A voir : Les articles NBA à ne pas raterCahier des rookies

Cahier des rookies: les perdants de la draft 2017

Le petit monde des rookies est un univers à part dans une saison NBA. Toutes les deux semaines, Basket Infos vous propose d’analyser les performances, bonnes ou mauvaises, des débutants dans la grande ligue.

 

L’exercice est toujours facile, et assez injuste. Mais que serait la draft NBA sans le jeu qui consiste à juger, après coup, qui s’en est le mieux sorti et qui s’est laissé avoir? Le niveau exceptionnel de cette cuvée des rookies fait que les gros ratages ne semblent pas être si nombreux, d’autant qu’il est encore tôt pour juger de tous les joueurs: les constats à mi-saison vont sans aucun doute être amené à changer dans l’avenir, ce qui n’empêche pas d’essayer de décerner quelques mentions « aurait pu mieux faire » aux franchises NBA. Après ces précautions d’usage, allons-y gaiement.

Le ratage incompréhensible: Philadelphie

La saison rookie de Markelle Fultz est en train de se transformer en l’une des situations les plus bizarres connues par la NBA ces dernières années. Pour rappel, les Sixers ont récupéré quelques jours avant la draft le first pick des Celtics en échange de leur propre 3e choix et du 1er tour 2018 des Lakers. Le but, drafter Markelle Fultz, considéré à l’unanimité comme le choix le plus sûr pour être sélectionné en première position. Fultz étant un meneur complet et bon shooteur, le plan semblait parfait: il serait compatible avec Simmons et Embiid, et Philadelphie aurait le trio le plus prometteur de la ligue.

On avoue ne pas avoir bien compris le moment où cette stratégie si bien pensée a dérapé. Fin septembre, des vidéos apparaissent où Fultz tire des lancers-francs comme s’il était en train d’imiter Dwight Howard. Pour s’expliquer, le joueur affirme que des douleurs à l’épaule l’ont poussé à changer son geste, changement qui a amené sa mécanique à passer de très correcte à absolument infâme. Le début de saison est une catastrophe, les Sixers mettent Fultz au frigo et, dans une communication pour le moins embrouillée, alignent communiqués et déclarations incompréhensibles et contradictoires.

Markelle Fultz n’est toujours pas revenu sur les terrains. Brett Brown, son coach, a d’ores et déjà annoncé qu’il ne rejouerait pas avant d’être à nouveau capable de shooter, tout en avouant sa perplexité devant le phénomène. Les vidéos de ses entraînements sont pour le moins inquiétantes (Fultz est au second plan):

 

On croirait voir un enfant avec un trop gros ballon, essayant de trouver comment projeter ce satané objet trop lourd pour lui. Comment un joueur shootant 41% à 3-pts à la fac a-t-il pu en arriver là? Quelle est donc la gravité de cette blessure à l’épaule? Peut-il retrouver sa mécanique antérieure?

Soyons clairs: l’échange fait par les Sixers paraissait parfait à l’époque, et avait été justement commenté comme un coup de maître. Leur gestion de Fultz depuis a été, en revanche, catastrophique. Comment diable une franchise peut-elle laisser son first pick décider tout seul de changer sa mécanique de tir, le faire jouer alors qu’il n’en est clairement pas capable, puis être aussi incroyablement floue dans sa communication? La malchance de Philadelphie est immense, mais leur façon de le gérer l’affaire ne fait pas que frôler l’incompétence. A l’heure actuelle, personne ne comprend la moindre chose à ce qui se passe avec Markelle Fultz, et ne peut dire si sa carrière est ou non en danger. Le fait est que les Sixers, alors que Jayson Tatum brille de mille feux avec les Celtics, sont en train de passer pour le dindon de la farce de la draft 2017.

Le ratage prévu (et mérité): Chicago

Personne n’a compris pourquoi les Bulls ont offert Jordan Bell, un steal probable, aux Warriors, sans rien récupérer d’autre que de l’argent (3.5 millions contre le 38e choix). Depuis, Bell s’est imposé dans la rotation de Steve Kerr grâce à sa polyvalence défensive et son QI basket, encore plus que les plus optimistes le concernant le prévoyaient. Bravo aux Warriors pour avoir parié sur l’incompétence du front office des Bulls.

(Par ailleurs, Chicago a plutôt fait le bon choix en pariant sur Lauri Markkanen dans le cadre de l’échange de Jimmy Butler. Mais pourquoi offrir également aux Wolves le 16e choix, qui aurait pu être utile à la reconstruction de la franchise?)

