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Inside the Film Room : Denver vs Indiana, la guerre du Pick & Roll (1/4)

Cher lecteur,

L’aventure qui t’es proposée ici n’a pas pour but de mettre en lumière un simple ajustement tactique, un système anecdotiquement ingénieux, ni même une tendance stratégique. Loin de tout cela.

L’expérience présentée ici est celle d’essayer de vivre de l’intérieur un match NBA dans sa globalité. En temps réel. De rentrer dans la peau des deux coachs et leurs assistants qui s’affrontent, se répondent, s’esquivent, se contrecarrent, se neutralisent, se font déjouer et cherchent à toujours avoir un temps d’avance pour l’emporter au final.

Entre philosophies de jeu et idéologies de départ, mises en application, inventivité, récolte d’informations, recherche de la parade, ajustements et réajustements, puis enfin choix décisif à prendre en fin de parcours, sous le prisme de l’entraîneur aux commandes un match de basket représente une histoire tout aussi ficelée et fascinante à découvrir que n’importe quelle fiction savamment narrée.

D’autant que pour ce match là, entre les Denver Nuggets et les Indiana Pacers le 19 janvier dernier, un domaine du jeu en particulier ressort très clairement du lot et unit ces deux équipes autour d’une même guerre passionnante à suivre : le Pick & Roll.

Plus particulièrement donc, c’est sur un seul côté du terrain que nous concentrerons notre attention : l’attaque d’Indiana contre la défense de Denver. En laissant de côté les phases de transition et quelques très rares possessions sur demi-terrain peu intéressantes pour nous décrypter l’essentiel : la partie d’échec de haute volée entre les deux coachs, d’un point de vue tactique et stratégique.

Si vous avez toujours rêvé de vous mettre dans la peau d’un coach NBA, vous êtes au bon endroit.

Embarquez donc vivre ce match de la manière dont Mike Malone et Nate McMillan l’ont fait.

Guillaume (@GuillaumeBInfos)

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Préambule

Un peu de contexte, d’abord.

Indiana pratique un style de jeu offensif très frontal et direct : des actions très simples en misant sur le talent des joueurs pour scorer sur ces actions basiques. Pas de système complexe, de mouvements à outrance, de grande variété tactique, d’ingéniosité ou d’utilisation atypique des profils à disposition. Mais au contraire, du jeu simple. A savoir : beaucoup de Pick & Roll, quelques jeux basiques en sortie d’écran, et parfois du jeu au poste.

Les Nuggets, quant à eux, pratiquent un style de défense assez agressif, souvent très intéressant à suivre de par le grand nombre d’implications qu’il entraîne. Jokic n’étant pas un excellent défenseur dans l’exercice, Denver pratique un « Hedge » sur les écrans (plus d’explications à suivre) dont la philosophie générale est la suivante : créer un 2vs1 sur le ballon pour inciter l’adversaire à attaquer ailleurs. En somme : inciter l’adversaire à ne pas attaquer Jokic.

Autant dire que sur le papier, l’affrontement semble des plus alléchant entre une attaque et une défense dont toutes les problématiques tournent autour du Pick & Roll.

Du côté d’Indiana, un seul blessé notable : Victor Oladipo, toujours pas revenu de sa grosse blessure à cette époque. Malcolm Brogdon fait donc office de ball-handler dominant et premier initiateur de l’attaque des Pacers.

A Denver, plusieurs absents de marque en revanche puisque trois titulaires ne participent pas à cette rencontre : Jamal Murray, Gary Harris et Paul Millsap. Si l’absence de Murray n’est pas si importante que cela pour le côté du terrain qui nous intéresse (la défense), celles des excellents défenseurs que sont Millsap et Harris le sont beaucoup plus. Notamment d’un point de vue défense collective, aides défensives et rotations en tout genre.

Torrey Craig est installé titulaire à la place de Harris et Jerami Grant démarre en remplacement de Millsap. Le différentiel entre les deux titulaires normaux et les deux actuels est donc quasi néant sur le plan de la défense (Craig et Grant étant eux-mêmes de très bons défenseurs), mais c’est en profondeur d’effectif que perd Denver : plutôt que de pouvoir utiliser ces 4-là sur 48 minutes, Malone va devoir incorporer à sa rotation d’autres joueurs moins solides qui n’aurait peut être pas vu le terrain sans ces blessures.

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Note : l’article est rédigé de telle manière à ce que le lecteur puisse lire le texte avant la vidéo (contextualisation, joueur, système joué), voir la vidéo et le déroulement de l’action, puis lire le texte après la vidéo (leçons à tirer, points clés, détail à retenir, etc) sans soucis de continuité ni répétition.

