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Inside the Film Room : Denver vs Indiana, la guerre du Pick & Roll (4/4)

Le 19 Janvier dernier, les Indiana Pacers étaient en visite dans le Colorado pour confronter leur attaques aux innombrables P&R face à la défense agressive des Denver Nuggets sur cet exercice. Voici le déroulement du 2e QT, n’hésitez pas à revenir en arrière sur les 1e QT, 2e QT et 3e QT pour comprendre le début de l’histoire et les problématiques en jeu. Bonne lecture.

Guillaume (@GuillaumeBInfos)

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Acte 1 : Denver vs Indiana, le 1e QT

Acte 2 : Denver vs Indiana, le 2e QT

Acte 3 : Denver vs Indiana, le 3e QT

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Note : l’article est rédigé de telle manière à ce que le lecteur puisse lire le texte avant la vidéo (contextualisation, joueur, système joué), voir la vidéo et le déroulement de l’action, puis lire le texte après la vidéo (leçons à tirer, points clés, détail à retenir, etc) sans soucis de continuité ni répétition.

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Possession n°62

Avant toute chose, il convient de noter que McMillan a géré ses rotations assez différemment de la 1e MT.

Sabonis était sorti en fin de 1e QT pour ensuite revenir dès le début du 2e QT, permettant ainsi à Indiana d’avoir tout le temps sur le terrain soit Brogdon soit Sabonis. Mais ici, le coach des Pacers a maintenu ses deux meilleurs joueurs sur le terrain tout le 3e QT : aucun n’est donc sur le terrain pour ce début de 4e QT, il va falloir créer du jeu différemment.

Indiana présente donc une ligne arrière composée de TJ McConnell et Aaron Holiday, Doug McDermott et Justin Holiday sur les ailes, et Goga Bitadze en pivot (toujours pas de Myles Turner). Dans cette configuration, les deux options viables de création sont soit McConnell et Goga sur P&R, soit du jeu en sortie d’écran de McDermott.

C’est vers cette deuxième option que se tourne McMillan ici, en ouvrant le 4e QT sur un « Stagger Set ».

C’est la troisième fois que les Pacers jouent ce système dans ce match (Possession n°28 et Possession n°60)…et ils en profitent d’ailleurs pour apporter une petite variante et surprendre la défense : une Twirl Option.

Deux remarques ici.

D’abord, l’erreur de Porter qui peut être qualifiée d’erreur de jeunesse (il n’existe aucun schéma ou philosophie de jeu où l’on autorise un lay-up ouvert pour ressortir contester un 3pts). Le fait de jouer cette Twirl Option est d’ailleurs même possiblement une manière volontaire de cibler le jeune rookie, prompt à ce genre d’erreurs défensives.

Ensuite, et encore une fois, la superbe passe de TJ McConnell, donc la capacité à provoquer les failles dans la défense et/ou à les trouver sur son passing continue de faire beaucoup de mal à cette défense.

À noter enfin : l’attitude de PJ Dozier toujours la même en défense de McConnell. Le meneur des Nuggets le traite comme un non-shooteur depuis le début en l’abandonnant pour aider ailleurs, ou comme ici, en restant assez bas et loin de lui pour empêcher une pénétration. Mais ce positionnement est à double tranchant : ici, il permet à McConnell de ne pas être dérangé du tout et de pouvoir passer en toute liberté sans avoir Dozier sur lui pour le presser et le gêner.

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Possession n°63

Après du jeu en sortie d’écran pour McDermott, voici donc du P&R pour McConnell.

Plus précisément, un « Double Drag », fréquemment utilisé sur cette 2e MT.

Point important ici : le manque d’ajustement de Plumlee et Dozier sur le 2e P&R. Par manque de lucidité, ou par vrai choix, les deux défenseurs de Denver traitent ce 2e P&R de la même manière que le 1er…sans prendre en compte le scouting report : McConnell n’est pas compétent à 3pts, mais il est tout à fait apte à punir une défense trop passive sur un pull-up 2.

L’autre point important à noter, au-delà de la superbe passe de McConnell : le cut de Justin Holiday. L’ailier remarque que le jeune Porter a la tête tournée et est en train de regarder le P&R, et profite donc de cette demi-seconde d’inattention pour couper dans son dos.