L’échange mal conçu: Denver

Les Nuggets avaient le 13e choix lors de la draft, qu’ils ont échangé à Utah contre le 24e choix et Trey Lyles. Jusque là, pourquoi pas. Lyles semblait être une contrepartie un peu légère pour justifier de descendre de 11 choix dans la draft, mais les Nuggets croyaient en lui: sa progression ces dernières semaines montrent qu’ils n’avaient d’ailleurs pas tort.

Le choix de Denver devenait clairement moins compréhensible en voyant que leur cible avec le 24e choix était Tyler Lydon, un prospect tout à fait respectable, mais jouant au même poste que Lyles, qu’ils venaient de récupérer, et qu’une flopée d’autres joueurs de l’effectif de Mike Malone (Faried, Arthur, Hernangomez, puis la recrue star de l’été Paul Millsap). Résultat logique: Tyler Lydon a joué 2 minutes cette année, dans un effectif qui n’a quasiment aucun poste 3 et n’a pas de vrai meneur. (A la décharge des Nuggets, il ne restait pas grand-monde d’intéressant sur ces postes à ce moment de la draft).

Le plus rageant dans toute cette histoire est que le 13e choix auquel a renoncé Denver s’est transformé en Donovan Mitchell, en route pour concurrencer Ben Simmons pour le titre de Rookie of the Year.  Comme Jamal Murray, Mitchell n’est pas à proprement parler un vrai meneur, mais une rotation sur les postes arrières avec Harris, Murray et Mitchell aurait tout de même pu être envisageable, vu les qualités de chacun. Mitchell n’aurait pas eu les mêmes responsabilités qu’au Jazz, mais il est difficile de dire qu’il n’aurait pas été plus utile que Tyler Lydon et Trey Lyles réunis.

La draft parfaite, qui ne l’était peut-être pas tant que ça: Sacramento

C’était une des constantes des commentaires le lendemain de la draft: pour une fois, Sacramento n’avait pas fait n’importe quoi lors de la draft. Arrivé le soir de la draft avec le 5e et le 10e choix, Vlade Divac les avait transformés en trois jeunes joueurs: De’Aaron Fox (#5) et le duo Justin Jackson (#15) et Harry Giles (#20), draftés grâce à un échange monté avec Portland. Soit une possible star (Fox), un solide role player ayant passé trois ans à la fac (Jackson) et un pur talent miné par les blessures (Giles).

Depuis juin, l’enthousiasme est un peu retombé. Fox fait une saison moyenne, en comparaison d’autres lottery picks; Jackson a été lancé comme titulaire, s’est complétement loupé et va et vient dans la rotation; Giles, comme prévu, e remet de ses blessures. Il n’y a rien de catastrophique là-dedans: Fox devrait devenir un bon joueur, malgré ses difficultés actuelles, Giles n’était de toute façon pas censé jouer avant un moment, et Jackson a encore la possibilité de s’imposer. Mais, par rapport aux attentes soulevées par ce triple choix, cette première partie de saison est plutôt décevante pour les rookies des Kings.

Ces performances paraissent surtout moyennes par rapport à celles de joueurs que les Kings n’ont pas choisi alors qu’ils en avaient la possibilité: Donovan Mitchell avec le 10e choix (s’ils l’avaient conservé), John Collins, OG Anunoby ou Kyle Kuzma avec les 15e ou 20e choix. Peut-être l’avenir donnera-t-il raison à Vlade Divac, mais pour l’instant, on en est réduit, comme souvent avec Sacramento, à une certaine perplexité.

Ceux qui ont, eux aussi, loupé Donovan Mitchell: Detroit

Comme Denver et Sacramento, les Pistons ont manqué l’opportunité de drafter celui qui s’affirme comme un des meilleurs joueurs de la draft, en optant pour Luke Kennard avec le 12e choix. Portland (Zach Collins, #10) et Charlotte (#11) ont aussi loupé la nouvelle star du Jazz, me direz-vous. Vrai, mais plus compréhensible: avec Lillard et McCollum, les Blazers n’avaient pas vraiment besoin de renfort dans le backcourt, et Monk semblait un meilleur fit aux côtés de Kemba Walker que Donovan Mitchell, plus combo guard que véritable arrière. Pour les Pistons, la logique est moins limpide: les Pistons ont passé l’été à essayer de se débarrasser de Reggie Jackson, n’ont jamais montré le désir de conserver Kentavious Caldwell-Pope et ont fini par récupérer Avery Bradley. Bref, Stan Van Gundy n’aurait pas pu être plus ouvert à une refondation complète de ses lignes arrières, refondation dont Mitchell aurait pu être la clé.