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Possession n°1

Première action du match, McMillan ouvre le bal non pas avec du Pick & Roll…mais avec un simple post-up pour Sabonis, via une très simple « Flex action » : Brogdon pose un écran sous le cercle pour Sabonis avant de lui même recevoir un écran pour remonter à 3pts.

Si McMillan commence le match de cette manière, ce n’est pas pour rien.

Denver et Indiana se sont affrontés une première fois, à Indianapolis, seulement quinze jours avant cette rencontre-ci. Un match dans lequel Paul Millsap avait participé.

Durant cette première confrontation, Mike Malone avait choisi les match-up défensifs suivant : Jokic sur Sabonis et Millsap sur Turner (le poste 5 sur le 4 adverse, et vice versa, donc). Or, si Grant et Millsap se ressemblent en bien des points, certaines nuances non négligeables existent tout de même : Grant est moins performant que Millsap sur la défense sans ballon/les aides et rotations défensives, mais également plus mobile pour défendre dans le périmètre. En partant du principe qu’Indiana joue beaucoup plus de P&R avec Sabonis qu’avec Turner, c’était envisageable d’avoir Grant sur Sabonis pour à la fois sa mobilité sur P&R et étant donné son moins grand impact en aides/rotations s’il n’est pas directement impliqué sur le P&R.

Par ailleurs, Grant est un bien moins bon défenseur au poste bas que Millsap (moins dur, costaud, ni expérimenté). Si Grant est sur Sabonis, le lituanien pourra en profiter.

En somme, l’idée de ce play-calling est assez simple pour McMillan : se rendre compte de quels sont les marquages défensifs des Nuggets, et si ceux ci sont favorables, de pouvoir les attaquer d’entrée de jeu.

En l’occurrence, le résultat est seulement à moitié positif pour Indiana.

Discerner les match-ups défensifs, c’est bon. Mais ils ne sont pas forcément comme souhaité : c’est bel et bien Jokic qui dès l’entame du match se retrouve à défendre sur Sabonis. Or, le serbe est un obstacle bien plus grand que Grant. Donc d’autant plus difficile à contourner et à battre. Sabonis est un finisseur très rugueux autour du panier qui adore attaquer le contact, mais les lois de la Physique sont contre lui dans cet affrontement : Jokic est trop imposant (lourd + grand)pour être dégagé d’un coup d’épaule, tandis que Sabonis n’a pas non plus les centimètres de longueur de bras nécessaires pour scorer par dessus ce dernier (pas à volonté en tout cas).

Qui plus est, Jokic démontre sur cette première action un aspect très sous-estimé de son profil : ses excellents appuis (relativement à sa corpulence), très vifs, qu’il bouge très rapidement pour très bien se positionner et gêner Sabonis.

Nate McMillan prend donc note : jouer sur Sabonis au poste bas ne sera pas une situation avantageuse tant que Jokic sera sur lui. Nul besoin d’insister en appelant des jeux pour le mettre dans ce genre de situations.

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Possession n°2

Cette fois les choses sérieuses commencent : place aux P&Rs. Et c’est là que la défense des Nuggets rentre en piste.

En particulier, Denver défend les P&R en pratiquant une couverture défensive appelée « Hedge ». Quelques explications avant d’aller plus loin, c’est véritablement le point central de tout ce match.

Le nom des différents types de défense possibles sur P&R décrit quasi tout le temps la tâche de l’intérieur défensif, et plus encore, à quelle hauteur se situe l’intérieur par rapport au niveau de l’écran. Ainsi, une défense en « Blitz » signifie que l’intérieur va bondir très haut et très vite sur le porteur de balle. Un « Drop » veut dire que l’intérieur reste très bas par rapport à l’écran. Sur « Switch » l’intérieur monte au même niveau que l’écran et prend la responsabilité du porteur de balle.

Pour Shakespear, « Hedge » signifie littéralement « haie ». L’idée est donc assez claire : barrer la route. Il existe ainsi donc plusieurs variations : le « Hard Hedge » où l’intérieur s’aventure au-delà du niveau de l’écran et carrément faire dévier le porteur de balle de sa trajectoire. Il y a le « Soft Hedge » qui est une version édulcorée du « Drop » : l’intérieur reste plus bas que l’écran, mais pas de beaucoup. Et puis le « classique » appelé seulement « Hedge » où l’intérieur monte au niveau de l’écran, pas plus haut ni plus bas, pour faire office de haie et contenir le porteur de balle. C’est de cette manière que défend Denver, entre le « Hedge » et le « Soft Hedge » de facto selon les circonstances.

Le but est donc de faire monter Jokic assez haut, créer une situation de 2vs1 sur le porteur de balle lorsque ce dernier ressort de l’écran, pour ainsi l’inciter à abandonner la balle. Pour compenser, des rotations loin du ballon s’organisent en second rideau défensif.

