[Finances NBA, mode d’emploi] 6. La free agency. Part 2: Recrutement et salary cap
Salary cap, free agent, luxury tax, … Lorsqu’arrive l’intersaison NBA, vous êtes complètement perdu dans l’infernal vocabulaire technique de la NBA? Vous aimeriez comprendre la stratégie financière de votre équipe préférée? Savoir pourquoi elle ne peut pas signer Chris Paul? Basket Infos vous offre, jusqu’au 1er juillet, date d’ouverture de l’intersaison, les moyens d’être un spécialiste de ce que l’on appelle le CBA (Collective Bargaining Agreement), bible de tous les General Managers, qui fixe les règles des transferts et des contrats.
Nous allons vous proposer un résumé de ces règles à travers une série d’articles, les plus complets possibles. Ces derniers se basent sur le CBA 2011, issu du lock-out. Eh oui, en plus d’être compliquées, les règles changent régulièrement, quand elles ne satisfont plus les joueurs et/ou les propriétaires!
Préparez-vous une aspirine, au cas où, et ne vous inquiétez pas si vous ne comprenez pas tout de suite: le monde de la finance NBA s’apprivoise peu à peu!
Après une première grande partie consacrée aux limitations financières (salary cap, contrats, exceptions au cap, luxury tax), nous sommes désormais plongés dans la free agency: après avoir vu comment on devient free agent, interrogeons-nous sur les relations salary cap/recrutement.
Nous avons vu hier le système alambiqué de la restricted free agency, moment un peu à part de l’intersaison, avec ses règles particulières. Mais la free agency, bien sûr, est plus que cela, puisque les franchises jouent en général sur deux plans: elles cherchent à conserver leurs meilleurs joueurs, et attirer ceux des autres équipes.
Rappel: les valeurs de cette année devraient être de 63,2 m$ pour le salary cap, et 77 m$ pour la luxury tax.
Pour recruter un joueur, il y a plusieurs solutions, dont trois sont disponibles pour toutes les franchises:
- faire des échanges, via un système avec ses propres règles, que nous verrons demain.
- resigner ses propres joueurs avec les « Bird Rights », qui permettent de dépasser le salary cap. La masse salariale de l’équipe n’a pas d’importance pour les utiliser: ils concernent aussi bien des équipes en-dessous du cap qui souhaitent le dépasser que des équipes le dépassant déjà.
- faire signer des joueurs au contrat minimum, définis par l’expérience du joueur. Il n’y a pour le coup, aucune limite, une franchise peut signer autant de contrats minimums qu’il veut (dans la limite, bien sûr des 15 contrats maximums que doivent comporter un effectif).
Les autres façons de recruter dépendent de la situation de la franchise par rapport au salary cap. En-dessous de celui-ci, elle peut utiliser l’espace sous le cap pour recruter; au-dessus, elle ne peut utiliser que des exceptions. Espace sous le cap et exceptions ne sont pas compatibles: c’est-à-dire qu’une équipe ne peut signer des joueurs en utilisant cet espace, puis utiliser des exceptions une fois le salary cap atteint. Voyons ces situations l’une après l’autre.
Utiliser l’espace sous le cap
C’est l’idée de base du recrutement NBA: pour recruter des stars qui ne soient pas déjà dans votre équipe, il faut avoir de l’espace sous le salary cap. C’est comme cela que Miami a signé James et Bosh en 2010, ou que Phoenix espère récupérer James cet été.Le principe est assez simple: vous avez une petite réserve d’argent, vous en faites ce que vous voulez, mais quand il n’y a plus rien dans la cagnotte, vous vous arrêtez de signer des free agents.
J’avais pris l’an dernier l’exemple d’Atlanta, qui reste valable pour bien comprendre le fonctionnement de tout cela. Pour l’exemple du Heat, je vous renvoie à un article publié sur le site il y a quelques jours.