Plus que le simple fait de punir une petite erreur, c’est à noter que pour battre une défense qui prend beaucoup de risques, se découvre et se voit obliger de faire de nombreuses rotations pour gérer les espaces, couper au cercle peut effectivement s’avérer une excellente manière de perturber cette gestion méticuleuse du terrain.

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Possession n°64

Pour changer un peu, c’est Aaron Holiday qui joue le rôle du porteur de balle sur P&R pendant que McConnell reste loin du ballon.

Pour rappel, la seule autre fois du match ou l’ancien d’UCLA a eu à gérer un P&R (Possession n°25), l’action s’était soldée en turnover, Holiday tombant en plein dans le piège du Hedge tendu par Denver.

La première chose à noter ici : pourquoi Malik Beasley demande-t-il immédiatement à Porter de switcher sur Aaron Holiday quand son frère Justin Holiday lui transmet la balle avant le P&R ? Ce n’est ni une habitude de Denver, ni même une façon de résoudre un mismatch : Beasley sur Aaron et Porter sur Justin sont déjà la configuration souhaitée. Peut-être pour éviter une confusion, ou un décalage sur la transmission du ballon ? Ou pour que Beasley reste en tant que weakside defender (plus compétent que Porter dans ce rôle ?) ?

…a moins que Denver ne sait déjà par avance qu’ils vont switcher le P&R, ce qui permettrait donc d’avoir le plus grand Porter sur Goga plutôt que le tout petit Beasley ?

C’est en tout cas ce qui se passe : Plumlee reste très bas plutôt que de monter pour un Hedge, et Porter se retrouve de facto à couvrir Goga, mais n’essaie pas vraiment de le bloquer du rebond offensif.

Les problèmes de rebond offensif de la 1e MT refont surface. Denver semblait avoir gagné la possession en forçant un mauvais tir, mais ne valide pas l’action en concédant quand même le panier sur seconde chance.

De rage, Malone prend même un temps mort.

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Possession n°65

Sur ce retour de temps mort, Sabonis est déjà de nouveau sur le terrain à la place de Goga.

Play-calling intelligent de McMillan qui revient sur son « Double Drag » pour McConnell utilisé il y a à peine 2 possessions…mais utilise cette fois une option différente pour surprendre une défense de Denver qui pensait savoir à quoi s’attendre.

Le Double Drag n’est ici qu’un appât avant que Sabonis ne pose un « Comeback screen » pour McDermott.

L’intelligence de ce play-calling ne réside pas seulement dans le fait de surprendre Denver avec une variante : c’est aussi un moyen d’exploiter les couvertures très passives des Nuggets sur McConnell. En effet, Plumlee reste encore une fois très en retrait sans craindre que McConnell dégaine le pull-up 3…et donc se trouve très loin de McDermott. L’arroseur arrosé, en somme. Play-calling éclairé de McMillan.

Une autre bonne décision du staff des Pacers : positionner Justin Holiday dans le corner côté faible plutôt que Aaron Holiday. Le grand frère n’est pas forcément un meilleur shooteur, mais il est surtout défendu par Porter, qui devient donc celui qui doit aider sur l’action. Encore une fois, Indiana continue de cibler le rookie.

L’autre point clé de l’action : la lucidité, et surtout la rapidité du passing de McDermott (comme Possession n°60, entre autres). Et la nouvelle très belle passe sur « Short Roll » de Sabonis.

Une nouvelle fois, le jeu sans ballon de McDermott fait bien des dégâts.

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Possession n°66

Système inédit de McMillan tiré des « Delay series », qui aboutit sur une feinte de DHO entre Sabonis et McDermott, puis un vrai DHO avec Justin Holiday sur l’aile opposée.

Plusieurs remarques. Sans la feinte de DHO avec McDermott (et parce que c’est McDermott et sa grande dangerosité au tir), Plumlee est sans doute en bien meilleure position pour monter sur l’écran et prive peut-être Holiday de passer aussi bien vers Sabonis.

La rotation de Beasley en second rideau pour stopper Sabonis malgré le différentiel de taille est, elle, à la fois impressionnante et presque suffisante pour endiguer l’action. Il faut une splendide lecture de jeu de Sabonis pour passer outre et trouver quand même l’ouverture au sein d’une défense qui pensait avoir tout bien fait.