Plus d’explication en images :

La philosophie de ce schéma est la suivante : à la fois mettre de la pression sur le porteur de balle, et dans le même temps ajuster les positionnements de chacun en second rideau pour que l’infériorité numérique et le décalage soient absorbés pendant un petit temps. Quelques secondes, le temps que Jokic revienne en position.

C’est une philosophie défensive ni trop agressive, ni trop passive. A l’inverse du « Drop » où aucun espace n’est concédé (sauf celui souhaité), ou des « Blitz », « Trap » et autres couvertures très agressives qui cherchent à créer des turnovers. Ici, le but est simplement de neutraliser le P&R et de revenir en position à temps.

Résumons donc les différentes étapes de ce schéma de jeu :

– Jokic + Morris créent un 2vs1 sur le ballon pour forcer le porteur de balle à lâcher la gonfle

– le Weakside corner defender (Craig) occupe l’espace intérieur et gère le Roll Man.

– le Weakside Wing defender (Grant) gère les 2 shooteurs côté faible.

Première possession parfaitement exécutée par les troupes de Mike Malone. Indiana est tombé dans tous les « pièges » : impossible d’attaquer via Brogdon, Sabonis n’a pas le champ libre de punir, et les Pacers doivent se contenter d’un tir contesté.

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Possession n°3

Ici, Brogdon tente une première fois d’attaquer la défense en semi-transition : ce n’est pas totalement une situation de contre-attaque, mais ce n’est pas non plus une possession sur jeu posé où la défense est organisée.

Le but de Brogdon est sans doute de tester la résistance de Monte Morris, et calibrer à quel point ce dernier peut être « attaquable » seul en un contre un. Morris ayant un physique limité (taille + envergure + puissance) il est tout à fait possible que l’attaquer en ISO soit une action suffisamment viable et rentable pour Indiana.

Mais Brogdon est assez bien contenu et c’est TJ Warren qui s’apprête à jouer le P&R de l’action.

De manière très intéressante, dès la troisième possession du match (extrêmement tôt, donc), Indiana et Sabonis ont recourt à un ajustement efficace à ce « Hedge » défensif : l’écran glissé.

Le fait que Denver et Indiana se sont affrontés récemment explique sans doute cette rapidité de réaction. Et même sans ça, le scouting departement fait bien son job : Denver pratique cette défense depuis deux ans. Il n’y a pas d’effet de surprise, McMillan et ses assistants savent à quoi il vont avoir affaire avant le match et s’y préparent bien. D’où ce premier ajustement immédiat.

Un écran glissé revient en fait à ne pas poser d’écran du tout : Sabonis ne cherche pas du tout à créer un contact pour ralentir Craig, mais s’écarte très vite pour commencer à plonger au cercle. Cette manœuvre créée d’abord un effet de surprise, mais aussi, et surtout prend de vitesse la défense de Denver : Sabonis est libre plus tôt (donc option de passe plus rapide) et Jokic n’a pas eu le temps de bien monter sur Warren pour le gêner.

Une fois la balle reçue, Sabonis passe très vite vers le côté faible pour le punir, exactement comme dans la Possession n°2. La seule différence ici est que Grant ne revient pas aussi vite sur son shooteur que Craig l’action précédente, laissant donc à Indiana un excellent 3pts ouvert dans le corner.

Dès la Possession n°3, McMillan montre donc déjà qu’il est capable d’obtenir un très bon tir (le meilleur dans le basket) contre cette défense.

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Possession n°4

Nouvelle possession, nouveau P&R.

Cette fois, c’est Jeremy Lamb qui joue le rôle du porteur de balle.

L’information à relever ici est l’excellente défense de Jerami Grant : alors que les rotations Off-Ball se font très bien et dans les temps, Sabonis décide quand même d’essayer de forcer les choses et d’attaquer Grant pour aller jusqu’au cercle. En vain.

Contre certains défenseurs côté faible (Barton, Porter, Morris, Beasley, Juancho, etc ?) ni à la fois grands et costauds, ça peut valoir le coup pour Sabonis d’insister et d’aller au cercle malgré la rotation. Mais pas contre Grant, qui fait sa rotation et tient son territoire pour terminer l’action.

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Possession n°5

Pour cette cinquième possession du match, Indiana repart sur un simple « High P&R », soit un P&R entre Brogdon et Sabonis joué haut et plein centre du terrain.

Sur cette action apparaît une des problématiques les plus intéressantes de ces schémas.

