La course au MVP est-elle déjà pliée ?
Après avoir vu une bataille serrée pendant des mois, la hiérarchie dans la course au MVP semble se dessiner. Nikola Jokic et Joël Embiid caracolent en tête et le choix devrait se faire entre les deux pivots.
La saison régulière est presque terminée et le pivot des Nuggets Nikola Jokic semble proche du trophée de MVP. Sa saison est immense : 26,2 points, 11 rebonds, 8,7 passes, le tout en 57/41/86. Denver est top 4 à l’ouest avec un bilan de 40 victoires pour 21 défaites. Sur ces 61 matchs, il n’en a tout simplement raté aucun. Il domine tous les pivots qu’il affronte, comme ce soir de janvier où il a fait la totale à Rudy Gobert et au Jazz avec 47 points et 12 rebonds à 65% au tir et 100% de loin, mettant fin à la série de 11 victoires du Jazz. Il a beau courir à 2 à l’heure, avoir une faible détente, un physique un peu grassouillet, il domine tous les soirs. Techniquement, c’est un génie du basket, il n’y a pas d’autre mot, tout semble facile pour lui, et avec un sens unique de la passe, il est probablement déjà le meilleur pivot passeur de l’histoire NBA.
Pour Joël Embiid, sa saison est digne d’un MVP, 29,8 points, 11 rebonds, avec une 2ème place à l’est et un bilan de 40 victoires pour 21 défaites, à seulement 1.5 match des Nets premiers. C’est une bête physique comme on en voit peu en NBA. En comparaison avec Jokic, Embiid est plus dominant physiquement. Il peut monter au tomar sur n’importe qui, il n’hésite pas à faire régner sa puissance dans la peinture, comme il l’a montré face au Jazz en mars dernier où il a compilé 40 points et 19 rebonds face à Rudy Gobert, le tout en étant clutch. Il est quasi indéfendable, et les défenseurs, n’arrivant pas à le contenir, sont souvent contraints à faire faute (11,6 lancers-francs par match), et Embiid sanctionne sur la ligne (85%). Les deux joueurs sont en passe de réaliser quelque chose jamais vu depuis Shaquille O’Neal en 2000 : être un pivot MVP.
À quelques semaines de la fin de la saison régulière, ESPN a demandé à 101 journalistes (qui voteront en fin de saison) d’établir leur top 5 pour le classement MVP, et voici ce qui en est ressorti :
Nikola Jokic a une claire avance sur ses concurrents, mais Joël Embiid à l’air d’être encore dans la course. Pour les départager, les votants vont devoir sûrement fouiller dans les statistiques avancées, et voici ce que ça donne :
D’après les statistiques avancées, Nikola Jokic réalise une meilleure saison que Joël Embiid. Au niveau de l’efficacité au shoot, que ce soit avec l’efficency field goal % (cette statistique ajuste le pourcentage de shoot rentré pour tenir compte du fait qu’un 3 points comptent pour trois points alors que les autres shoots rentrés ne comptent que pour deux points), ou le true shooting % (Elle est destinée à calculer avec plus de précision le shoot d’un joueur que le pourcentage au shoot, aux lancers francs et à trois points pris individuellement), Jokic domine son adversaire, et dans les deux domaines statistiques, il fait partie du top 20 de la ligue.
Là où Jokic montre aussi sa supériorité par rapport à Embiid, c’est sur l’impact qu’il a sur les victoires de son équipe avec les Win Shares (une estimation du nombre de matchs que le joueur a fait gagner à son équipe), et l’écart est assez significatif, mais il peut aussi s’expliquer par le fait que Embiid ait raté 19 matchs.
La Box Plus/Minus est l’une des statistiques avancées les plus significatives, car elle mesure le différentiel de points inscrits et encaissés de l’équipe du joueur, lorsque ce dernier est sur le terrain. Le pivot serbe est tout simplement premier de la ligue, tandis que Embiid n’est pas loin, mais se classe 4ème.
Au niveau des ratings offensifs et défensifs, sans surprise, Jokic impacte plus en attaque et Embiid impact plus en défense, toujours est-il que sur l’ensemble des statistiques avancées, Jokic semble tenir la corde face au pivot des 76ers.