Atlanta est l’une des équipes qui a le plus de free agents cette intersaison, ce qui laisse le GM Danny Ferry avec seulement 22,5 m$ garantis, largement en-dessous du salary cap. Soit 35,5 m$ (58-22,5) disponibles pour recruter. Ferry peut donc décider de recruter Dwight Howard pour 20 m$, un autre joueur pour 7 m$, deux autres pour 4 m$ chacun. 20+7+4+4= 35 m$, l’espace sous le cap est rempli.
Dit comme cela, cela paraît relativement simple. En fait, il y a une subtilité d’importance, que certains d’entre vous ont peut-être déjà vue.
Atlanta compte en effet parmi ses free agents Josh Smith et Jeff Teague, et aimerait bien les garder. Smith, lui, n’est pas très chaud pour rester. Naïvement, on pourrait penser que cela ne change rien: pour séduire sa star, Ferry fait tout le recrutement dont on vient de parler, puis resigne Smith et Teague en utilisant les « Bird Rights », qui permettent de dépasser le salary cap. Sauf que ce n’est pas possible, car un tel tour de passe-passe va complètement à l’encontre de l’esprit du système salarial NBA. Imaginez les possibilités que cela offrirait: à Miami, les Three Amigos pourraient décider de devenir tous free agents en même temps, le Heat signerait deux autres superstars avec l’espace libéré sous le cap, puis resignerait son Big Three avec les Bird Rights!
Pour éviter cela, il existe ce qu’on appelle un cap hold. Son principe en est simple: tant qu’une équipe n’a pas renoncé à ses Bird Rights sur ses propres free agents, ou que ceux-ci n’ont pas signé dans une autre équipe, leur salaire continue à compter dans la masse salariale pour l’année à venir. Pour reprendre le cas d’Atlanta, Josh Smith continuera à peser dans les comptes tant qu’il n’aura pas signé ailleurs, ou que les Hawks n’auront pas officialisé qu’ils ne veulent pas le resigner. Les 22,5 m$ de contrats garantis dont on parlait ne sont donc que virtuels: il faut y ajouter au moins le cap hold de Smith (16,5 m$) et celui de Teague (6,08 m$). Ce qui nous fait 22,5+16,5+6,08 = 45,08. Soit plus que 13 m$ sous le salary cap, une sacrée différence! Atlanta peut avoir 35 m$ sous le cap, mais il faut pour cela que la franchise renonce à Teague et Smith.
L’existence du cap hold permet de vrais coups tactiques. Atlanta, justement, peut nous en fournir un exemple. Imaginons que les Hawks renoncent à tous leurs free agents, sauf à Jeff Teague. Cela donnerait un cap hold de 28,58 m$, soit 30 m$ pour recruter. On peut penser qu’avec une telle somme tout est possible, et qu’autant le resigner tout de suite. Sauf que ce n’est pas le cas: les 6,08 m$ de cap hold de Teague sont clairement inférieurs à sa valeur intrinsèque, qui tourne autour de 9-10 m$. Si Teague resigne tout de suite pour 10 m$, ces 10 m$ pèsent aussitôt dans les comptes; alors que si Atlanta attend pour le resigner, ce sont les 6,08 m$ de cap hold qui continuent à compter, soit 4 m$ de plus disponible pour recruter. Sachant que chaque million peut compter pour attirer un gros free agent, il est évident que les Hawks ont tout intérêt à resigner Teague le plus tard possible.
Ce qui rentre en jeu ici est donc la comparaison entre la valeur sur le marché des free agents et le montant de leur cap hold. Si la première est supérieure à la seconde, cela offre un laps de temps intéressant pour recruter. Cette tactique a été notamment utilisée en 2012 par Portland, qui a traîné pour resigner Batum pour pouvoir faire une offre à Roy Hibbert, qui aurait été impossible en resignant Batum immédiatement. Dans le cas contraire, la franchise a au contraire tout intérêt à prolonger son joueur le plus tôt possible, pour éviter que son cap hold plombe les comptes. Ce serait le cas d’Atlanta avec Josh Smith.