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Possession n°67

Nouveau simple High P&R pour Indiana, et une fois n’est pas coutume, ce n’est pas McConnell aux commandes, mais bien Aaron Holiday.

Paradoxalement ici, si Denver persiste et signe pour jouer le Drop face à McConnell et Holiday, c’est bel et bien Myles Turner qui aurait été plus utile que Sabonis pour punir ces Drop via du P&Pop. Le pivot n’a pas les capacités de passing et de decision making de son coéquipier, mais est évidemment un bien meilleur shooteur extérieur.

Ici, Denver semble assez satisfait de laisser shooter Sabonis. Sans doute à raison.

Deux options pour McMillan, en conséquence : faire rentrer Turner pour punir ces Drop, ou bien ne plus se contenter de ces simples High P&R quand la défense ne craint pas assez les porteurs de balle pour mettre les pull-up 3 (et donc, Drop).

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Possession n°68

Et c’est plutôt vers la seconde option que tourne McMillan : retour à du jeu varié, en attendant l’entrée de Brogdon pour recommencer les simples High P&R.

Ici, c’est un simple Pin Down de Sabonis pour McDermott comme on a pu le voir régulièrement en 1e MT (Possession n°23 par exemple)

Ici, notez comme une fois de plus Indiana envoi Justin Holiday dans le corner, pour que Michael Porter soit encore le défenseur côté faible chargé d’aider sur l’action.

Du reste, les observations notables ne changent pas vraiment : la synergie offensive créée par McDermott sur un simple écran Off-Ball, sa rapidité de décision pour lâcher la balle quand l’opportunité n’est pas là, et la superbe passe de McConnell.

Notez d’ailleurs, comme Possession n°62, à quel point Dozier reste à distance de McConnell (ne craignant pas ce dernier à 3pts), laissant donc au meneur des Pacers tout le temps et l’espace de lire le jeu et de passer très librement.

Dans tous les cas, le trio McConnell McDermott Sabonis continue de faire très mal à cette défense. McMillan aurait tort de se priver de continuer.

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Possession n°69

Pas vraiment une possession sur demi-terrain à décortiquer, mais une vraie action capitale de ce match qu’il aurait été difficile de ne pas citer.

Alors qu’Indiana continue de remonter petit à petit au score, ce missile de McDermott (décidément très en forme) sur contre-attaquer permet aux Pacers de recoller au score et passer de -5pts à seulement -2 (un tout petit panier de différence donc).

À noter, cela dit, que la mauvaise défense en transition est sans doute en partie du au retour tardif de Juancho, mais surtout Plumlee, qui ne revient en défense qu’après avoir essayé d’aller au rebond offensif.

Tactiquement, c’est souvent la contrepartie associée au fait d’attaquer le rebond offensif. Même si Denver, qui joue souvent les secondes chances, arrive généralement quand même à bien défendre les transitions, ici, les Nuggets le paient cher.

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Possession n°70

Nouvelle possession sur du jeu placé, et retour du « Empty P&R » : Sabonis pose un écran pour McConnell sur l’aile, avec aucun attaquant (ni défenseur) dans le corner.

McConnell et Sabonis ont donc toute la moitié de terrain pour eux.

Trois faits notables sur cette action. Premièrement, la réticence de Denver à switcher, alors même que Plumlee (contrairement à Jokic) pourrait tout à fait survivre sur McConnell. Malheureusement pour les Nuggets, Beasley ne peut pas complètement bien revenir à temps et stopper McConnell comme il aurait pu le faire dans des conditions idéales.

Deuxièmement, l’excellent mouvement de McDermott. Comme précisé durant la Possession n°63, un cut est une arme on ne peut plus intéressante contre une défense qui se repose beaucoup sur son côté faible et la précision de ses défenseurs Off-Ball. Juancho, doit pourrait être appelé à aider à l’intérieur, regarde forcément vers le ballon et quitte du regard un quart de seconde McDermott.

Troisièmement, l’excellent passing de McConnell. En mouvement, sous contrôle. L’ancienne trouvaille de Sam Hinkie n’en finit plus de produire du jeu et d’excellents tirs pour son équipe.

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Possession n°71

On ne change pas une équipe qui gagne : McMillan fait de nouveau appel à son trio magique McConnell McDermott Sabonis ici.