Ce qui pourrait définitivement écarter Joël Embiid de la course, c’est qu’il a déjà manqué 19 matchs sur 60, ce qui fait un total de 68% de matchs joués. Trop peu ? C’est en tout cas ce que nous dit l’histoire NBA. Le MVP avec le plus faible pourcentage de matchs joués était Bill Walton en 1978 avec 60% de matchs joués, sinon, ils ont tous joué plus de 68% de leur match. A contrario, Jokic est pour l’instant sur un 100%, il est présent sur le parquet à chaque match. Surtout que durant l’absence d’Embiid, Philly a eu plus de mal, mais le bilan est loin d’être ridicule (9 victoires pour 10 défaites). Il ne peut plus se permettre de rater des matchs, sinon le trophée de MVP ira sûrement dans le Colorado, et même s’il joue tous les matchs, le trophée aura du mal à échapper à Jokic.
Si Denver continue sur ce rythme et arrive à accrocher un podium, qui plus est à l’ouest, et tout ça sans Jamal Murray, il sera presque impossible de ne pas le donner à Nikola Jokic. Embiid a peut-être encore une petite chance. On sait que la progression d’une année sur l’autre compte beaucoup dans la tête des votants. L’année dernière les 76ers ont été médiocres toute la saison en finissant seulement 6ème et en se faisant sweeper par les Celtics au premier tour des playoffs, cette année, ils sont à la lutte pour la première place de l’est, et la saison de Joël Embiid en est la principale raison. En finissant la saison avec un bilan parfait, et avec des perfs individuelles qui marquent, le tout en décrochant la première place de l’est, Joël Embiid peut espérer chiper le titre de MVP.
D’autres candidats auraient pu prétendre à ce titre, mais pour diverses raisons, ils sont désormais distancés par les deux pivots.
C’est le cas de Giannis Antetokounmpo. Les stats sont encore là : 28,5 points, 11,3 rebonds et 6 passes. Cependant, il ne sera pas élu pour plusieurs raisons. La première, c’est qu’il est double tenant du titre, et que cette année, il semble moins dominant que les deux précédentes. Ensuite, les Bucks ne dominent pas l’est, le bilan collectif est bon (38 victoires pour 23 défaites), mais bien moins impressionnant que les deux saisons précédentes. Enfin, il a eu quelques problèmes de blessure qui l’ont obligé a raté déjà 11 matchs. Trop compliqué pour être élu.
Avant de se blesser à la cheville, LeBron James faisait figure de favori. Courant février, un sondage avait été fait chez ESPN, et LeBron James devançait Nikola Jokic et Joël Embiid. Lui qui a 36 ans, réalisait encore une fois une saison ô combien impressionnante, en 25/8/8 avec des Lakers dans le haut de la conférence ouest, a vu sa blessure l’écarter définitivement de la course. Les Lakers ont chuté avec un bilan à 59%, donc moins bien que celui des Nuggets, et même si LeBron revenait, ça serait trop difficile d’espérer mieux qu’une 5ème place.
C’est aussi compliqué pour le meneur des Blazers, Damian Lillard. Avant le all-star break, Dame était bien dans la course, ultra clutch, grosses performances au scoring, bon bilan collectif, il portait les Blazers sur son dos, sans CJ McCollum et Jusuf Nurkic. Depuis le all star break, Portland et Lillard ont baissé de pied, 13 victoires pour 15 défaites, ce qui fait qu’ils sont 7èmes à l’ouest. Lillard a baissé dans tous les domaines statistiques depuis la pause all-star, il ne performe pas contre les gros. Lui qui avait un joli dossier est maintenant distancé.
Dernier concurrent sérieux, c’est James Harden. Arrivé de Houston en janvier, le joueur des Nets s’est parfaitement adapté au jeu de Steve Nash. Il délaisse un peu plus le scoring pour devenir un playmaker d’exception. Il est meilleur passeur de la ligue avec 11 offrandes par match. Il y a encore 2 semaines, il pouvait faire figure de favori, même devant Jokic et Embiid. Malheureusement, il s’est blessé aux ischio-jambiers. Pas de date de retour annoncée, mais les Nets ne se précipiteront pas pour qu’il soit à 100% en playoffs. Cette blessure est venue sortir Harden de la conversation, laissant le champ libre à ses concurrents.
La course finale n’en est finalement peut-être pas une, et nul doute que l’on verra le premier pivot MVP depuis Shaquille O’Neal en 2000.