Il aura fallu attendre 2009, soit la toute fin de la décennie pour assister à la plus belle série de playoffs des années 2000’s. Numéro spécial de « souviens-toi cette série là » aujourd’hui, pour raconter cet affrontement entre les Boston Celtics et les Chicago Bulls, au premier tour des playoffs 2009 seulement, mais qui peut en toute légitimité être considérée comme une des plus belles séries de l’Histoire de la NBA.
Après un titre conquis fièrement en 2008 pour lancer l’ère du Big Three, les Boston Celtics, seconds de conférence Est, débutaient ces playoffs édition 2009 avec l’espoir du repeat. Un problème majeur, et encore le mot est faible : Kevin Garnett, l’âme de la défense et un des piliers des C’s, est blessé et sera indisponible pour la totalité des playoffs … Il n’empêche que l’équipe alignée par Doc Rivers est tout de même compétitive : Paul Pierce, le franchise player maison, Ray Allen, second meilleur marqueur, plus trois autres jeunes joueurs en la personne de Rajon Rondo, le jeune meneur sorti de Kentucky qui s’est révélé un meneur correct dans la conquête du titre 2008, Kendrick Perkins, le jeune pivot qui s’affirme et a étoffé son jeu peu à peu, et Glen « Big Baby » Davis, pour remplacer Garnett dans le cinq de départ. Le banc n’est peut-être pas aussi reluisant qu’un an auparavant, mais on y retrouve tout de même de bons éléments. Eddie House, le shooteur vétéran, Tony Allen, Brian Scalabrine, et un certain Stephon Marbury pour suppléer Rondo à la mène.
Du côté de Chicago, le mot d’ordre est simple : rien à perdre, tout à gagner. En effet, les Bulls sont passés d’une équipe qui héritait du premier choix de draft en 2008 à équipe playoffable quelques mois plus tard. La raison ? Ce premier choix de draft justement, Derrick Rose. Le meneur rookie a redonné de l’espoir à une équipe de Chicago habituée au succès pendant de longues années. Mais malgré tout le talent de Rose, le joueur majeur des Bulls semble être Ben Gordon, fantastique arrière scoreur au shoot diaboliquement efficace. Luol Deng blessé en cours de saison, Chicago a réussi à obtenir John Salmons et Brad Miller en provenance de Sacramento, le premier étant destiné à être l’ailier titulaire, le second à sortir du banc pour apporter son expérience, tout comme Kirk Hinrich, meneur titulaire des Bulls jusqu’à l’arrivée de Rose et désormais joker de luxe aux qualités défensives impressionnantes. Enfin, la raquette est toute jeune, puisque ce sont Tyrus Thomas, intérieur prometteur monté sur ressort, et Joakim Noah qui font la paire. Le tout coaché par un Vinny del Negro dans sa première année sur un banc, et qui porte les Bulls à un bilan de 41-41 pour une septième place à l’Est.
Game 1 & 2 : insolents Bulls
Dès le premier match de la série, les Bulls vont se révéler bien plus que du simple poil à gratter. La première action est représentative : Rose envoie Noah au alley-oop. Les jeunes Bulls n’ont pas froid aux yeux et comptent bien le montrer. Pour Boston, l’absence de Garnett se révèle moins problématique grâce à un Big Baby en forme, notamment sur son shoot à mi-distance, et à un Kendrick Perkins qui s’occupe de finir les actions au poste bas avec une surprenante aisance. Mais la star du match, c’est bien Derrick Rose. Le rookie ne semble pas réaliser l’importance qu’a ce match et joue de la plus décontractée des manières. Résultat : il égale le grand Kareem Abdul-Jabbar pour le plus de points inscrits pour un premier match de playoffs, 36 unités. Rondo lui répond coup pour coup, mais les deux équipes restent au contact tout le match, jusque dans les dernières secondes. La faute à un Ray Allen en dessous de tout (1/12 au shoot)
Quelques 12 secondes à jouer, les Bulls sont menés d’un petit point, mais sur la remise en jeu les arbitres sanctionnent Rondo pour avoir retenu Rose. Deux lancers, réussis, Rose permet aux Bulls de mener 97-96 avec 9 secondes à jouer, mais rien n’est fini. Pierce prend la gonfle, fait son habituel step back, et Joakim Noah mord à la feinte et envoie Pierce sur la ligne, 2.6 secondes à jouer et une chance de remporter le match. Mais aussi clutch soit il, Pierce ne rentra qu’un lancer sur deux … Overtime. Et en prolongations, le héros se nomme Tyrus Thomas, qui dégaine trois fois à mi-distance, pourtant pas son activité favorite, et offre 6 précieux points aux Bulls. Ray Allen, dans une soirée cauchemardesque, manque le shoot de l’égalisation et Chicago s’imposa dans ce premier match, laissant au tapis les champions en titre.
