[Interview] Nicolas Batum : « J’apprends à être une première ou deuxième option »

Après avoir été transféré de Portland à Charlotte, Nicolas Batum a découvert une heureuse surprise : les Hornets veulent faire de lui un joueur majeur. Un rôle qu’il a expliqué au micro de BasketInfos, à New York, cette semaine.
Nicolas, lorsque tu as fait un gros match contre Portland la semaine dernière, tu as déclaré que ce n’était pas une revanche. Peux-tu expliquer pourquoi ?
Ce n’était pas un « payback game », parce que je ne vois pas pourquoi je serai fâché contre eux. C’est clairement un renouvellement d’effectif qui s’opère aux Blazers, ils ont tout changé. LaMarcus (Aldridge) est parti, Wesley (Matthews) est parti, (Robin) Lopez est parti, (Steve) Blake est parti, Dorrell Wright est parti. Ils ont tout changé. Pour reconstruire autour de (Damian) Lillard, (C. J.) McCollum et (Meyers) Leonard. Je l’avais compris ça. Je l’avais compris ça et je ne pense pas que je rentrais dans les plans pour reconstruire autour d’une équipe jeune comme cela. C’est la continuité des choses et de la NBA. Donc c’est normal. Après, si l’équipe était restée la même et qu’il m’avait juste changé moi, ç’aurait été différent. Mais là, je voulais juste faire un bon match, quand même, mais je n’étais pas énervé. Juste content de les retrouver.
N’y a-t-il pas un sentiment d’abandon ceci dit ?
Non, c’était la continuité des choses et la fin d’un cycle. Il fallait que les deux parties avancent. Mais pas un abandon. Non. D’autant que je sais de source sûre qu’il y avait beaucoup de personnes qui étaient contre ce trade. Je le sais ça.
Tu dis la fin d’un cycle, mais il y a eu pas mal de chamboulements en fait. Est-ce que les Blazers ont jamais réussi finalement à s’inscrire dans un cycle, notamment avec toutes les blessures ?
J’ai commencé avec l’ère (Brandon) Roy, (Greg) Oden, (LaMarcus) Aldridge. On a fait une très belle saison avec 54 victoires en étant l’équipe la plus jeune de la NBA. On été partis peut-être pour écrire une belle histoire, et les blessures ont fait qu’Oden a beaucoup galéré et que Brandon Roy a pris sa retraite à 27 ans… On a du se remettre en place, on a du drafter Lillard. Ça a remis en route, on a retrouvé une ère, un bon effectif. L’an dernier, quand on a fait venir Afflalo, nous on s’est dit « pourquoi pas ? On a l’équipe pour, on a l’effectif pour. A l’Ouest, qui peut nous battre ? ». On s’était même dit « on peut essayer de titiller Golden State sur une série, pourquoi pas ? ». Et quand Wesley est tombé et après Afflalo est tombé, on a vu que cela allait être compliqué. Mais c’est vrai que l’on n’a jamais eu de chance à Portland avec ça.
Lorsque tu as eu ce match contre Portland, ton ancien coach Terry Stotts était content pour toi, mais il a juste pointé que tu n’avais pas été autant aux rebonds. Pourquoi à ton avis ?
Ah, c’est juste qu’en première mi-temps j’avais zéro rebond (sourire). Il y a des fois où c’est comme cela. J’ai fini avec 5 quand même. Mais il fallait bien qu’il trouve quelque chose à dire, il m’a parlé tout le match !
« Match après match, je prends confiance »
Et qu’est-ce que t’a dit ton nouveau coach, Steve Clifford, depuis ton arrivée ?
Que je n’étais pas forcément une troisième ou quatrième option. Que je pouvais être une première ou deuxième dans une bonne équipe. C’est un rôle que j’apprends aussi. On attend de moi des résultats tout de suite, ce qui est normal, mais c’est un rôle que je n’ai pas forcément pu avoir en NBA. D’être un top 3 – mais vraiment vraiment – mecs que l’on attend tous les soirs. Je ne dis pas que je ne vais faire que des bons matchs, hein ! Je vais en foirer. Il y a 82 matchs. Pour l’instant je fais des bons tirs, mais je vais sortir un 5/20 à un moment donné. Et c’est là où je vais devoir être fort et rebondir derrière. Là, pour l’instant, ça rentre. Si ça reste tout le temps comme ça, je veux bien !
On t’a mis dans un rôle assez différent donc…
Oui. Ils veulent quand même que je garde cette façon de jouer, « playmaker » comme ils disent ici, où je fais tourner l’équipe, mais avec beaucoup plus d’agressivité en attaque. Ils m’ont dit : « tout ce que tu as fait à Portland, les rebonds, les passes, défense, tu gardes avec toi, mais tu auras plus la balle comme première, deuxième option ». Mais pas forcément pour scorer ! C’est ce que j’essaie d’expliquer, car je sais qu’il y a pas mal de gens qui sont partis en mode « ah, première option, prendre 25 tirs pas match, il est pas capable »… C’est pas ça mon jeu. J’ai beaucoup le ballon en initiation d’attaque pour créer une action justement. Il y a plein de fois où je ne vais pas faire la passe décisive, mais je vais créer le décalage qui va faire que… Ou je vais envoyer la balle à (Al) Jefferson à l’intérieur, quand il faut, pour qu’il marque. J’ai cette habilité à pouvoir créer avec le ballon entre les mains. Pour l’instant, ça se passe plutôt bien. Match après match je prends confiance. Et je prends confiance avec cette équipe-là. Parce qu’il faut que je m’intègre à ce groupe. Je viens d’arriver, il y a des joueurs majeurs qui étaient là avant moi. Kemba (Walker) depuis 3-4 ans. Jefferson c’est LE franchise player depuis 2-3 ans également. Le coach aussi est là depuis un petit moment, donc c’est à moi de m’acclimater à cette équipe-là. Ils me font confiance, Kemba et Jefferson me donnent beaucoup le ballon. Ça se passe bien.
Tu donnes presque l’impression de ne pas vouloir être la première option offensive ceci dit…
Ce n’est pas que je ne veux pas être la première option offensive, c’est qu’il y a plusieurs registres de première option. Il y a la version Carmelo Anthony, et il y a la version de joueurs qui ne vont pas mettre 25 tirs par match, mais qui, comme moi depuis quelques matchs, ont beaucoup le ballon entre les mains, mais pour créer, pas forcément pour finir. On me fait beaucoup confiance, beaucoup de systèmes sont pour moi, mais ce n’est pas forcément pour scorer à la fin. Tout expert basket comprend ça. Mais ce rôle de première option, c’est mon rôle maintenant et j’adore. Parce que c’est comme cela que j’ai commencé à jouer, c’est comme cela que j’ai joué toute ma vie (avant la NBA) et c’est comme cela que je m’épanoui cette année.
A suivre demain la seconde partie de l’interview
Propos recueillis par Antoine Bancharel, à New York