Cette problématique est la suivante : en étant agressive sur le ballon pour essayer de le contenir, la défense se découvre forcément quelque part afin de créer de ce surnombre. Autrement dit, il existe un assez gros talon d’Achille : le shooteur dans le corner opposé se retrouve très grand ouvert. Autrement dit, la contrepartie de mettre de la pression sur le ballon (et autour) est donc de concéder volontairement le meilleur tir possible au basket (un corner 3 grand ouvert).

Pourquoi prendre un tel risque, alors ?

Deux raisons à cela. D’abord, c’est une manière de bricoler pour rendre Jokic viable. En pratiquant ces schémas, il n’est pas vraiment attaqué de manière frontale et/ou laissé tout seul pour faire l’action défensive.

L’autre raison est une idée encore plus importante : il n’existe que très peu de joueurs capables de réaliser la passe pour punir ce schéma. Et pour cause : il faut arriver à envoyer la gonfle avec précision et dans le bon timing jusque dans le lointain corner opposé. Quand on rajoute à ça le fait que, côté faible, il reste un défenseur qui anticipe que le danger peut venir jusqu’ici, la passe est encore plus prévisible et donc plus difficile à réaliser.

Des joueurs capables de réussir cette passe, encore et encore, sur l’intégralité d’un match sont peu nombreux. On parle là de passeurs du type Harden, LeBron ou Doncic.

On pouvait s’en douter, mais ce que Mike Malone nous dit ici, c’est qu’il ne craint pas Malcolm Brogdon de cette manière et pari sur le fait qu’il ne soit pas capable de les punir de cette manière.

L’autre enseignement à tirer de cette possession, c’est la nouvelle très belle action de Torrey Craig. Une fois que Jokic se retrouve de facto sur Brogdon, Craig reconnait le Switch, vient aider au cercle…puis repart lui même aux basques de Brogdon.

Sur cette séquence, Denver absorbe les espaces magnifiquement, neutralise les P&R et oblige Indiana à se contenter d’un long tir un peu par défaut sur ISO. Victoire Malone.

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Possession n°6

Pas vraiment de système ni de possession posée sur demi-terrain : Warren reçoit un « Drag Screen » de Sabonis pour attaquer la défense très tôt, en semi-transition.

De manière assez intéressante, le positionnement de Jokic est atypique : assez bas, plutôt bien haut au niveau de l’écran pour exécuter un « Hedge ».

Deux possibilités à cela : d’un côté, Jokic est peut-être tout simplement en mauvaise posture à cause de l’écran posé très vite. Il n’a peut-être pas eu le temps de voir venir et de bien se placer.

De l’autre, on ne peut que remarquer la défense de Torrey Craig qui se positionne de manière à orienter Warren vers la ligne de fond plutôt que de laisser repiquer à l’intérieur. Or, si on combine ça au positionnement de Jokic, plus bas, cela s’apparente assez facilement à une défense appelée « ICE » où le but est justement d’enfermer le porteur de balle à l’extérieur (en l’empêchant d’utiliser l’écran).

A la place de Nate McMillan, c’est assez flou de savoir si c’est un réel play-call de Malone ou si Jokic s’est positionné comme ça de facto, pris dans le feu de l’action. Autre possibilité : c’est un play-call et une consigne particulière à TJ Warren qui contrairement à Malcolm Brogdon, n’a pas le pull-up 3 pour punir cette défense là.

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Possession n°7

Ici, point de Pick & Roll, McMillan appelle un jeu sur un « Floppy set » pour TJ Warren. Un très grand classique du playbook des Pacers.

Le principe est assez simple : proposer à Warren, sous le cercle, une possibilité d’écran de chaque côté pour ressortir et se démarquer à mi-distance.

L’information clé à retenir ici, elle est pour Mike Malone : si Indiana réitère ce genre de système (et il y a fort à parier que ce soit le cas), il va falloir trouver une solution pour que Warren, ou McDermott, ou n’importe quel autre shooteur n’ait pas autant d’espace en sortie de l’écran.

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Possession n°8

De nouveau, de retour sur du P&R pour les Pacers.

Et encore une fois, c’est via Jeremy Lamb (comme pour la Possession n°4)

Le tir obtenu par Lamb n’est pas vraiment très bon, mais cette possession aura au moins eu la vertu de mettre en lumière une autre façon de faire plier cette défense : le re-screen. Technique d’ailleurs utilisé à foison par Terry Stotts et les Blazers sur les derniers playoffs.

L’idée est simple : Jokic n’est pas si mobile que ça, donc après avoir fait un premier Hedge il lui est compliqué de revenir dans les temps en bonne position, très haut, complètement de l’autre côté pour le re-screen qui part dans le sens inverse.