Chicago 105 – 103 Boston
Derrick Rose : 36pts – 11ast. Rajon Rondo : 29pts – 7ast – 9rbs
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Pour le Game 2, les champions en titre sont dans l’obligation de réagir, pour ne pas subir l’affront d’être menés 2-0 par ces Bulls si insolents. Comme au premier match, Rondo répond présent, avec un triple-double même (19 pts/16 ast/12 rbs), contrairement à Rose qui semble beaucoup moins à l’aise et commet plus d’erreurs (10pts). Mais qu’importe, Ben Gordon est en feu lui (42 pts), notamment derrière la ligne à trois points, alors que dans le même temps son vis-à-vis Ray Allen n’a toujours pas démarré sa série, avec deux petits points à la mi-temps. Fort heureusement, ce sera chose faite en deuxième mi-temps, où le grand Ray se réveilla avec 28 points, mais ce n’est encore pas assez pour distancer les Bulls.
La dernière minute du match est on ne peut plus haletante 111-110 pour Chicago, Rondo ne trouve personne à qui donner le ballon et balance un shoot devant Joakim Noah à la fin des 24s pour redonner 1 point d’avance aux C’s. Il reste 1’01 à jouer, Gordon prend la balle et en tête de raquette score sur un petit step back qui met Ray Allen dans le vent. 46 » à jouer. Rondo dégaine à mi-distance, mais son shoot est trop court et lui revient dans les mains avant qu’il ne le donne à un Ray Allen étonnamment seul derrière la ligne. Splash, 115-113 pour Boston. Gordon est décidément en feu et égalise avec 12 secondes à jouer après un nouveau numéro de dribble. Mais ce sera Ray Allen qui aura le dernier mot : sur la remise en jeu, Rondo hérite de la balle et la file à Ray qui en sortie d’écran crucifie les Bulls sur un trois points devant Joakim Noah. Ray Ray s’est enfin réveillé dans cette série. Boston sauve sa peau, mais à 1-1 dans la série, tout reste à faire.
Chicago 115 – 118 Boston
Ray Allen : 30 pts (6/10 à trois points). Ben Gordon : 42 points (6/11 à trois points)
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Game 3 & 4 : Chicago contient Boston
Touchés dans leur orgueil d’avoir laissé filer un match à domicile, les Celtics vont dès le Game 3 tenter de reprendre l’avantage du terrain et par la même occasion le contrôle de la série. Ce sera chose faite, grâce encore une fois à un très bon Rajon Rondo. Ni Paul Pierce, ni Ray Allen n’ont à forcer leur talent pour offrir à Boston une large victoire, la seule et unique aussi large victoire des 7 manches de la série. Gordon termine avec 15 points, meilleur marqueur des Bulls, tandis que Rose affiche un très moche 9 points – 7 balles perdues. Un match à vite oublier pour Chicago, s’ils ne veulent pas voir s’envoler les C’s dans la série.
Boston 107 – 86 Chicago
Paul Pierce : 24 points (9/15 au shoot) en 27 minutes.
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Aussi, lorsque démarre le Game 4, Boston a dans l’idée de prendre les commandes de la série avec cette opportunité de mener 3-1, et les Bulls dos au mur vont devoir batailler pour espérer égaliser. Et pour cela, Chicago peut compter sur un Derrick Rose retrouvé, qui n’a plus peur d’attaquer le cercle. En face, Rondo est lui aussi majestueux dans ses pénétrations dans la raquette. Un incident éclate au début du 4e quart temps, Big Baby s’élève dans les airs et retombe très lourdement et intentionnellement sur un Brad Miller sous la raquette qui essaye de se dégager. De loin et à vitesse réelle, les arbitres semblent penser que Miller a cogné Big Baby, et l’expulse du match, mais après visionnage de la vidéo Miller n’a fait que se dégager et les talents d’acteur de Davis on fait le reste … Brad Miller n’est plus exclu et n’écope que d’une technique.
