Ricky Rubio n’avait pas imaginé une telle saison galère : « Nous avons perdu une année, et maintenant il n’y a plus de temps à perdre »
Ricky Rubio, le meneur espagnol des Minnesota Timberwolves, a fait le bilan de sa saison pour The Athletic. A 30 ans, l’ancien joueur des Suns ou encore du Jazz se projette sur les Jeux Olympiques de Tokyo qui se dérouleront cet été, tout en analysant déjà la voie à suivre pour sa franchise. Un bilan d’une saison hors normes, non pas dans ses résultats, mais dans sa physionomie.
« L’année a été si dure que le basket passait au 3ème ou 4ème plan avec tout ce qui s’est passé », a déclaré Rubio. « Nous ne pouvions pas avoir une saison normale. Je n’utilise pas ça comme une excuse parce que toutes les équipes ont eu le même problème. Mais nous devions porter beaucoup de choses sur nos épaules ».
Revenu chez les Loups, qui l’avaient drafté il y a 10 ans, Rubio tente aujourd’hui de retrouver ses repères, afin de guider une équipe jeune, très inexpérimentée, talentueuse certes, mais qui manque aujourd’hui de résultats probants. Pour le principal intéressé, ce retour s’est fait dans des conditions particulières du fait de la pandémie, ce qui a profondément changé sa vision des choses quant à son comeback dans le Minnesota :
A son arrivée, Rubio est tombé sur un triangle de joueurs très talentueux, composé d’Anthony Edwards, Karl-Anthony Towns et D’Angelo Russell, qui aurait pu amener les T’Wolves vers le play-in, peut être plus si affinités. Raté. Towns a manqué 22 matchs, notamment en début de saison, du fait de blessures ainsi que de la COVID-19, qui a eu un impact énorme sur sa vie comme vous le savez surement. Russell a lui manqué 30 matchs, principalement à cause d’une opération du genou. Arrive maintenant le cas Malik Beasley : il a été absent pendant 35 matchs à cause de blessures et d’une suspension, disons…folklorique, pas simple comme situation d’ensemble.
Tout cela a abouti à ce qui a été la pire saison de Rubio tant sur le plan individuel que collectif. Sur la saison, en 26.1 minutes de jeu en moyenne, il a affiché 8.6 en points, 3.3 rebonds, avec une très suspecte réussite à trois points, de 30.8%, tout simplement sa pire en carrière. Pire encore, durant une période comprise entre le 3 janvier et le 6 février, Rubio n’a pas réussi un seul tir à 3 points, fait absolument lunaire pour un joueur qui en tente 3.1 par match, point d’orgue d’un joueur en très grande difficulté, des deux côtés du terrain. En comparaison, la saison dernière, qu’il juge comme la meilleure période de sa carrière, il culminait à 13 points, 8.8 assists et 4.7 rebonds, à 36% à longue distance. Un autre monde, dans le jeu comme dans la tête. Car oui, la psychologie a joué dans la mauvaise saison de Ricky Rubio. Il n’a jamais pu rentrer dans sa saison, du fait d’une situation compliquée, pas aidé par une absence ou presque de réelle intersaison :
« Avoir une bonne intersaison est vraiment important pour pouvoir être performant lors de la saison. Si ce n’est pas vraiment le cas, la saison est comme un orage qui ne finit jamais, et vous n’avez pas de pause (pour vous rattraper) », selon Rubio. « Donc vous devez sauter dans le train alors qu’il va à deux mille à l’heure, et vous ne savez pas vraiment comment suivre le rythme. »
Pourtant, les espoirs placés en lui étaient élevés à son retour, peut-être trop. Au cours des dernières saisons, il a côtoyé Donovan Mitchell et Devin Booker, jouant le rôle le meneur vétéran et formateur. Le front office comptait surement sur le fat que la situation se reproduise avec D-Lo. Encore raté.
« Avec tout ce qui se passait, moi en sortie de banc, KAT, pas de KAT, jouer avec D-Lo, pas de D-Lo, il y avait beaucoup de choses à comprendre, et nous n’avions pas le temps de nous entraîner donc je n’arrivais pas à retrouver mon jeu « , a-t-il dit. « Puis moi qui pensais que j’étais vraiment en forme et je ne l’étais pas. C’est quelque chose que vous ne réalisez pas, mais ensuite vous voyez que vous êtes trop lent pour intercepter une passe, trop lent sur votre layup, qui se transforme finalement en contre, sans que vous sachiez ce qui se passe. »
Lorsque Russell est revenu à la compétition après avoir été opéré par arthroscopie en février, tout a commencé à aller mieux pour Rubio, qui a pu créer une sorte d’alchimie avec l’ancien des Warriors. Ses statistiques, quel que soit le domaine, ont commencé à progresser. Puis Ryan Saunders, viré, a été remplacé par Chris Finch, venu des Raptors. Le néo coach des Loups a contribué au maintien de cette dynamique. A partir de là, la pente ascendante a enfin daigné pointer le bout de son nez. Les Wolves ont eu un bilan de 11 victoires pour 11 défaites lors de leurs 22 derniers matchs, montrant un réel mieux dans le jeu. Rubio a marqué 26 points lors d’une victoire face à Golden State, 19 points et 6 passes à Detroit, ainsi que 6 interceptions face à la Nouvelle Orleans. Le trio évoqué précédemment a lui enfin pu enchainer les matchs ensemble.
