Road to the Draft : Frank Jackson (vs Marist & Grand Canyon)
Frank Jackson est le 4e freshman. N’importe quelle autre année, il serait peut-être le troisième ou le second meilleur lycéen débarquant à Duke, et aurait joui d’une plus grande médiatisation. Mais ce n’est pas le cas, cette année il passe derrière Harry Giles, Jayson Tatum (top 5) et Marques Bolden (lottery), les trois grosses recrues de coach K. Plus encore, Grayson Allen est toujours là et est attendu pour remporter le Wooden Award du meilleur joueur universitaire. Saupoudrez tout cela avec du Luke Kennard et du Matt Jones en vétérans pour assurer les lignes arrières, Chase Jeter attendu au tournant et l’éternel Amile Jefferson, et vous comprendrez pourquoi vous n’avez pas beaucoup entendu parler de Frank Jackson, et pourquoi il n’était pas destiné à être grand-chose dans cette équipe.
Seulement voilà, les trois freshmen vedettes de coach K sont sur le flanc depuis le début de saison, et c’est un certain Frank Jackson qui s’affirme comme un des meilleurs si ce n’est le meilleur joueur de Duke sur ce début de saison. En sortant du banc, il est le deuxième meilleur scoreur de l’équipe (18 et 21 points) en un peu plus de 25 minutes, avec un gros abattage défensif.
Jackson est un meneur de jeu, de bonne taille (6’4/1m93, plus que Curry, Irving, Lillard ou Paul) pour le poste et avec une assez bonne envergure (6’6.75/2m, presque 6’7/2m01). C’est aussi un remarquable athlète, assez explosif sur ses appuis et dans ses démarrages, qui possède surtout des cuisses très épaisses, un torse très solide et des épaules très larges qui portent déjà une belle carrure malgré son très jeune âge.
La première qualité offensive qu’a démontré Jackson sur ces deux matchs contre les modestes formations de Marist et Grand Canyon, c’est son shoot. Et plus particulièrement son tir extérieur. Il possède une très belle mécanique de tir et s’élève bien, haut et en équilibre, pour tirer.
Contre Marist, il manqua tout de même trois tirs lointains ouverts (en réception de passe) pour un seul rentré. Contre Grand Canyon c’est mieux, puisqu’il en inscrivit quatre, établissant à chaque fois très bien ses appuis et conservant un excellent équilibre tout le long du tir. Jackson est également capable de dégainer en sortie de dribble, et rentra dans chaque match un jump-shot après un Pick&Roll. Il n’a pas eu ni n’aura énormément l’occasion de démontrer cette facette de son jeu (l’attaque de Duke n’est pas destinée à générer des isolations et des tirs difficiles en sortie de dribble) mais il est déjà capable de le faire sans que cela perturbe sa mécanique de tir.
Sa sélection de tir est un tout petit peu plus contestable, comme on l’avait vu au lycée. Jackson a cette tendance à dégainer très tôt dans la possession pour des tirs compliqués en sortie de dribble, plutôt que de faire tourner l’attaque. Que ce soit un long tir avec 24s restantes sur l’horloge de la possession contre Marist, un trois-points en réception de passe avec 20s à jouer, ou un trois-points contesté en sortie de dribble avec 15s à jouer encore contre Grand Canyon.
Jackson s’est aussi montré intéressant sur du jeu en pénétration : capable de driver sur sa droite et sur sa gauche, en utilisant un écran ou sans. Contre Marist il dépose son défenseur avant de finir avec un superbe toucher de balle main gauche, puis en seconde mi-temps pénètre en va franchement au contact du protecteur du cercle pour obtenir deux lancers francs, avant d’attaquer sur Pick&Roll un peu après avec un brusque changement de direction et une finition main droite cette fois. Plus tard encore, il « fend » un autre Pick&Roll pour obtenir deux autres lancers francs, et en fin de match s’en va conclure au cercle après un autre Pick&Roll. Contre Grand Canyon, il a du mal à vraiment mettre dans le vent son défenseur mais va chercher le contact au cercle. En seconde mi-temps, en pure isolation, il place un excellent crossover + 1er pas qui laisse sur place son vis-à-vis avant d’aller conclure.
Même s’il ne recule absolument pas devant le contact, et rentre dans le lard du protecteur du cercle autant qu’il le faut pour se rendre sur la ligne de réparation, c’est à noter qu’il fut incapable de terminer malgré les contacts dans ces deux matchs. Simple hasard (deux matchs sont un échantillon infime d’évaluation) ou non, il possède en tout cas de grosses cuisses et un coffre très épais qui peuvent laisser penser qu’il y arrivera sans problème à l’avenir.
Il y eu toutefois du déchet dans ses pénétrations. Sur un drive, il arrive en bout de course et n’est pas apparu si explosif que cela une fois dans le trafic pour conclure (pas vertical en tout cas), puis a manqué deux floaters un petit peu plus tard dans le match.