De quoi rajouter un peu plus de tension à un match qui n’en manquait pas. 35 » à jouer, 93-93, Doc fait rentrer Tony Allen pour la première fois dans ce match pour contenir Gordon … mais l’arrière part en dribble et score sur un shoot en pénétration. Big Baby manque l’égalisation de l’autre côté, mais Tyrus Thomas ne rentre qu’un seul de ses lancers francs après avoir été envoyé sur la ligne par Boston. Trois points d’avance donc, 96-93, pas suffisant pour Chicago : les Celtics appliquent le même système qu’au Game 2, double écran pour Allen qui dégaine arrière arc … Bang, overtime. Les Celtics ont la main mise sur cette prolongation, et à 9 secondes de la fin les Bulls sont menés de 3 points. Cette fois, le héros se nomme Ben Gordon, qui dégaine à longue distance et envoie le match vers une deuxième prolongation. Gordon est toujours chaud, les Bulls s’échappent à +4, mais Paul Pierce balance un tir derrière l’arc qui remet les Celtics à une longueur des Bulls. Pas suffisant, Boston sera achevé à l’exercice des lancers francs alors que Salmons contrait la dernière tentative de Pierce au buzzer. Chicago réussit à égaliser à 2-2, avec un nouveau triple-double d’un Rondo magnifique qui ne fut pas assez. Le sort de la série se jouera au meilleur de 3 manches, dont deux à Boston.
Boston 118 – 121 Chicago.
Rondo : 25pts, 11ast, 11rbs. Pierce : 29pts, Allen : 28pts.
Rose : 24pts, 9ast, 11rbs. Hinrich & Miller : 18 et 12 points (en sortie de banc)
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Game 5 & 6 : Here comes the drama
De retour à Boston pour le cinquième match, Boston n’a plus le droit à l’erreur, dans l’espoir de conserver l’avantage du terrain. Pourtant, Ray Allen n’est clairement pas dans son match, lui qui s’était montré si précieux depuis le Game 2. Bien aidé par les erreurs d’arbitrage, 4 de ses 6 fautes sont on ne peut plus discutables. Quoi qu’il en soit, la sanction est irrévocable, et les Celtics devront se passer de Ray. Situation d’autant plus compliquée que Boston est mené en fin de 4e quart temps, mais peut compter sur ses tauliers, Rondo et Pierce qui les portent à bout de bras. Moins de deux minutes à jouer, Chicago mène de quatre points, mais Rondo puis Pierce prennent leurs responsabilités et ramènent les C’s à égalité … avant que Gordon ne frappe encore, +2 Chicago. Mais c’est bien Paul Pierce qui a le dernier mot, et avec 16 secondes à jouer prend la gonfle et s’en va sur sa zone favorite, en tête de raquette, spin move et shoot sur Derrick Rose, overtime.
Et en prolongation, the Truth garde le rythme et enchaîne par trois fois ce même shoot, son shoot favori, dont un à 3 secondes de la fin pour délivrer le Garden. Une controverse naîtra sur la dernière action, lorsque Rondo commet une faute intentionnelle sur Brad Miller, qui filait seul au panier dans les toutes dernières secondes. Les Bulls demandent une clear path foul (2 lancers plus la balle), mais n’obtiendront qu’une faute classique, et Miller ratera ses deux lancers. Cette série devient la première de l’histoire à compter plus de 2 matchs en prolongations, et le plus beau reste à venir.
Chicago 104 – 106 Boston
Gordon : 26 points. Rondo : 28pts, 8rbs, 11ast. Pierce : 26 points.
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De retour dans l’Illinois, la règle est simple : Win or go home pour les Bulls. Ou plutôt stay home, puis que c’est dans une sale bouillante et hostile aux Celtics que va se dérouler ce Game 6. Pour donner le ton, un accrochage qui devient presque un début de bagarre entre Hinrich et Rondo, à la suite d’un rebond, vient pimenter un match qui n’en avait pas plus besoin que cela. Rondo ne se montrera pas aussi spectaculaire dans ce match que dans les autres, mais les Celtics peuvent compter sur un Ray Allen décidé à se rattraper du dernier match, et qui est littéralement en feu. Une minute à jouer dans le 4e quart, Boston pense tenir le bon bout (101-96) mais Brad Miller enchaîne 5 fantastiques points, un tir derrière l’arc et un lay up difficile pour gagner un sursis et la prolongation. Bis repetita, Big Baby Davis met un « Big Balls shot » à 40 secondes du terme, mais Salmons pénètre et égalise sur un tir des plus compliqués dans la raquette, 2e overtime.