McMillan continue d’expérimenter différents trucs et astuces dans ce 1e QT, et de tester qu’est-ce qui marche ou non face à cette défense.

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Possession n°9

Une nouvelle fois, plutôt que de ralentir pour lancer un P&R ou un système, Brogdon attaque ici très tôt en semi transition pour essayer de tirer profit de son match-up avec le plus petit et léger Monte Morris.

Deux choses à noter ici.

D’abord, la tentative de Brogdon pour attaquer Morris très tôt dans la possession tombe une nouvelle fois à l’eau. Denver colmate bien les brèches.

Ensuite, l’excellent jeu sans ballon de TJ Warren est à noter. Marqué de près par Craig, il commence d’abord à s’écarter avant de soudainement plonger au cercle. Un move qui sur P&R est connu comme un « Gooden Roll » ou « Gooden cut » du nom de l’ancien joueur des Cavs, Bucks et Wizards (entre autres) Drew Gooden qui avait cette tendance à effectuer ce genre de mouvement « from P&Pop to P&Roll ».

Possession n°10

Possession suivante, toujours du P&R.

Sauf que cette fois, Indiana commence à mettre en place des ajustements pour mettre à mal la défense de Denver : l’écran posé très haut, et l’écran glissé. Le but de ces ajustements est simple : permettre d’attaquer l’espace et l’infériorité numérique plus rapidement.

La conséquence de cet écran glissé, notamment, c’est que Jokic n’est pas idéalement positionné pour contenir le ballon. Et Brogdon ne compte pas laisser filer l’occasion : il en profite pour continuer à attaquer sur du drive et pénétrer en plein milieu de la défense.

Élément notable : Craig réalise une pré-rotation pour couvrir la raquette, mais dès lors que Brogdon se retrouve plein centre du terrain, il commence à revenir vers Warren. La raison est simple : c’est difficile pour Brogdon d’envoyer une longue passe par-dessus tout le monde sur toute a largeur du terrain vers Warren, mais maintenant que Brogdon est dans la raquette, la passe est plus directe et rapide. Donc Craig fait machine arrière pour empêcher un tir ouvert sur une passe aussi simple.

Autre fait notable : Sabonis n’a pas plongé jusqu’au cercle, mais est resté dans le périmètre pour le P&Pop. Dans ce schéma-là, on pourrait imaginer que l’aide, si elle doit venir, serait de Jerami Grant se trouvant le plus proche du P&Pop, plutôt que Craig qui pour ce faire aurait du laisser Warren grand ouvert dans le corner.

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Possession n°11

Simple remise en jeu ici, et McMillan utilise un des systèmes (si ce n’est le système) le plus utilisé en NBA sur ce genre de situation.

Warren remet en jeu, reçoit un écran de Brogdon, qui lui même ensuite en reçoit un de Sabonis pour remonter à 3pts.

Le but est simple : essayer de perturber le timing et le positionnement de Jokic via diverses actions et écrans, avant de jouer le « vrai » P&R où il ne pourra donc pas être assez bien placé pour réaliser un Hedge propre.

L’enseignement intéressant ici, c’est la réticence de Jokic à switcher. Il peut le faire quand il y est forcé par la force des choses (comme pour la Possession n°5) mais préfèrera toujours ne pas le faire s’il a le choix

Or dans cette situation-là, c’est Morris qui a le bon réflexe : il switch et revient sur Sabonis en pensant que Jokic va rester sur Brogdon.

Là encore, une faille intéressante à exploiter pour McMillan.

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Possession n°12

Pas de système ici, mais une tentative d’attaque en transition/semi-transition.

Myles Turner, pour l’instant très peu utiliser avec la balle dans les mains commence peut être à s’impatienter.

Et puisque la grande carcasse de Jokic défend sur Sabonis, et que lui est gardé par le bien plus petit Jerami Grant, Turner décide de mettre le turbo sur une contre-attaque pour aller vite prendre une bonne position au poste bas et réclamer la gonfle.

Deux constat à faire ici.

Pour McMillan, c’est la confirmation qu’un post-up de Turner n’est pas une action si rentable que ça. Malgré le « mismatch » (ou plutôt, le différentiel de taille) Turner n’arrive pas à se dégager un bon tir et se contente d’un jump-shot très compliqué par dessus Grant.

De ce fait, Indiana ne pourra pas forcément se reposer sur des post-ups de Turner comme moyen de créer du jeu. Ni sur ceux de Sabonis, étant donné la difficulté de son match-up (expliqué sur la Possession n°1). En somme, le plan de jeu de McMillan sur ce match ne devrait pas comporter de possessions au poste bas.