« Je dirais que la saison a été mauvaise sur le plan personnel, mais il y a des choses positives qui me font croire que j’ai repris du poil de la bête au cours du dernier mois de la saison », a déclaré Rubio.
Un autre point positif à soulever, c’est le rôle de mentor qu’a eu Rubio auprès du numéro 1 de la dernière draft, Anthony Edwards. A défaut de ne pas avoir pu réellement accompagner D’Angelo Russell, l’espagnol l’a fait avec le candidat au ROY. Après un début de saison plutôt poussif, Edwards est monté en puissance au fur et à mesure de la saison, devenant une arme offensive de premier plan pour Finch.
« C’est tout simplement amusant de jouer avec lui », a ajouté Rubio. « Il n’essaie pas de faire semblant. Il n’essaie pas d’être quelqu’un qu’il n’est pas. C’est pourquoi il va durer. C’est pour cela qu’il est spécial. Il a ce qu’il faut pour être un excellent joueur. Mais cela étant dit, personne n’a réussi tout seul. Il a besoin d’aide, il a besoin d’être guidé, il a besoin de vétérans et de bonnes personnes autour de lui, de l’agent, des coachs, de tout le monde, à tous les étages de la franchise, pour vraiment devenir celui qu’il peut devenir. »
« Le leadership de Ricky a été déterminant dans le développement d’Ant », a déclaré Finch. « Il l’encourage toujours, il lui parle toujours. Ils avaient développé une connexion avant que j’arrive ici. Il a côtoyé Donovan Mitchell, Devin Booker, il a vu l’ascension de ce type de joueurs, il sait ce qu’il peut transmettre à Ant pour l’aider. »
Et le futur alors ? Si cette saison ne donne vraiment pas envie au Front Office de Minnesota de vouloir poursuivre avec le meneur espagnol, une chose pourrait retenir leur attention : cette alchimie avec les jeunes. Anthony Edwards, KAT, à voir pour D’Angelo Russell. Cependant, les Wolves, en grande délicatesse avec leur cap salarial, seront surement tentés par un trade de Rubio, à qui il reste une seule année de contrat, assorti de 17 millions de dollars.
Surtout que la saison 2021-2022 sera une année charnière pour les T’Wolves. Après une année perdue, il est enfin temps de passer la seconde, pour que le noyau Edwards-KAT-Russell explose enfin, afin d’amener la franchise en playoffs. Towns entrera dans la troisième année de son contrat max, Russell lui n’a plus que deux années à Minnesota contractuellement parlant, ce qui pourrait donner lieu a des changements si la situation ne se règle pas rapidement.
« Je crois que nous pouvons franchir la prochaine étape et vraiment être une équipe solide, capable d’être compétitive en playoffs. » selon lui. « C’est pourquoi lorsque j’ai été échangé à Minnesota, j’étais excité. Je pensais que c’était l’année. Nous avons perdu une année, et maintenant il n’y a plus de temps à perdre. Ça a été mieux et nous avons vu des choses brillantes. Nous sommes loin, très loin de là où nous voulons être. Mais nous avons le temps d’y arriver. Sinon, le processus de reconstruction va recommencer et je ne pense pas que ce soit quelque chose que nous ayons envie de vivre.
Si Rubio ne peut pas gagner avec les Wolves, il pourrait être tenté de le faire avec sa sélection, l’Espagne. Il avait d’ailleurs été élu meilleur joueur de la compétition lors de ma dernière Coupe du Monde avec la Roja. Encore une fois, pas sûr. Cette saison l’a tellement lessivé sur le plan mental qu’il n’est pas sûr de vouloir continuer dans cet engrenage cet été, composé de tests et de matchs à huis clos. Pour lui, un break serait surement le bienvenu :
« Ce ne sera pas des Jeux olympiques normaux. Je suis fatigué d’être testé tous les jours. Cela fait six mois que nous n’avons pas eu un jour de congé avec la famille. Une petite chose, telle que mettre ce truc [le test PCR] dans votre nez, ça vous rappelle tous les jours ce qui se passe dans le monde, que ce n’est pas normal. »