Indiana joue un « Ram Double » déjà utilisé sur la Possession n°58 : Sabonis pose un écran pour McDermott avant que les deux ne viennent rapidement poser deux écrans à McConnell pour un double P&R.

De la même manière que sur la possession précédente, Denver se refuse à switcher…quitte à ce que Beasley tente de revenir sur McConnell malgré son retard. Si cela fonctionne ici, c’est un choix assez risqué de la part de Malone.

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Possession n°72

Avec 6 minutes à jouer, le score qui s’est a présent très resserré et des Pacers très bien lancé, Mike Malone agit : retour de titulaire.

De manière assez atypique même, puisque ce sont les 5 titulaires des Nuggets qui rentrent en même temps (les rotations et transitions entre 2nd unit et escouade de titulaire se fond généralement de manière plus souple et évolutive). Exit Dozier, Beasley, Juancho, Porter et Plumlee, retour de Morris, Barton, Craig, Grant et Jokic.

De son côté, McMillan persiste et signe (« If it’s not broken, don’t fix it) : Brogdon refait son apparition à la place de Aaron Holiday, mais le technicien d’Indiana appelle de nouveau un jeu pour son trio McConnell McDermott Sabonis.

Cette fois-ci, nouveau système appelé « Veer », un très grand classique du playbook des Pacers (et de nombreux autres playbooks NBA possédant des shooteurs de la trempe de McDermott).

L’idée est simple : Sabonis remonte comme pour jouer un simple P&R avec McConnell, puis bifurque très brusquement pour poser un Pin Down (écran Off-Ball) à McDermott qui remonte depuis le corner à toute vitesse.

Un point sur les marquages défensifs, d’abord, puisque contrairement à Denver, Indiana n’a pas du tout son cinq titulaire sur le terrain. Comme depuis le début de la seconde mi-temps, Barton reste sur Brogdon, et c’est Craig qui se charge de McDermott, tandis que Grant s’occupe de Justin Holiday (Jokic/Sabonis et Morris/McConnell étant un peu plus évident).

Autre point important, Morris réitère les mêmes principes de jeu que PJ Dozier sur McConnell : ne pas hésiter à abandonner pour aider. Même si Indiana passe à un cheveu de le lui faire payer (la passe « throwback » de McDermott est un chouia trop dans le dos de McConnell).

Évidemment, la clé de l’action, au-delà de l’action du « Blind Pig », demeure la rapidité avec laquelle les trois joueurs des Pacers parviennent à se décider ensemble de le jouer.

À noter également, au passage, l’extrêmement mauvaise protection de cercle de Jokic. Voilà pourquoi Denver est aussi peu enclin à pratiquer des schémas de jeu en « Drop » comme les Bucks avec Brook Lopez ou les Blazers avec Nurkic : le Serbe se fait complètement manger par McDermott, pourtant pas le finisseur le plus agressif, explosif ni aérien de NBA.

Or, pratiquer du « Drop », c’est positionner Jokic dans ce genre de situation possession après possession : à reculons, à devoir contenir la pénétration et protéger le cercle. Là où Lopez ou Nurkic arrivent à « faire parler leur taille », ce n’est pas le cas de Jokic. Ergo des schémas en Hedge très agressifs et très risqués, avec des tas de brèches à combler…parce que du Drop classique serait encore moins rentable et encore plus dangereux pour les Nuggets.

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Possession n°73

Changement de personnel à Indiana : Warren est de retour sur le terrain, à la place de Justin Holiday (toujours pas de Myles Turner, notez bien, depuis +7 min à jouer dans le 3e QT et il reste 5’30 à jouer dans le 4e QT).

Grant se charge de le marquer, poste pour poste (était déjà sur Holiday), mais Denver switch deux autres de ses marquages défensifs : Craig se positionne sur Brogdon pendant que Barton s’occupe de McDermott.

Malone anticipe-t-il un P&R avec Brogdon, puisque le match est dans le money time, et désire simplement mettre son meilleur défenseur sur le coup…ou au contraire estime-t-il que Craig est fautif d’avoir laissé filé McDermott sur l’action précédente et préfère essayer Barton (assez mobile) sur le shooteur ? Ou les deux ?

Dans tous les cas, Nate McMillan ne change rien : de nouveau, Indiana exécute un « Ram Double » avec McConnell en porteur de balle et Brogdon loin du ballon.