Le second constat à faire ici est pour Malone, : la dangerosité de Sabonis sur les rebonds offensifs. Jokic est plutôt bon pour poser ses boxouts mais demeure assez irrégulier par moment. Surtout dans de grands espaces comme ici, plutôt que des situations statiques sous le panier.

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Possession n°13

Nouvelle possession, nouveau simple P&R entre Brogdon et Sabonis.

Un P&R inité sur une situation de semi-transition plutôt que sur jeu posé, là encore, histoire de ne pas laisser le temps à Jokic de bien se positionner.

De manière intéressante, l’écran glissé de Sabonis attire encore une fois Jokic plus qu’il ne voudrait : contrairement à la Possession n°10 où Jokic avait décidé de quand même rester haut pour contenir Brogdon le plus tôt possible, ici, il suit Sabonis et donc ne reste pas à bonne hauteur. Sans obstacle immédiat, Brogdon peut alors prendre de la vitesse et pénétrer jusqu’au cercle. L’ajustement fonctionne.

Sur cette action apparaît également une problématique pour Denver : la friabilité de Will Barton sur les rotations et aides défensives.

Barton exécute parfaitement son rôle en tant que weakside defender : il abandonne son shooteur pour aider sur le Roll Man. Mais même en bonne position à temps, il ne finit pas (ou ne réalise pas) l’action en posant le boxout.

Pour Indiana, si McMillan et Brogdon ont a choisir, ils savent d’après la petite dizaine de possessions jouées à peine qu’il est largement préférable d’attaquer un côté faible où se trouve Barton plutôt qu’un où est Torrey Craig ou Jerami Grant.

L’ajustement possible pour Mike Malone ? Limiter ces situations en ne faisant pas jouer Barton en Off-Ball…et donc en le mettant en premier défenseur au « point of attack » sur le ballon et le porteur de balle sur P&R. More on that later.

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Possession n°14

Premier changement de personnel pour Denver : Michael Porter Jr a remplacé Torrey Craig depuis quelques minutes déjà…et McMillan se décide à attaquer le rookie.

Porter étant au marquage de Warren, Indiana joue son « Floppy set » pour Warren : deux options de jeu en sortie d’écran.

Indiana s’en sort avec un panier réussi, mais le tir concédé par Denver est largement acceptable : un tir sur ISO, contesté, et à mi-distance n’es ni très facile à rentrer, ni très rentable.

Plus encore, Porter n’a pas tant que ça été malmené puisque Grant était là pour rattraper le coup. Contrairement à la Possession n°7 où il n’était pas monté haut sur l’écran, Grant ne se fait pas avoir ici : il comble la brèche et n’hésite pas à abandonner son joueur pour priver Warren d’espace en sortie de l’écran. Bel ajustement de l’ailier fort après l’échec sur le précédent « Floppy set ».

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Possession n°15

Nouveau changement de personnel, pour Indiana cette fois : Sabonis sort, remplacé par Justin Holiday. Un poste 4 pour un poste 3 qui de facto va jouer un small ball/light ball 4.

Mais du coup : le P&R joué en semi-transition ici se fait avec Myle Turner.

Autre variante : ce n’est pas Brogdon qui joue le P&R…mais Warren. Qui cherche encore à attaquer le rookie Porter.

Sauf que Turner…c’est pas Sabonis.

Le pivot est un joueur de Pick & Roll bien moins complet, et tout simplement bien moins bon que son coéquipier lituanien. Il est beaucoup moins dur et moins bon finisseur autour du cercle, n’a pas du tout l’agilité et la qualité balle en main pour être à l’aise sur les Short Roll en posant quelques dribbles. Et surtout : c’est un bien moins bon passeur, de manière générale, mais comme on voit ici sur les « Shrot Roll » notamment.

(Short Roll : plonger non pas au cercle, mais dans la mi-distance, dans une position où l’intérieur peut shooter, passer ou démarrer son dribble).

En l’occurrence, Turner ne lit pas bien la rotation de Morris ici. Il n’a pas la vision et la rapidité d’analyse pour s’empêcher de faire cette passe.

Pour Nate McMillan, le constat est dur, mais simple : Turner n’est pas une option intéressante au poste-bas pour créer du jeu, ni sur P&R face à cette défense-là en jouant les Short Rolls. En somme, son meilleur rôle, et peut être le seul dans lequel sa valeur est positive, est celui de spot-up shooteur qui apporte du spacing et punit à longue distance. Du jeu sans ballon, donc.

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Possession n°16

De nouveaux changements de personnel pour Denver : Plumlee et Dozier remplacent Jokic et Morris.

Et par la même occasion, c’est Grant qui prend Warren au marquage, et pour cause : Grant est un excellent défenseur sur l’homme, et Warren un bien meilleur attaquant que Holiday. Aussi, la meilleure optimisation défensive pour Denver est de remettre Grant sur Warren, et par conséquent Porter sur Holiday.

