Nassir Little raconte son calvaire avec la COVID-19
Ce jeudi, Portland s’est imposé face aux Wolves avec un Damian Lillard incandescent (39 points en 29 minutes). Pliée rapidement par les Blazers (+21 à la mi-temps, +33 après trois quart-temps), cette rencontre a ainsi donné lieu à un quatrième quart-temps sans véritable enjeu, dans lequel les coachs ont ouvert leur banc. Côté Portland, Terry Stotts a ainsi offert du temps de jeu aux jeunes Keljin Blevins et CJ Elleby, mais également et surtout à Nassir Little.
« Tu te sens de nouveau vivant »
Testé positif au COVID le 1er décembre, le sophomore des Blazers était indisponible depuis cette date. Après trois semaines de maladie, il a finalement vu l’horizon s’éclaircir le 22 décembre, jour de son premier test négatif. Enfin, la galère était finie. Depuis, il a progressivement retrouvé la condition à l’entraînement avant donc d’avoir l’occasion de revenir en match officiel face aux Wolves. Un retour qui a fait plaisir à tout l’effectif, comme le souligne Damian Lillard après le match.
« Quand le coach a appelé son nom, il a commencé à sourire immédiatement et tout le monde sur le banc était heureux pour lui. Il a traversé beaucoup de choses. Il est revenu cette saison et a manqué beaucoup de temps, il a eu l’obligation de travailler sa condition sur la route du retour, et toutes ces choses ont rendu les derniers mois très durs pour lui. » Damian Lillard
Si Little a déjà eu l’occasion de jouer en NBA lors de sa saison rookie (12 minutes de moyenne en 48 matchs), cette rencontre, anecdotique sur le papier, aura éternellement une saveur particulière pour lui. La victoire de son équipe passe au second plan par rapport à sa victoire personnelle contre la maladie.
« Il m’a fallu une seconde pour réaliser que j’allais enlever ma veste, mon pantalon et tous ces trucs pour rentrer dans le match. Tu te sens de nouveau vivant. Ça fait un certain temps que je n’avais pas joué un match de NBA. Le simple fait d’être de retour sur le parquet me rend heureux. » Nassir Little
« Tu arrives au point où tu ne veux plus rien ressentir »
Il est difficile d’imaginer le bonheur d’une personne sans avoir vécu son intimité. Dans son cas, Nassir Little s’est confié longuement dans les colonnes de The Athletic afin d’expliquer la complexité de son quotidien en étant malade. Testé positif le 1er décembre après avoir contracté des premiers symptômes, il va progressivement voir son état se détériorer : migraines constantes, fatigue chronique, frilosité exacerbée, perte de l’appétit.
« J’ai eu certains des pires symptômes, j’ai connu une fin de maladie difficile. Je n’avais pas à aller à l’hôpital ou à avoir une assistance respiratoire, mais je me suis vraiment senti mal. Ça m’a durement frappé. Pendant sept à dix jours, j’étais pitoyable. Il y a eu des moments où j’étais avec un sweat, un chapeau, un jogging, des chaussettes et une couverture, je frissonnais comme s’il faisait -20°.» Nassir Little
Si le physique est ainsi durement touché, il est également compliqué de garder le moral lorsque la douleur prend le pas sur le reste. Cloué au lit, le jeune intérieur des Blazers passe par des moments de douleurs intenses.
« Je ne veux pas être morbide ou autre, mais j’en étais arrivé au point où tu ne veux plus rien ressentir. Tu souhaites juste que ça s’arrête. C’est constant, 24 heures par jour, 7 jours par semaine… Uniquement des horribles douleurs. Mon dos me faisait si mal, mes migraines étaient terribles, je n’arrivais pas à manger quoi que ce soit… » Nassir Little
Dans son malheur, il peut compter sur le soutien de sa mère, restée à ses côtés tout au long de sa convalescence, sans être infectée à son tour. Il s’est également beaucoup posé de questions afin de déterminer comment il avait pu tomber malade, mais la problématique relève d’une complexité difficile à élucider.