Avec une variation tout de même : après le double écran, Sabonis pose un « Comeback screen » pour McDermott.

C’est la seconde fois du match que les Pacers ont recourt à ce Comeback Screen (Possession n°65).

La fois précédente, c’était pour battre un Drop (punir un intérieur positionné bas) que McMillan l’avait joué. Mais ici Jokic est plutôt susceptible de Hedge, de monter haut sur l’écran…mais ce n’est finalement pas le cas : comme sur les « Stagger » (Possession n°60 ou Possession n°28) Jokic reste bas et c’est Morris, le défenseur de McConnell, qui aide sur McDermott.

Même si cette manœuvre n’est pas sans risque (McDermott peut vite relancer sur McConnell pour punir le positionnement lointain de Morris, comme Possession n°60) elle a au moins pour vertu de ne pas laisser le défenseur côté faible, Grant, tout seul à devoir gérer en 1vs2 à la fois le Roll Man et le shooteur dans le corner. C’est de cette manière que Porter et Denver s’étaient fait punir, Possession n°65.

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Possession n°74

Cette fois, ça y est : retour aux affaires pour Malcolm Brogdon, qui se voit offrir un High P&R avec son partenaire favori, Sabonis.

McConnell et McDermott sont toujours sur le terrain, d’ailleurs, tandis que les titulaires Turner et Lamb restent encore sur le banc.

Première question : pourquoi Denver demande-t-il à Barton et Craig de changer leur marquage défensif ? Depuis deux possessions, Craig avait muté sur Brogdon pendant que Barton prenait McDermott, mais les deux reéchangent presque immédiatement. Est un simple moyen de protéger Torrey Craig (4e faute personnelle) en sachant que les Nuggets auront besoin de lui sur les dernières minutes ? Ou une réelle envie de revoir Barton sur Brogdon ? Ou bien encore l’envie d’avoir Craig en défenseur Off-Ball plutôt qu’au point d’attaque ?

Assez difficile de le dire avec certitude pour quiconque n’est pas Malone ni un de ses assistants.

Quelle qu’en soit la raison…le play-calling en question n’est pas loin d’être payant. Il ne l’est pas vraiment puisque Barton (moins bon défenseur que Craig sur le ballon) se fait prendre dans l’écran et concède un tir grand ouvert à Brogdon. Mais dans le même temps, le fait d’avoir positionné Craig en Off-Ball permet d’avoir un excellent défenseur Off-Ball en bonne position pour poser le boxout.

Il se trouve « juste » qu’il se fait dégager plus ou moins illégalement par une poussette de Sabonis. Mais fondamentalement, l’action est bonne bien que le résultat échappe à Malone.

Un peu plus inquiétant peut-être : Jokic. Sur cette action, le Serbe est coincé dans un No Man’s Land : il n’est ni là où il devrait être sur le P&R, assez haut pour contester le tir de Brogdon ou carrément l’empêcher, ni assez bas pour suivre Sabonis et poser un boxout et sécuriser le rebond. Il est dans un entre-deux très peu productif.

La fatigue commence clairement à se faire ressentir.

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Possession n°75

Toujours pas de changement pour les Pacers, tandis que McMillan lance un « Double Drag » pour Brogdon.

De manière assez intéressante, McMillan arrive même à contourner le problème de l’absence de tir de TJ McConnell : il en fait un des deux poseurs d’écran tandis que Warren et McDermott apportent du spacing dans les corners.

La première chose à noter ici : les marquages défensifs. Mike Malone est revenu sur Torrey Craig pour défendre Brogdon, après avoir changé la possession précédente. Simple retour à la normale, ou conséquence de l’action précédente où Barton coincé dans l’écran a concédé un pull-up 3 grand ouvert ?

Quoi qu’il en soit, on peut questionner la pertinence de ce choix : Craig est assurément un meilleur défenseur que Barton à la fois sur la défense On-Ball comme Off-Ball. Mais : le différentiel est bien plus important entre les deux sur la défense Off-Ball. De plus, Indiana n’attaque que sur P&R il n’y a pas non plus besoin d’un énorme niveau défensif On-Ball à mettre sur Brogdon (ce n’est pas comme s’il fallait défendre LeBron ou Harden arrivant pour jouer directement le 1vs1).