Ce qui ne veut pas dire que McMillan s’est enlevé de l’idée de cibler le rookie…

De nouveau : Floppy set pour Warren.

Jouer ce Floppy set a plusieurs vertus.

D’abord, sans Sabonis sur le terrain, jouer le P&R est bien moins intéressant pour les Pacers. Donc s’en remettre au très bon jeu sans ballon de Warren est une très bonne option, sans doute meilleur qu’un P&R avec Turner (comme vu sur la possession précédente).

Ensuite, notez comme Warren, au moment de choisir de quel côté partir, utilise l’écran de Justin Holiday plutôt que celui de Myles Turner (pourtant bien meilleur poseur d’écran). Le but ? Attaquer Porter.

Grant fait de son mieux pour rester attaché à Warren, mais ne peut pas complètement traverser l’écran à temps. Comme dans la Possession n°14, l’avant-dernière jouée, il faut que le défenseur de l’écran monte haut pour priver Warren d’espace.

…sauf que dans la Possession n°14 c’est Grant avait eu le réflexe de monter sur Warren. Mais ici, Porter n’a pas cette présence d’esprit là, ni même l’attention suffisante pour aider : il est entièrement focalisé sur son attaquant.

D’un manière ou d’une autre, McMillan tente de cibler le rookie, évidemment plus susceptible de faire ce genre d’erreurs de jeunesse. De l’autre côté, Turner aurait posé un meilleur écran, mais Plumlee aurait sans doute jailli sur Warren pour le priver d’espace.

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Possession n°17

De nouveaux changements importants pour Indiana : exit Turner et Brogdon, rentrée de TJ McConnell et Goga Bitadze.

L’ancien meneur des Sixers est un splendide joueur de P&R (sans doute très sous côté aux yeux du grand public) et le pivot rookie a démontré en Europe toutes sortes de qualités sur cet exercice également (de la finition au cercle, du P&Pop, des Short Rolls, etc). Autant dire que l’attaque d’Indiana qui cherche à affronter Denver sur P&R va passer par ces deux-là.

Le premier système à leur entrée impliqué d’ailleurs Goga : un « Ram P&R » où Goga reçoit un premier écran avant de poser lui même son P&R.

Plusieurs remarques à propos de cette possession.

D’abord, la défense de Mason Plumlee. Contrairement à Jokic qui pratique toujours à peu près la même couverture en « Hedge » classique sur P&R, Plumlee et sa plus grande mobilité sont souvent utilisés de manière plus variée par Mike Malone : parfois sur du Hard Hedge où Plumlee monte au-delà du niveau de l’écran, parfois sur du Drop qui devient en fait un « Late switch », parfois tout simplement en switch.

Sur cette action, Plumlee semble un peu en retard et donc un peu plus bas au moment de l’écran, mais il n’est pas impossible qu’il exécute volontairement un Drop + Late switch : rester bas comme pour un « Drop » puis rester sur le joueur en question et switcher tardivement.

À noter également : le type de couverture exécutée peut très bien être spécifique au porteur de balle adverse. En l’occurrence ici, Warren n’a pas une portée de tir en sortie de dribble qui s’étend jusqu’à la ligne à 3pts : Malone choisisse peut-être donc volontairement de ne pas monter pour priver du pull-up 3 puisque Warren n’est pas compétent sur ce tir-là. C’est une possibilité, d’autant que sur la Possession n°6 Jokic semblait également rester un peu plus bas face à Warren qu’à Brogdon.

Également à noter : l’attitude de Plumlee sur le switch (un point tactique fondamental dans ce match, more on that later).

Lorsque les intérieurs de Denver se retrouvent à switcher, la consigne est très claire : presser le plus haut possible. Ce faisant, l’intérieur ne sera pas pris de vitesse et pourra contester un pull-up 3, voire même empêcher l’adversaire de prendre un pull-up 3 par manque d’espace. De plus, en voyant un intérieur monter haut, l’extérieur adversaire aura tendance à vouloir l’attaquer sur drive, dans l’espace. C’est exactement ce que cherchent les Nuggets : inciter à driver jusqu’au cercle où les aides sont déjà prêtes à arriver. Le match contre Golden State l’an passé était une bonne illustration de ce principe.

Ici, Plumlee exécute parfaitement ce principe : en restant collé à Warren, il sait qu’il est vulnérable…mais Denver accepte d’être vulnérable de la sorte (à mi-distance). Et concède un tir ouvert, mais à mi-distance et en sortie de dribble. Assez difficile et peu rentable. Bonne opération pour Malone.