Mais une des raisons pour lesquelles coach K s’est autant appuyé sur Frank Jackson, ce sont ses qualités de meneur. Il n’a pas eu énormément l’occasion de les montrer (la balle tourne beaucoup, puisqu’il y a beaucoup de monde à satisfaire) mais autour de lui évoluent beaucoup de combo guard (Grayson Allen, Luke Kennard) pas franchement brillants dans la distribution. Jackson n’a pas prouvé être encore un vrai meneur, mais sur ces deux matchs il a ressemblé à un peu plus qu’un simple arrière.
C’est notamment lui qui remonte la balle assez souvent et lance le système. Il est très altruiste, et a effectué quelques très belles extra pass à destination de coéquipiers encore plus ouverts que lui. Sur Pick&Roll, il effectua un bon changement de rythme avant de servir son coéquipier. Sur jeu placé, il délivra un bon ballon dans le bon timing à un shooteur en sortie d’écran. En transition, il garda la tête haute en démontra sa belle vision de jeu en transmettant de suite la balle devant pour un trois-points ouvert de Grayson Allen. Par deux fois, plus tard, il attaqua un closeout balle en main avant de ressortir très proprement sur un shooteur ouvert.
L’autre raison, la principale sans doute, pour laquelle coach K l’a autant fait jouer, c’est sa défense. Jackson est très vif sur ses appuis et possède une excellente vitesse latérale. Pendant deux matchs, il avait pour mission de défendre sur tout le terrain le porteur de balle afin de l’empêcher de remonter la gonfle proprement, et ne s’est jamais fait prendre à revers. De même, sur du jeu en demi terrain, il est très bien parvenu à contenir les pénétrations avec sa vitesse latérale et sa charpente bien solide qui offrait une bonne résistance aux assauts adverses. Ni Kennard ni Allen ne sont capables de tenir ainsi leur vis-à-vis dans le périmètre, et c’est du coup fort à parier que Jackson joue un nombre important de minutes, surtout dans les gros matchs et dans les tournois de fin d’année (ACC tournament et NCAA tournament).
Sa défense sur l’homme n’est cependant pas parfaite. Bien que très discipliné et volontaire pour bien bouger ses pieds, rester en excellente posture défensive coulisser latéralement, Jackson l’est beaucoup moins lorsqu’il s’agit de ne pas prendre de faute. Il s’est fait siffler un nombre de fois conséquent pour avoir essayé de piquer le ballon quand il ne fallait pas, ou pour avoir été un peu trop agressif dans son engagement. Egalement, son envergure de bras est un peu courte, et bien qu’il soit appliqué à tout le temps contester les tirs, il lui est arrivé trois ou quatre fois en deux matchs de se faire shooter par-dessus la tête.
Impossible de juger sa défense sur Pick&Roll, étant donné que Duke switchait sur chacun des écrans qu’on lui présentait. En revanche, c’est à noter que Jackson s’est toujours battu corps et âme sur ce genre de switch, mettant son corps en opposition du mieux qu’il pouvait pour bloquer efficacement son vis-à-vis (un grand intérieur donc) du rebond offensif.
Egalement, il a fait preuve d’une excellente anticipation pour détourner et voler des ballons sur lignes de passes (finissant même la première rencontre avec 4 interceptions). Il est discipliné, en bonne position loin de l’action, et cela suffit amplement à dévier quelques ballons de leurs trajectoires.
L’un dans l’autre, Frank Jackson possède de très belles fondations pour bâtir un joueur très intéressant par-dessus. S’il parvient à confirmer toute la saison son rôle de défenseur, et s’il parvient à conserver son volume de jeu au scoring et ses bonnes actions à la passe, nul doute qu’il devrait finir (cette année ou l’an prochain d’ailleurs) au premier tour de la draft. Sinon, ce sera le second tour, et avec ça beaucoup moins d’assurances. La classe de meneur de cette année est surchargée, et il n’a pas (encore ?) montré l’étoffe d’un titulaire NBA, mais son très jeune âge, sa maturité physique, sa bonne taille pour le poste 1 chez les pros, et ses bonnes performances permettent d’entretenir de bons espoirs de le voir intégrer un jour un roster NBA.
Guillaume (@GuillaumeBInfos)
N.B. : Contre Kansas, Jackson a eu un peu plus de mal, de manière très logique, mais ne s’est pas privé de rester sur le terrain la majorité du temps grâce à sa défense, ni de planter le trois-points d’égalisation à quelques secondes de la fin du match. Contre Penn State enfin (plutôt réputé pour son programme de Football que de basketball), Jackson a retrouvé la forme, jouant encore une fois 35 minutes sur 40 possibles (et sortant du banc) avec 17 points au compteur.
Voir aussi
Road to the Draft : Miles Bridges
Road to the Draft : Lonzo Ball