Aussi, une configuration avec Craig Off-Ball et Barton On-Ball semble une bien meilleure optimisation des atouts de Denver que l’inverse. En faisant de la sorte, Craig aurait sans doute bien mieux géré la gestion du côté faible que ne le fait Barton ici.

À partir du moment où le Hedge crée un 2vs1 sur le ballon, c’est ce 2vs1 qui fait office de premier rideau défensif, pas forcément la qualité intrinsèque du défenseur du porteur de balle. Les Nuggets n’ont pas forcément « besoin » de Craig si ils Hedge, Barton est largement assez bon pour faire le job…mais ils ont certainement plus besoin d’un très bon défenseur côté faible, ce que Craig peut être et Barton pas.

La question annexe que l’on peut se poser est la suivante : dans ce cas, pourquoi ne pas utiliser Craig en Off-Ball…et Grant en On-Ball, lui qui excelle sur la défense sur l’homme et a réalisé de très belles prouesses sur Brogdon dans le 2e QT ? La réponse est assez simple : en faisant cela, Barton se retrouve sur TJ Warren, beaucoup plus puissant. Si Malone choisit en effet de faire ça, McMillan n’aura pas de remord à laisser Brogdon loin du ballon pour faire attaquer TJ Warren et ainsi obtenir des situations très favorables. C’est ici que l’absence de Gary Harris et sa polyvalence défensive se fait sentir : Grant, Harris et Craig sont totalement interchangeables, là où Barton apporte plus de compromis.

Du reste, deux trois petites choses à noter sur cette action.

D’abord, la fatigue de Jokic qui après être resté trop bas la possession précédente essaye de remonter ici…pour mieux se faire prendre à revers par Sabonis. Il n’est pas extrêmement mobile de toute manière, mais semble ici manquer de jus pour vite faire machine arrière et recoller à Sabonis. Le fait d’avoir enchaîné tout le match avec des P&R sur Jokic, pour le forcer à défendre action après action, semble porter ses fruits dans le money time.

Ensuite, l’intelligence situationnelle de McConnell qui coupe au cercle pour offrir une option de passer et/ou surtout laisser McDermott tout seul dans le corner : Morris est obligé de le suivre, et ne peut donc pas compenser l’aide de Barton. McConnell a beau être un bien moins bon shooteur 3pts que Myles Turner, il est quand même capable d’impacter le jeu et le spacing de manière tout aussi intéressante, si ce n’est plus.

Enfin, sans s’y attarder quand bien même ça le mériterait : l’excellente action de Sabonis, une nouvelle fois, plein de lucidité, de vision, de dribble sous contrôle et de passe millimétrée pour trouver la solution.

Peut-être à souligner aussi : les choix payants de rotations de Nate McMillan, d’être resté sur McConnell et surtout McDermott, qui rentre ce tir avec l’adresse que n’aurait peut-être pas eu Myles Turner ou Jeremy Lamb.

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Possession n°76

McMillan persiste avec son même groupe de joueur, et même si ça n’y ressemble pas trop au départ, insiste même avec le même système : un double écran de McConnell et Sabonis pour Brogdon.

Du côté de Malone, on a procédé à du changement, néanmoins : les marquages ont de nouveau été bouleversés puisque Craig reprend McDermott tandis que Barton retrouve Brogdon.

C’est la 4e possession consécutive ou les deux extérieurs de Denver échangent leurs marquages. À se demander si ce n’est pas ça, finalement, la véritable stratégie de Malone : alterner pour mieux surprendre (non, rassurez-vous, ce n’est très probablement pas le cas, mais simplement du bricolage « à la Mike Malone » d’après ce qu’on connait du technicien)

Il y aurait des tonnes de choses à dire sur cette Possession qui dure 40 secondes (!), mais pour rester digeste allons à l’essentiel.

Ici, ressort le principal problème des schémas défensifs de Denver : défendre en Hedge entraîne automatiquement un énorme nombre d’implications conséquentes. À savoir un grand nombre de rotations et de mouvement à orchestrer de manière ultra précise pour absorber les espaces laissés ici et là pour compenser le Hedge.

Or, réussir à faire ça est une tâche on ne peut plus difficile. C’est même impossible de posséder 5 bons défenseurs qui sur la totalité d’un match parviennent à rester attentifs, à toujours prendre les bonnes décisions et exécuter les rotations défensives au centimètre près.