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Possession n°18

Et voilà le duo McConnell – Goga qui rentre en piste ensemble sur P&R.

En semi-transition, sans attendre que la défense ne mette en place, les deux compères attaquent.

Ici aussi, Plumlee ne Hedge pas mais reste bas en position de Drop. Mais c’est un peu plus clair ici que c’est un type de couverture spécifique à McConnell (et son incapacité à punir sur pull-up 3) : Dozier passe également sous l’écran, sans craindre de le laisser ouvert.

La clé de l’action ici : le move en pivot de McConnell qui solutionne véritablement le problème d’être étouffé par deux défenseurs en même temps. Avec ce move, et en un quart de seconde, il s’ouvre un angle de passe très facile. Et contrairement à ce qu’il ne peut paraître, réaliser ce move en pleine vitesse tout en restant sous contrôle n’est pas chose aisée que n’importe quel porteur de balle sait faire.

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Possession n°19

McMillan et Indiana insistent : Pick & Roll avec McConnell et Goga.

(Goga a d’ores et déjà joué plus de P&R en tant que poseur d’écran que Turner sur tout son temps passé sur le terrain)

Après avoir autorisé une pénétration plein centre du terrain (pire chose possible) l’action précédente, Plumlee change son fusil d’épaule cette fois : pas de Drop, il Hedge et monte haut sur McConnell pour le stopper le plus tôt possible avant qu’il ne puisse gagner en vitesse et pénétrer.

Par conséquent, le système de rotations Off-ball s’enclenche : Barton zone à l’intérieur et Juancho couvre les deux shooteurs côté faible.

La seule différence, et pas des moindres : contrairement à Brogdon, McConnell est capable de réaliser la passe vers le corner opposé, lui. Et donc punir ce schéma défensif qui se découvre beaucoup côté faible.

En utilisant pour la deuxième fois d’affilé son move en pivot pour se réorienter, McConnell arrive à aller chercher Holiday dans le corner avant que la défense n’ait eu le temps de revenir en place.

Première alerte non négligeable pour Mike Malone : que faire si Indiana possède un joueur capable de punir de schéma avec régularité ?

A noter que le weakside defender qu’Indiana a choisi d’attaquer (en positionnant son attaquant dans le corner) est Will Barton.

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Possession n°20

On ne change rien du côté des Pacers : nouvelle possession, nouveau P&R.

Cette fois, c’est Justin Holiday qui joue avec Goga. Peut être pour attaquer Porter (?) et en ciblant encore une fois Barton en tant que weakside defender.

S’illustrent ici les excellentes capacités de passeur (et de decision making) de Goga Bitadze, vantées avant la Draft. C’est mieux que ce que Turner peut faire, et donc c’est une meilleure option face à cette défense alors même que Turner est évidemment le meilleur joueur des deux intrinsèquement. La tactique se résume souvent à une question de profil de jeu plutôt que de niveau de jeu.

Très clairement, McMillan a établi son plan de guerre : contre cette défense en Hedge, si P&R il doit y avoir, ça passera nécessairement par Sabonis ou Goga plutôt que par Turner (et ça tombe bien, Turner apportera sur ces actions un meilleur spacing en tant que joueur sans ballon que si les rôles étaient inversés).

En cette fin de 1e QT, les Pacers semblent commencer à apprivoiser la défense des Nuggets, et se libèrent pas mal d’excellents tirs même s’ils ne les rentrent pas tout le temps.

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Possession n°21

Pour cette dernière possession du 1e QT, Indiana  se tourne sans surprise vers McConnell et Goga pour un P&R.

Sauf que le rookie commence la possession avec un faux pas : il veut poser l’écran dès l’instant où la balle est remise en jeu plutôt que d’attendre d’avoir 8 ou 9 secondes au chrono (et être sur de ne pas offrir assez de temps à Denver derrière).

Sans dire que Denver aurait été complètement surpris par un P&R des Pacers, cette précipitation leur permet de très bien se préparer à le défendre.

Même si McConnell parvient à briser le premier mur défensif (Plumlee) et pénétrer dans la raquette sans être contenu, Malik Beasley démontre ici toute sa valeur en défense sans ballon.

Très attentif, Beasley gère les deux shooteurs, ne s’engage que lorsque l’un des deux reçoit la passe, et conteste par derrière un tir difficile à mi-distance. Un vraiment bon tir à concéder pour Denver, et un pas si bon que ça pour Indiana.

A suivre

3 réflexions sur “Inside the Film Room : Denver vs Indiana, la guerre du Pick & Roll (1/4)

  • WarriorsBucksKid #A

    Très bon article, hâte de lire la suite !

  • Basket Infos

    merci pour Guillaume, et de ta fidélité !

  • reigreenen

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