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[Saines lectures] Jack McCallum – Dream Team

Trop pris que j’étais par la sortie de Jordan, la loi du plus fort (brillamment chroniqué par Rapha ici-même), je n’ai pas pris le temps de commenter la sortie d’un livre de l’un de mes auteurs favoris, Dream Team de Jack McCallum, paru le 8 juin dernier en version française aux éditions Talent Sport. Il était grand temps de réparer cette injustice et d’offrir à ce livre la chronique qu’il mérite.

 

Dream Team, donc. Comme son nom l’indique, l’ouvrage de McCallum retrace le parcours de l’équipe américaine de 1992, de sa genèse à son couronnement olympique. Et c’est dès ce postulat de départ qu’il est une réussite. Le livre ne se contente pas de relater le parcours d’une équipe dans une compétition, bien au contraire, il retrace jusqu’aux évènements ayant permis la création de cette équipe de légende que fut la Dream Team de 1992, avec un regard incroyablement humain et bienveillant à l’égard du moindre acteur des prémices du rêve olympique. Éminente plume du non moins mythique magazine Sports Illustrated, McCallum s’applique à ne laisser aucun détail au hasard, car justement, rien n’a été laissé au hasard dans le processus qui a engendré la Dream Team.

Le découpage du livre en lui-même est une merveille d’ingéniosité. McCallum présente les personnages de son histoire les uns après les autres dans des chapitres distincts, mais chaque chapitre vient compléter le précédent de manière à conserver un fil rouge qui permet d’éviter une simple revue d’effectif. Si lesdits portraits pourront sembler à première vue assez sommaires, ils prennent en réalité tout leur sens au fur et à mesure du livre. Si McCallum choisit d’occulter certaines facettes ou une certaine partie de l’historique des joueurs, c’est pour mieux mettre en avant les éléments de leur personnalité qui expliquent leur comportement ou leur rôle au sein du groupe. Chaque chapitre dédié à un joueur vient ainsi enrichir non pas la connaissance que l’on a dudit joueur, mais la compréhension de ce qu’il représente au sein du groupe et du récit. Ainsi, si l’on pourrait par exemple reprocher à l’auteur de dépeindre Charles Barkley de manière caricaturale, on comprend rapidement que ce choix s’impose de lui-même parce que c’est justement ce rôle de fanfaron que Barkley occupe au sein du groupe, et que les liens entre les personnages se tissent à travers les maillons de leur personnalité que choisit de privilégier McCallum.

De cette manière, la première partie du livre, qui prenait le risque de s’apparenter à un interminable prologue, se déroule en réalité de manière très fluide tout en abondant d’anecdotes qui nous permettent de mieux cibler les personnages et les liens qui les unissent, sans oublier de progresser dans le récit. L’habileté dont fait preuve McCallum dans cette entreprise est absolument fascinante, l’écueil s’avérant si difficile à éviter que beaucoup d’auteurs préfèrent intégrer de mini-portraits dans leurs chapitres plutôt que d’oser une telle construction, ici maîtrisée de bout en bout. Pourquoi est-ce que cela fonctionne si bien dans Dream Team ? Parce que Jack McCallum. La légèreté de son écriture, le fait de ne jamais surcharger le texte de lourdeurs superflues et surtout sa capacité à imprimer un rythme à la fois doux et rapide à son texte font en sorte qu’une construction des plus casse-gueules devient subitement une merveille d’habileté stylistique.

La deuxième partie est plus convenue dans sa construction, même si l’auteur s’autorise encore une fois l’incursion de plusieurs chapitres faisant office d’interludes — on retrouve d’ailleurs la même construction dans son livre Seven Seconds Or Less sur les Suns de Steve Nash. Le récit, cette fois-ci purement chronologique, se déroule de lui-même, et sans parvenir au niveau de créativité structurelle de la première partie, on a là deux cents pages d’une qualité d’écriture indéniable. McCallum a vécu avec la Dream Team de sa formation à son sacre, partageant le quotidien des joueurs avec un degré de proximité presque équivalent à celui d’un membre du staff — proximité dont il bénéficiera d’ailleurs pour Seven Seconds Or Less, pour lequel il prendra place sur le banc aux côtés de Mike D’Antoni et de ses assistants. Cette deuxième partie, plus narrative, occupe à juste titre les deux tiers du livre, puisqu’après tout, sans les entraînements, les tournées et les Jeux, il n’y aurait pas eu de Dream Team.

La construction globale du livre permet donc à McCallum de présenter ses personnages afin de recréer pour le lecteur la proximité que lui-même a eu avec l’équipe américaine, et ensuite de dérouler un récit où ce sentiment de proximité prend ainsi toute sa dimension. Pour lui, comprendre le parcours des États-Unis aux Jeux Olympiques de 1992, c’est avant tout comprendre ce qu’était cette équipe, et qui en étaient les acteurs. Son livre est pensé comme un récit avec des personnages et des intrigues et non comme un simple documentaire, c’est ce qui le rend si agréable à lire.

Il est bien évidemment nécessaire de mentionner le style, et surtout la fluidité de l’écriture de McCallum. Bien que la traduction se montre parfois trop sage pour réussir à retranscrire la finesse de son humour — un humour que l’on pourrait presque qualifier de britannique — on retrouve dans les lignes de cette version française de Dream Team tout le flegme de l’auteur, jamais avare d’une remarque à la légèreté piquante. McCallum est un auteur qui a un style et il est agréable de ressentir sa plume dans cette traduction, quand bien même cela ne se fait que par petites touches.

En somme, Dream Team est un livre extrêmement bien pensé et extrêmement bien écrit, riche en enseignements non pas quant au parcours de l’équipe américaine aux Jeux de 1992 (si vous voulez des feuilles de marque, Basketball Reference fera votre bonheur), mais bien à son historique entier et aux personnages hauts en couleurs qu’elle a abrité. Plus qu’une simple équipe de Basketball, la Dream Team était la réunion de Michael Jordan, Magic Johnson, Larry Bird, Charles Barkley et bien d’autres encore : les ayant côtoyés au quotidien, McCallum a compris que c’était cet aspect de l’équipe qu’il fallait mettre en avant et il l’a fait avec brio dans ce livre. Dream Team est un livre passionnant qui se lit tout seul, il offre donc une expérience de lecture des plus agréables que chacun saura sans nul doute apprécier à sa juste valeur. Si vous n’avez pas lu Dream Team, lisez-le. Si vous avez lu Dream Team et que vous avez aimé le style de McCallum, lisez Seven Seconds Or Less. Si vous ne parlez pas anglais et que vous n’avez plus rien à lire, le catalogue des livres Basket francophones ne cesse de s’étoffer, et c’est une excellente nouvelle.

 

Jack McCallum – Dream Team

Éditions Talent Sport – http://www.talentsport.fr/

396 pages.

Prix public : 22 euros.

 

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