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Jonathan Kuminga, au nom de Goma

Drafté en 7ème position de la dernière draft, Jonathan Kuminga n’est pas un prospect comme les autres. Débarqué de G-League, depuis l’Ignite team, le nouvel ailier des Warriors a déjà vécu bien plus de choses qu’un jeune homme de 18 ans n’en a normalement vécu. Parti de chez lui à 13 ans, il a quitté la République démocratique du Congo pour poursuivre ses rêves de jouer en NBA. Pour cela, il a dû accepter le fait de ne pas revoir ses parents, qu’il a revus pour la première cette année. Pas émerveillé pour un sou par les strass et les excès de Las Vegas, Kuminga est déjà au-dessus de tout ça.

 » Je suis trop vieux pour ces rues (celles de Las Vegas où de jeunes adultes déambulent quelque peu éméchés). C’est juste de cette façon que je me vois. Je ne suis plus ce jeune garçon maintenant. »

Arrivé aux États-Unis à 13 ans, Kuminga n’a jamais oublié Goma, sa ville natale. Élevé dans un milieu modeste, il a connu la pauvreté autour de lui, dans un pays encore marqué par la guerre, terminée un an après sa naissance en 2002. Il n’a pas non plus oublié de venir en aide aux populations touchées par l’éruption du volcan Nyiragongo qui a ravagé d’innombrables maisons et mis à la rue des milliers de personnes. Ainsi, il a donné une grande partie de son salaire, obtenu grâce au fait de jouer en G-League, pour soutenir les actions de solidarité sur place. Et même si sa famille n’a pas été touchée, Kuminga a une nouvelle fois suivi les événements depuis très loin. Comme toujours depuis 5 ans. Et il remet toujours les choses en perspectives.

 » Si j’étais là-bas, je serais l’un de ces gamins qui courent pour échapper au volcan. J’ai traversé beaucoup de choses dans ma vie que les personnes « normales » ne peuvent comprendre. Mais je n’oublie pas à quel point je suis chanceux. Je fais partie des chanceux. »

Évidemment, les violences au Congo, Kuminga les a vécues. Et même s’il dit avoir été relativement épargné grâce à la situation de ses parents, il a été confronté de très près au conflit.

 » À un moment, les rebelles sont venus où j’étais. Nous n’avons pas couru pour autant. Nous sommes restés où nous étions. »

Pour autant, Kuminga ne souhaite pas s’attarder dans les détails sur ce qu’il a pu voir ou vivre. L’important étant d’avancer.

« Pourquoi s’attarder sur le passé ? Le futur est brillant. »

Le Congo il porte avec lui, comme sur sa bannière Twitter qui arbore fièrement le drapeau du pays. Il se sait être une inspiration pour la jeunesse congolaise et se veut porteur d’espoir. Sa lettre ouverte « To the Kids Back Home in Congo », publiée sur The Players Tribune, se veut dans cette même veine. Dans un pays marqué par la pauvreté, son parcours peut être un exemple à suivre. Avec 25 millions de dollars assurés pour les quatre prochaines années, Kuminga a réussi son pari. Ses petits frères sont venus pour étudier aux États-Unis et ses parents vont aussi les rejoindre. La famille va donc enfin être réunie, puisque son grand frère ayant joué à Texas Tech est déjà aux États-Unis et l’aide quotidiennement à gérer son agenda. Après avoir subvenu tant qu’il pouvait aux besoins familiaux, il va maintenant pouvoir offrir une retraite à ses parents.

Pour Kuminga, qui a commencé le basket dans le fond de son jardin avec un panier à linge accroché à un poteau, la famille a toujours été un pilier. Cette même famille, qui dès l’âge de 10 ans l’autorisait à faire seul les 45 minutes qui le séparaient du playground le plus proche, sa mère qui, sous réserve de bonne conduite, lui donnait quelques sous pour aller au cybercafé et profiter tant que possible de vidéos de Kobe Bryant. Qu’importe les conditions de jeu, Kuminga ne pensait qu’au basket. Et lorsqu’il voit une route abîmée, il se rappelle.