Cette fois, c’est Chicago qui tient le bon bout, 118-115, mais avec 7 secondes au chrono, Ray Allen prend la gonfle, dribble et balance un tir primé, bang. « What a dagger throw in by Ray Allen ! » s’égosille Kevin Harlan au micro de TNT, et pour cause, quel match, quelle performance de Allen (9e tir primé de la soirée, égale le record NBA) et une troisième overtime qui pointe le bout de son nez. La troisième prolongation sera tout aussi belle, Chicago prend les commandes pour ne plus les lâcher, et on se souvient encore de l’interception de Joakim Noah sur Pierce qui s’en va ensuite claquer le dunk plus la faute en contre-attaque, ou le contre de Rose sur Rondo. Les Bulls sauvent leur peau, nous aurons droit à un Game 7.
Boston 127 – 128 Chicago
Allen : 51 points (9/18 à trois points). Rondo : 19 passes.
Salmons : 35 points. Rose : 28 points. Miller : 23 points, 10 rebonds (en sortie de banc).
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Game 7 : Dernier mot, Boston.
Et de retour dans le Massachusetts, les Celtics, on le rappelle, champions en titre, tenus en échec par une équipe qui il y a un an demeurait une lottery team, vont se charger d’achever définitivement, non sans douleurs, ces jeunes Bulls si insolents de réussite et de talent. Derrick Rose et Ben Gordon portent encore une fois les espoirs de Chicago, et le meneur rookie rend même le Garden muet en contrant par derrière un dunk à deux mains de Brian Scalabrine qui semblait déjà tout fait. Mais Boston ne pliera pas cette fois, et avec des titulaires qui répondent tous présents, plus un Eddie House, qui réveille enfin un banc des Celtics resté négligeable trop longtemps, envoie les Bulls en vacances. Mais cette jeune équipe peut garder la tête haute, et aura fait douter les champions jusqu’au bout du match 7.
Chicago 99 – 109 Boston.
Gordon : 33 points. Allen : 23 points, House : 16 points.
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Que retenir de cette série ? Que ce souvenir dans quelques années de celle qui restera à coup sûr comme une, voire la meilleure série de playoffs de l’Histoire de la NBA. Aucune auparavant n’avait compté plus de deux matchs en prolongation, pour celle-ci on en répertorie 4, pour un total impressionnant de 8 overtimes disputés, et tous plus somptueux les uns que les autres. L’histoire retiendra aussi que dans les matchs chauds, ce sont bien les jeunes Bulls qui ont obtenu la victoire, et non pas les champions sortants.
On pourrait penser que ça n’aurait pu être écrit d’une meilleure façon. Que ce soit des matchups de rêve (duels de jeunes meneurs de génie qui n’ont pas froid aux yeux, l’affrontement entre les deux arrières scoreurs d’UCONN, celui entre deux ailiers au foot work remarquable, le duel entre les deux anciens ailiers fort de LSU, ou encore celui de deux pivots old school défensifs), ou dans le déroulement des matchs, tous aussi magnifiques et haletants. Entre buzzer beaters, gros shoots sous pression, dérapages émotionnels et suspense insoutenable, ce Chicago – Boston est un condensé de tout ce qui fait, et de tout ce qu’on aime en NBA.
Cette équipe si culottée des Bulls ne tiendra pas : Ben Gordon et Tyrus Thomas s’en iront à Charlotte, Salmons envoyé à Milwaukee, et même pas un an plus tard il ne reste que Rose et Noah pour tenter vainement de réaliser un nouvel exploit contre les Cavs de Lebron au premier tour des playoffs 2010. En vain. Les Celtics d’un Rondo stratosphérique sur cette série (presque un triple double de moyenne) se feront sortir par Orlando au tour suivant, dans un Game 7 chez eux … Avant de retrouver le chemin des Finales en 2010, pour tomber une nouvelle fois dans un Game 7 au sommet, au Staples Center de Los Angeles.
Mais ça, c’est une autre histoire …
Délivrance au Garden à la fin du Game 7.
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