergique. Il présente également un comportement exemplaire et est très apprécié tant des joueurs que des coachs.
Dieng a commencé le basket très tard, aussi il est difficile d’affirmer qu’il a atteint le plafond de son potentiel même s’il a déjà 25 ans. Cependant, il est plutôt actuellement projeté comme un très bon pivot remplaçant ou un titulaire correct.«
Marty Minlend m’a brossé un portrait pour le moins complet du jeune homme. Peut-être pourrais-je à un moment utiliser la boîte de dialogues pour le remercier de ses efforts. Rien ne me dit que tous ces points reflètent la réalité mais pour sûr, on ne peut pas lui reprocher de ne pas avoir bossé. Minlend semble, de façon assez logique, voir Dieng comme un pivot. J’aperçois un menu déroulant permettant si je comprends bien d’avoir l’opinion du scout sur le joueur lorsqu’il positionné sur un autre poste.
Comme un adolescent attardé toujours curieux de connaître la réponse de son interlocuteur à une question stupide, je clique sur « Meneur de jeu ». En une phrase froide et lapidaire, Minlend m’indique que Dieng « n’a pas les aptitudes physiques, techniques et mentales pour occuper ce poste et qu’il ne sera vraisemblablement jamais capable de jouer à cette position au haut niveau ». Ce jeu n’a aucun humour.
Je déroule à nouveau le petit menu et appuie cette fois sur l’occurrence « Ailier fort ». La réponse de l’ancien bénévole est bien plus fournie:
« Gorgui Dieng possède la mobilité pour défendre sur les ailiers forts aux mensurations physiques classiques et présente un certain avantage en matière de longueur. Cependant, son manque d’expérience à ce poste pourrait être problématique. Il est par ailleurs probable que sa vitesse soir insuffisante face aux ailiers forts considérés comme rapides pour leur poste. Offensivement, son tir à mi-distance devrait lui permettre de cohabiter avec un pivot à ses côtés, même si la présence de ce dernier pourrait contrarier ses possibilités de pick-and-roll.«
Ainsi, si l’idée de décaler l’ancien élève de Rick Pitino sur le second poste d’intérieur n’est pas sans potentiel, son succès reste marqué par l’incertitude. Au poste 4, il se peut que son trop plein d’énergie soit un peu moins handicapant car il y aura derrière lui un pivot pour venir le couvrir. Il n’aurait également plus à s’occuper des gros pivots contre qui il ne lutte pas à armes égales, ni plus à être le pilier central de la défense. Néanmoins, demander à un joueur d’évoluer avec succès à un poste qu’il n’a jusque là que très peu occupé dans sa carrière, a fortiori quand l’individu en question n’a commencé le basket qu’assez tardivement, demeure un véritable pari.
En attaque, il n’est pas dit que son tir à mi-distance permette un spacing suffisant. Compter en même temps sur le terrain Kevin Martin ou Kevin Garnett et ses longs 2 assez efficaces pour avoir pratiquement le même effet que des trois points, pourraient au besoin offrir un peu d’air. Mais mon projet de jeu prévoit en priorité -en priorité même sur les victoires- de considérer Wiggins comme titulaire en shooting guard plutôt que Martin (pour mettre Muhammad en ailier) et Towns en pivot plutôt que Garnett.
Si Dieng développe un correct shoot à trois points, je regarderai sa candidature avec un œil lubrique. Un poste 4 de 2,11m bourré d’énergie et capable d’allumer quelques mèches de loin, peut-être un atout précieux, notamment face à certaines configurations intérieures plutôt longues et/ou épaisses. Mais comme le dit Minlend, le faire bosser derrière la ligne comme un taré ne suffira peut-être pas à le rendre au moins correct dans l’exercice. Je pourrais néanmoins tenter l’expérience, comme je pourrais également voir ce qu’il donne face à des powers rapides. Après tout, cette saison 2015/16 est le meilleur moment pour vérifier ce qui marche et ne marche pas.
Tant que l’ancien Cardinal de Louisville ne montre pas les prémices de quelque chose d’intéressant à trois points, Bjelica conserve mes faveurs pour la plus grande portion de minutes sur le poste 4. Cependant, la saison sera longue et beaucoup de choses peuvent se passer. Bjelica peut éprouver les pires difficultés à s’adapter au basket US, Dieng peut se révéler à 7,23m ou encore Rudez se montrer plus bénéfique à l’équipe que ces deux-là.
Peut-être aussi qu’un small ball poussé un peu plus loin avec Shabazz Muhammad en power se distinguera des autres configurations.
La chasse à la place de titulaire sur le poste 4 est ouverte, mes amis.
A suivre.
StillBallin (@StillBallinUnba)