 » Tu vois ça, c’est comme à la maison. Et ce sont les bons terrains. »

Ses parents, qui vivent aujourd’hui au Burundi, l’ont donc toujours accompagné. Notamment pour partir aux États-Unis, puisque c’est avec son père, qui avait choisi de rester au pays malgré l’obtention d’une bourse pour jouer au basket pour épouser celle qui deviendra la mère de Jonathan qu’il a monté ses premiers highlights afin de les envoyer de l’autre côté de l’Atlantique pour tenter d’obtenir une bourse. Alors partir si loin et si longtemps sans ses parents aurait pu marquer le jeune Kuminga. Toutefois, il fait preuve d’une maturité glaciale qui témoigne qu’il vient de loin.

 » Les gens me demandent souvent comment je gère le fait d’être loin de mes parents pour si longtemps. C’est quelque chose pour lequel j’étais préparé. Je ne me suis jamais vraiment inquiété. Je savais juste que je les reverrais un jour, tant qu’ils étaient en vie. Je suis juste heureux que tout le monde aille bien. D’où l’on vient, rien n’est garanti. »

Originaire de la République démocratique du Congo lui aussi, Emmanuel Mudiay, parti jouer en Chine plutôt qu’en NCAA pour, lui aussi, subvenir aux besoins de sa famille, comprend l’état d’esprit de Kuminga et sa motivation.

 » Ça ne me choque pas qu’il soit dans la position dans laquelle il est aujourd’hui. En venant de là d’où l’on vient, vous avez la motivation absolue : donner une meilleure vie à votre famille. Il n’y a rien de plus grand que ça. »

La première école à avoir cru en lui, c’est la Mountain Mission School, en Virginie, qui lui a offert une bourse pour l’ensemble de sa scolarité. Il a alors quitté son Congo natal avec une seule valise en main. Sans savoir quand il reviendrait. Il a ensuite déménagé lors de chacune de ses quatre saisons. Pour finir en G-League ou l’ancien joueur et entraîneur NBA, Brian Shaw, qui l’a eu sous ses ordres cette saison, raconte ses impressions.

 » Je pense qu’il va être l’un des meilleurs joueurs de cette draft des deux côtés du terrain. Il a tous les atouts nécessaires et il n’a que 18 ans. »

Pourtant, même aux États-Unis, tout n’est pas facile. Kuminga est en décalage avec la réalité de ceux qu’il côtoie. Et il n’a surtout qu’un seul objectif en tête, quitte à devoir refuser les soirées où il est invité, de peur de compromettre son objectif.

 » C’est dur de s’identifier lorsque quelqu’un se plaint auprès de vous parce que son père ne lui offre pas la voiture qu’il veut. Je sais à quoi ressemble la véritable difficulté. Ne pas avoir d’argent. Ne pas avoir à manger. Ici, c’est un monde totalement différent. »

Et alors que certaines rumeurs le décrivaient comme trop introverti ou encore pas assez dévoué sur le terrain, ses ex-coéquipiers parlent tous d’une personne agréable et amicale. Eric Jaklitsch, son coach à Our Savior New American School et à Patrik School pour ses deuxième et troisième années, se charge lui de commenter les rumeurs sur son manque d’implication.

 » Ceux qui remettent en question le dévouement de Jonathan pour le basket ne le connaissent clairement pas. Ce gars a sacrifié autant que n’importe qui pour en arriver là ».

Autant, voire beaucoup plus lorsque l’on connaît l’histoire du garçon. Un garçon qui selon les témoignages, restait jusque tard dans le gymnase pour travailler son jeu et y revenait plus tôt que tout le monde pour en faire de même lors de sa saison junior. Malgré ces doutes et ceux nés que quelques passages difficiles en G-League, Kuminga ne sait jamais affolé. Et alors que le processus pré-draft battait son plein, l’éruption du volcan lui a fait relativiser l’importance des critiques et de la draft. Une nouvelle fois, sa maturité a joué. Et ce n’était pas la dernière puisqu’elle a aussi impressionné un personnage qui sera central pour la carrière de Kuminga, du moins ses premières années, Bob Myers.

 » C’est dur pour un jeune de 18 ans de s’asseoir et de répondre aux questions d’un propriétaire NBA, d’un GM , d’un scout. Il s’est très bien débrouillé. Il parlait de ses parents qui allaient venir en ville. Il était content. Il ne les a pas vus depuis qu’il est parti. »

Alors qu’il s’apprête à devenir le sixième Congolais de l’histoire à évoluer en NBA, le premier depuis Goma, Jonathan Kuminga va aussi pouvoir rattraper le temps perdu auprès de sa famille. De quoi lui confier un cadre idyllique pour démarrer du bon pied avec les Warriors.

Via The San Francisco Chronicle

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