Cette dimension tactique est d’autant plus importante qu’une équipe, après avoir rempli cet espace sous le cap, ne peut plus recruter (hormis avec les contrats minimums); il faut donc profiter de toutes les opportunités pour se donner une marge. On notera tout de même, et c’est une nouveauté du CBA 2011, qu’une équipe qui atteint le salary cap après avoir utilisé son espace disponible a encore une petite possibilité de recruter, en ayant recours à la Room Mid Level exception (RMLE), qui leur offre un montant de 2,65 m$ pour dépasser le salary cap. Mais c’est le seul dépassement possible.
Utiliser les exceptions
On a vu ces exceptions dans un article précédent, je vous y renvoie. Pour résumer, ces exceptions sont les suivantes:
- la Mid-Level exception (MLE, 5,15 m$)
- sa version affaiblie pour les équipes au-dessus de la luxury tax (mini MLE, 3,19 m$)
- la Bi-Annual exception, disponible un an sur deux (BAE, 2,06 m$), et qui n’est pas disponible au-dessus de la luxury tax.
Dans l’idée, ces exceptions concernent les équipes ayant déjà une masse salariale supérieure au salary cap, et leur permet de se renforcer de manière très encadrée. En fait, comme souvent en NBA, c’est un peu plus compliqué. Imaginons en effet une équipe A qui dépasse de quelques millions le salary cap. Elle dispose pour recruter de la MLE et de la BAE, soit 7,21 m$. Dans le même temps, une équipe B est 2 m$ sous le cap. Elle a donc cet espace pour recruter, plus la RMLE, soit 4,65 m$. Moins qu’une équipe qui dépasse la salary cap: ce constat va à l’encontre de l’esprit du réglement, qui cherche à récompenser les équipes qui dépensent moins. Pour éviter cela, les équipes proches du salary cap ont la possibilité de renoncer à leur espace sous le cap, et de prendre à la place les exceptions. Ainsi, l’équipe B aura le même montant pour recruter que l’équipe A.
En gros, les équipes proches du salary cap (à partir de 55-56 m$) ont le choix: soit utiliser leur espace sous le cap et la RMLE, soit prendre les exceptions. Mais faire les deux est impossible. C’est la logique d’un système organisé autour d’un salary cap: s’il y a de l’espace pour recruter, il n’y a pas de raisons d’avoir droit aux exceptions.
Demain, nous verrons l’autre moyen de recruter: les trades. Stay tuned, et n’hésitez pas à poser des questions en commentaires!
Quelle question voulez-vous poser après un article si détaillé? La j'ai appris pas mal de chose^^ vivement demain ;)
Merci du compliment ;) Ca a été le plus compliqué à rédiger, quel bordel le cap hold!
Ca je veut bien te croire, c'est tellement un bordel que je relis parfois certains passage 2 fois pour être sur d'avoir vraiment compris mais dit toi que tu nous apprend pas mal de chose chaque jour^^ Ca et quand lecho des parquets passe à la plume pour la draft, se sont mes articles préférés^^ long, complet et instructif!!!
Ah ben écoute tant mieux! Tu seras là ce soir pour la draft?
Nan et j'ai grave les boules, c'est pour ça que j'espère qu'il y ait demain matin la vidéo de cette nuit pour me faire la draft tout en lisant vos commentaires^^ en revanche, j'ai fait tourner l'info ;).
Malheureusement la nuit je peut pas vraiment être à l'ordi. Chez nous on a un ordi qui à internet (pas encore la Wifi, eh oui même en 2013) et il est dans le salon donc c'est chaud pour moi d'y être la nuit :( Mais continué quand même vos efforts (apparemment les P.O la nuit ça a cartonné!!! (Juste récompense au passage)
Ah oui je comprends ;)