Rien de tout ça n’est une attaque contre Luke Kennard, qui s’avère d’ores et déjà être un sniper très utile (41.3 % à 3-pts). Sa palette offensive visualisée en bulles laisse apparaître un joueur plutôt inefficace offensivement, ce qui n’a rien d’étonnant pour un rookie, à part en spot-up, où il fait déjà partie de l’élite de la ligue.

 

Il est clair, avec ce graphique, que le potentiel offensif de Kennard n’a rien à voir avec celui de Mitchell: Kennard ne joue jamais en un-contre-un (isolation et post-up), n’est pas (encore?) d’une grande efficacité sur pick & roll et est, en gros, utilisé par Stan Van Gundy comme un pur arrière: en catch-and-shoot ou en tir derrière un écran, où il n’est d’ailleurs pas très efficace pour le moment. Dans le meilleur des cas, Kennard devrait être un très bon role player spécialiste du tir longue distance, avec la possibilité d’assurer le playmaking par séquences, tandis que Mitchell montre qu’il a les épaules pour être un futur All-Star. Après Stanley Johnson en 2015 et Henry Ellenson en 2016, voilà donc une troisième draft d’affilée que les Pistons peuvent regarder avec quelques regrets.

Le choix dont la logique nous échappe un peu: Minnesota

Les Wolves ne vont pas se plaindre de la draft 2017, qui leur a offert, via l’échange du 7e choix, Jimmy Butler. Cadeau supplémentaire des Bulls, dont on parlait plus haut: le 16e choix, avec lequel Tom Thibodeau et Scott Layden ont sélectionné le jeune intérieur Justin Patton. Patton est un pivot très mobile, qui semble avoir un beau potentiel d’éventuel two-way player, mais qui est encore très loin d’avoir atteint ce niveau.

Faire un pari vers le milieu de la draft est toujours intéressant pour une équipe qui, comme Minnesota, commence à être compétitive et à en payer le prix en termes de masse salariale et de marge de recrutement lors de la free agency. Masai Ujiri s’est ainsi construit avec une grande maestria un banc tout neuf en sélectionnant de jeunes joueurs que les Raptors laissaient se développer tranquillement jusqu’à ce que leur heure arrive.

La tactique des Wolves devient moins compréhensible lorsqu’il s’agit d’ajouter un intérieur à un effectif qui comprend déjà trois pivots (Towns, Dieng, Aldrich) et deux ailiers-forts (Gibson, Bjeliça), mais n’a que deux vrais ailiers (Wiggins et Butler, Muhammad étant sur la route de l’inutilité complète et de la Chine). Dans une ligue où les meilleurs équipes sont capables d’aligner des lineups avec 3 ou 4 ailiers capables de switcher et de shooter, Thibodeau a fait le choix d’empiler les intérieurs et de sélectionner un joueur qui, de toute façon, passera derrière Towns. S’il est le remplaçant futur de Dieng, pourquoi avoir fait signer 6 mois avant un gros contrat sur 4 ans au Sénégalais?

Bref, Minnesota se débrouille très bien malgré tout. Il n’en reste pas moins curieux de voir que la rotation de Thibodeau n’offre aucune possibilité de temps de jeu à Patton, mais manque cruellement de profondeur à l’aile. Devinez quoi? Anunoby était disponible avec le 16e choix.

Ceux qui n’ont pas su repérer les steals: Indiana, Milwaukee, OKC, Portland

Sans aller jusqu’à Jordan Bell, les trois bonnes affaires de la deuxième moitié du 1er tour de la draft semblent être John Collins (#19), OG Anunoby (#23) et Kyle Kuzma (#27). Pour Anunoby, la surprise vient plutôt du fait que personne ne l’ait choisi avant Toronto, alors même que beaucoup d’observateurs louaient son potentiel défensif et voyaient en lui un possible lottery pick. Dans une équipe qui tourne bien, Anunoby joue parfaitement son rôle, ce que confirment les statistiques avancées. En plus des Wolves et des Kings, dont on a déjà parlé, on se demande un peu pourquoi Indiana, Milwaukee et OKC, qui ont tous opté pour des ailiers, lui ont préféré TJ Leaf, DJ Wilson et Terrance Ferguson. C’est d’autant plus surprenant pour les deux derniers, qui auraient pu utiliser un élément susceptible d’apporter immédiatement de l’intensité défensive. La même remarque vaut pour Collins, qui se montre pour l’instant bien plus intéressant que Justin Jackson, TJ Leaf ou DJ Wilson, tous choisis avant lui.