« J’ai essayé de déterminer où j’ai attrapé la maladie, mais c’est impossible de vraiment trouver. Certains membres du staff ont été testés positifs, donc j’aurais pu être contaminé à l’entraînement, et j’aurais aussi pu le transmettre à mon père et ma sœur. Ou ils auraient pu me l’avoir transmis quand ils sont venus pour Thanksgiving, ou bien j’ai touché quelqu’un et je me suis frotté les yeux ensuite… C’est impossible à savoir. » Nassir Little
Neuf kilos perdus en seulement trois semaines
Dans des États-Unis très fortement touchés par la pandémie mondiale qui nous frappe depuis bientôt un an, Nassir Little a ainsi été témoin comme nous tous des ravages que cela a provoqués. Partout dans le monde, mais également dans l’entourage proche de la ligue. En ayant perdu six de ses proches, dont sa mère, Karl-Anthony Towns est un malheureux symbole des effets dramatiques que peuvent avoir le COVID. Sa tragédie familiale a ainsi suscité énormément de compassion de la part de toute la NBA, mais également une prise de conscience supplémentaire pour Little.
« La situation de Karl-Anthony Towns est devenue réelle pour moi. C’est un gars qui évolue dans la même ligue, j’ai vu ce qui est arrivé à une personne très proche de lui (sa mère), ça m’a fait réaliser que ça aurait pu être n’importe qui, ou moi. Je l’ai donc pris sérieusement, et même avant de l’avoir, j’étais la personne qui disait à mes potes : « Vous devez être intelligents et faire attention…Pas nécessairement pour nous, mais pour les gens qui ne sont pas dans le même état physique. » Nassir Little
Tout le contexte autour des répercussions de la maladie, aussi bien physiquement que moralement, n’a ainsi rien de reluisant. Pour un athlète, cela marque même un net coup d’arrêt. En seulement trois semaines, Nassir Little perd plus de neuf kilos. Une perte de poids rapide qui a donc affaibli un joueur qui avait déjà connu des derniers mois compliqués.
À Orlando, le joueur a ainsi déjà été absent en raison d’une commotion cérébrale subie lors du mini camp d’entraînement précédant le début de la bulle. Il s’était même évanoui quelques jours plus tard lors d’un autre entraînement, poussant alors les Blazers à ne prendre aucun risque avec lui. Le dernier match officiel du joueur avec les Blazers jusqu’à ce jeudi remonte alors au 10 mars 2020, juste avant que la saison ne soit suspendue.
« Ça devient pesant parce que c’est constant. Et du coup tu commences à te poser des questions comme «Bon sang, est-ce que je peux toujours jouer ? Est-ce que je vais revenir en étant le même ? » Tous ces trucs te torturent l’esprit. C’est difficile. » Nassir Little
« S’il vous plaît, soyez prudents »
Le staff des Blazers ne cherche donc pas à précipiter son retour, et va sans doute prendre soin de son jeune intérieur. Il a ainsi eu une quinzaine de jours pour retrouver ses marques à l’entraînement, ainsi qu’une condition physique acceptable avant de remettre les sneakers en match. Le joueur va être en manque de sensations, et doit rattraper tout le retard accumulé, sous le regard bienveillant de ses coéquipiers.
« Mon premier jour, j’étais inquiet que tout le monde me regarde comme si j’avais des cornes sur la tête. Mais tous ont été super accueillants. Ils m’ont tous envoyé des messages quand j’étais malade, me disant que je leur manquais, me demandant comment ça allait, et quand je reviendrais. Ce n’était que de l’amour. Donc dès le début je ne me suis pas senti mal à l’aise, ça s’est fait naturellement. » Nassir Little
Tout semble donc rentrer dans l’ordre pour Nassir Little après avoir vécu le pire mois de sa vie. À seulement 20 ans, il vient de vivre une épreuve particulière qui dépasse largement le simple cadre du basket. Désormais rétabli, il retrouve son quotidien de professionnel et va avoir l’occasion de remettre sa prometteuse carrière sur de bons rails après une année 2020 très difficile. Mais le Blazer ne perd pas de vue l’essentiel suite à son expérience personnelle : la santé. Pour lui il est donc primordial de continuer à sensibiliser les gens afin de leur éviter le quotidien difficile qu’il a lui-même vécu.
« Je le dis à tout le monde : s’il vous plaît, soyez prudents. Je ne souhaiterais pas ça à quelqu’un parce que je ne me suis jamais senti aussi mal dans ma vie. Et c’est sans relâche. Tu veux aller faire la fête ? Ça n’en vaut pas la peine. Manger au restaurant ? Ce n’est pas essentiel après ce que je viens de traverser. Rien ne vaut le coup. Et le plus fou, c’est que ça aurait pu être pire. J’ai de la chance de me sentir mieux. »
Via The Athletic et Oregon Live