Tim Hardaway et l’origine du Killer Crossover
Un tour de main, un changement de direction. Ce n’était pas une formule magique concoctée par un étudiant en deuxième année à l’université qui a changé l’art de dribbler pour l’éternité. Tim Hardaway voulait juste atteindre le cercle pour un lay-up sans utiliser le chemin plus court – beaucoup trop difficile – Il a pensé alors que la meilleure solution était d’aller à gauche, puis à droite.Ou à droite, puis à gauche.
« Mon but était d’embrouiller les défenseurs» a déclaré Tim Hardaway, ou tout simplement de les « crosser »
Le dribble croisé fut une révélation à l’époque pour Hardaway. Actuellement il est un move utilisé à chaque match à l’instar du jump shoot ou du reverse. Le crossover est maintenant enseigné dans toutes les académies de basket dès le plus jeune âge. Un joueur et tout particulièrement les meneurs se doivent de maîtriser un tant soit peu ce mouvement. C’est un symbole de l’ère moderne du basket et de nombreux imitateurs de Tim « Bug » Hardaway ont fleuri en NBA.
Sans aucun doute, Hardaway est de la trempe d’une poignée de pionniers qui ont changé à jamais le jeu.
« C’est incroyable » déclare-t-il «les scouts ont désormais même une case spéciale « crossover » dans leur rapport. Ça me fait rire. J’étais juste un joueur universitaire qui essayait quelque chose de nouveau et c’est venu comme ça. Maintenant tous les joueurs universitaires veulent prouver qu’ils savent le faire »
Ce dribble a gelé plus d’êtres humains qu’un Mr Freeze. Tim a utilisé ce dribble tout au long de ses 15 saisons dans la ligue avec les Warriors de Golden State et le Heat de Miami laissant une trace indélébile dans l’histoire de la NBA. À gauche puis à droite ou inversement, chacun dispose de sa variante du « killer crossover » originel de Hardaway. Hardaway lui sa spécialité c’était entre les jambes, mais on retrouve le crossover « normal », le « fake »… Ce mouvement paraît simple, mais il a fallu à Hardaway des heures et des heures d’expérimentations et d’entraînement pour le développer.
Il se rappelle voir Pearl Washington, un des rois de l’asphalte New Yorkais exécuter un reverse.
« Il a fait une feinte comme s’il allait à droite. Ce n’était pas un crossover il n’a pas passé le ballon entre les jambes, mais devant lui. Le lendemain à la salle j’ai essayé de le faire, mais je n’ai pas réussi. Alors j’ai développé mon propre dribble qui est devenu le crossover. Je le faisais entre les jambes en gardant le ballon devant moi en allant de gauche à droite et enfin entre les jambes. J’ai pensé : je peux le faire. »
Hardaway estime avoir passé une semaine à perfectionner son dribble, puis a commencé à le faire à l’entraînement à sa fac de Texas El Paso. Ses coéquipiers furent impressionnés et il décida donc d’en faire une arme de son arsenal. Son crossover fut surnommé « The UTEP Two-Step »
Le crossover n’avait pas encore son label spécial avant que Tim ne rentre en NBA avec les Warriors et le fameux Run-TMC (Tim Hardaway, Mitch Richmond et Chris Mullin). Rapidement les ralentis TV s’attardèrent sur ce dribble tout nouveau qui faisait tant de ravages. Il fut décortiqué et les joueurs tentèrent de se l’approprier.
C’est là que réside le problème, beaucoup de joueurs ont changé le crossover en « carryover » (carry = porter de ballon). Les joueurs furent « autorisés » à porter le ballon dans le creux de la main lors de l’exécution de leur crossover.
Même l’inventeur le regrette :
« Je n’ai jamais porté le ballon. Mes mains restaient au-dessus du ballon. Je n’ai jamais fait comme Allen Iverson ou ces joueurs qui faisaient glisser et portaient le ballon pour éliminer les défenseurs. »
La ligue a fait une tentative de répression, visant notamment Iverson, mais ce fut un échec. Au bout de quelques mois, les sifflets ont cessé de se faire entendre. Le problème pour la NBA c’est que le dentifrice était déjà hors du tube, impossible de faire marche arrière, tellement la mode avait pris rapidement. Il a même envahi tous les niveaux.
« Quand And-1 est arrivé, tout le monde a essayé de dribbler comme ces joueurs de street. Les joueurs ont arrêté de travailler les bases du dribble et l’habileté et ont commencé à mal faire les choses. Ça a mis de côté beaucoup de bons basketteurs. En plus les arbitres le savent, mais ne sifflent pas, que voulez-vous faire. Vous savez que c’est un porter » déclare Hardaway en soupirant. « Je ne suis pas contrarié ou en colère, mais je ne suis pas heureux de l’évolution de ce mouvement. Ce n’est pas de cette façon que je maniais le ballon. J’avais un style unique. Je passais mon défenseur avec un mouvement agréable et il ne savait pas comment m’arrêter. »
Il est toutefois touché par les joueurs qui s’en approchent et il les remercie d’essayer aussi de changer le jeu et de le faire évoluer. Mais lorsque vous lui demandez quel joueur est proche du crossover parfait, de son « killer crossover » il déclare sans hésiter :
« Personne »