Pour Kyle Kuzma, la situation est un peu différente. De l’avis général, il est rare de voir un joueur progresser autant durant l’été qui suit la draft que l’a fait Kuzma. Autrement dit, les Lakers ont eu le nez fin, mais ont aussi eu de la chance: il est difficile de reprocher aux franchises de ne pas avoir sélectionné Kuzma plus haut.

Cela étant, le Thunder et les Blazers, qui manquent de banc et d’ailiers capables d’écarter le jeu, doivent sacrément se mordre les doigts de ne pas avoir tenté le coup. Ferguson peut devenir un ailier intéressant, mais a besoin de temps, ce qu’OKC, actuellement, n’a pas. Caleb Swanigan, que les Blazers ont choisi juste avant Kuzma, a lui disparu de la circulation.

Le ratage déprimant, à l’image de la franchise: Orlando

Orlando a fait un très bon choix avec Jonathan Isaac, même si le jeune ailier s’est très vite blessé. En revanche, ils ont manqué deux joueurs plus loin dans la draft qui auraient pu changer pas mal de choses à leur futur: au lieu d’utiliser le 25e choix pour sélectionner Kuzma, ils l’ont échangé aux Sixers contre des futurs picks; idem avec le 35e choix, échangé à Memphis au lieu de prendre Jordan Bell.

Quand ça ne veut pas, ça ne veut pas. Et à Orlando, ça ne veut vraiment pas, depuis quelques années.

 

Si vous voulez en lire plus sur les rookies 2017, voici les six premiers épisodes du cahier des rookies:

Envie de vivre la NBA au plus près, partez vivre une expérience inoubliable avec notre agence de voyages Trip Double. C'est par ici !

3 réflexions sur “Cahier des rookies: les perdants de la draft 2017

  • BorIsaiah_DioZingis

    Amusant.
    Donc j'ai vu une vidéo de Fultz rentrant tous ses tirs à l'entraînement cette semaine mais parce qu'il est toujours en réhab et qu'il est blessé à l'épaule c'est un pick raté… bon bin Blake Griffin est un pick raté aussi.
    Les Bulls ont drafté Markannen et ont déjà Portis qui sont bien bien meilleurs que Bell voir en plus Félicio qui est jeune et plus poli que bell offensivement, mais les Bulls ont raté leur draft?
    La plus grosse blague de cette article. Les Bulls ont récupéré Markannen, Dunn et Lavine lors de la draft mais comme ils se sont débarrassé de Bell qui est largement moins bon que ces 3 là et bien les Bulls ont raté leur draft. Bin oui, Jordan Bell sera un All Star et le futur Franchise player des Warriors.
    Pas comme Markannen, Lavine et Dunn qui n'ont absolument pas de quoi porter une franchise sur leurs épaules.
    Bref. Je m'arrête là

  • Rapha

    Il n'y a écrit nulle part que les Bulls ont raté leur draft, juste que lâcher Bell contre de l'argent est une connerie.
    Merci à toi pour ce commentaire au ton agréable et pas du tout méprisant, en tout cas. Toujours un plaisir.

  • BorIsaiah_DioZingis

    Titre du paragraphe : Le ratage prévu (et mérité): Chicago

    Arrêtons 2 secondes les clichés établis. Pourquoi est ce une connerie d'avoir lâché Bell pour de l'argent?
    Bell est un "energy player" excellent dans son registre. Des comme lui aux states il y en a chaque année dans la draft, Trevor Booker, Tarik Black, Plumlee, Quincy Acy, Capela, Lauvergne, Larry Nance, Cheik Diallo, Joel Bolomboy, Collins etc…
    La différence entre réussite et échec pour ce type de joueur est l'opportunité et le système.
    Contrairement à Green, Bell n'est ni un playmaker ni un décent shooteur. Mais il joue pour les Warriors et a la confiance du coach. Forcément dans un tel système il va briller.
    Était il un steal ou un immanquable? Absolument pas. Il est juste un excellent joueur dans son registre comme beaucoup d'autres.
    Aurait-il été aussi bien utilisé dans une autre équipe avec un autre système? Peut-être pas.
    Mais je peux affirmer que Joel Bolomboy est aussi bon que Jordan Bell. Joel est juste malchanceux.
    Jordan Bell n'est pas Taj Gibson niveaux poste game. Pour moi c'est un bon coup des Warriors et des Bulls.
    Jordan Bell n'est simpmement pas une future star. Mais il est excellent. Faut arrêter la hype

Laisser un commentaire