C’est exactement le problème ici : en fin de match, les joueurs sont fatigués, pas toujours attentifs, réagissent un peu trop en retard ou ne sont pas parfaitement positionnés. La marge d’erreur de ces schémas est très faible, et avec autant de petites imprécisions, Indiana profite de multiples ouvertures plus ou moins importantes (tirs ouverts, rebonds offensifs, etc).

En somme, cette défense de Denver possède de vraies faiblesses fondamentales. Et donc sans doute un plafond de verre face aux toutes meilleures équipes, encore plus capables qu’Indiana d’exploiter ces petits décalages ou punir les imprécisions défensives inévitables.

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Possession n°77

On ne change pas une équipe qui gagne : Indiana reste sur le même line-up, et le même système : double écran de McConnell et Sabonis pour Brogdon.

Pas de changement non plus pour Mike Malone : pour la première fois depuis longtemps, les marquages défensifs sont les mêmes deux possessions consécutives, à savoir surtout Craig/McDermott et Barton/Brogdon.

D’abord et avant tout : Indiana gagne deux fois cette possession. Pour une raison inexpliquée, Brogdon refuse le pull-up très grand ouvert à 3pts, mais la possession aurait déjà dû s’arrêter là.

Par conséquent, il semble également important de noter l’action de McConnell qui littéralement créé à partir de rien dans le feu de l’action, mobilise les deux défenseurs, absorbe la pression et délivre une superbe passe. Tout cela, après avoir posé un superbe écran qui élimine Barton. Autant, un écran de cette qualité-là Myles Turner aurait été capable de le poser, autant être capable d’enchaîner ensuite sur un P&R balle en main, il n’aurait pas pu le faire.

Choix payant, encore une fois, de la part de McMillan d’insister avec un line-up aux multiples porteurs de balle plutôt que de faire « classiquement » revenir ses titulaires sur le terrain.

Concernant Denver, et la défense, plusieurs remarquent importantes à faire.

Le fait que Barton se fasse éliminer de l’action par l’écran de McConnell n’est pas problématique en soi (même si ça aurait été mieux qu’il parvienne à le traverser). Autrement dit, que Barton puisse perdre du temps et rester accroché sur l’écran d’un P&R n’est pas la raison pour laquelle Brogdon se retrouve ouvert pour le pul-up 3, c’est même une possibilité tout à fait acceptable d’un Hedge. Le vrai problème, c’est que justement Jokic ne Hedge pas et reste beaucoup trop bas.

Sauf que ce n’est pas aussi simple que ça : ce n’est pas sur l’écran de Sabonis que s’écrase Barton, mais bien sur celui de McConnell. À y regarder de plus près, Sabonis ne pose même pas son écran, bien que le système semble être un double écran, et commence très vite à plonger au cercle. Si à premier abord on pourrait être tenté de blamer Jokic, ce n’était pas vraiment son rôle de réaliser un Hedge…mais bien celui de Morris. Jokic ne peut pas Hedge sur un écran autre que le sien, ça n’a pas de sens.

Au grand minimum, c’est un manque de communication. De manière assez réaliste, ça ressemble à une bourde de Morris. Sur l’écran de McConnell, il ne monte pas du tout gêner Brogdon pour un Hedge, ni même pour switcher et le reprendre au marquage. À la place, il « tag » Sabonis comme si Jokic allait en effet monter pour le Hedge (sauf que, pas d’écran, pas de Hedge). Là est également toute la valeur d’un meneur comme TJ McConnell posant un écran : ça met un autre meneur dans une position de défendre le P&R en tant qu’ »intérieur »/poseur d’écran, un rôle qui n’est jamais le sien. C’est comme, en foot, forcer le buteur à prendre les gants pour jouer gardien de but : ce n’est pas le même métier, il ne le fait jamais ni même ne s’entraîne à le faire.

(c’est d’ailleurs peut être pour cette raison que Brogdon hésite sur le pull-up 3 : il pensait peut être simplement obtenir un switch sur l’écran de McConnell, ou un Hedge, et ne comprend pas/pense que ce n’est pas possible d’être réellement à ce point ouvert).

En ce qui concerne Torrey Craig, en tant que weakside defender : sur le 1e P&R (joué par Brogdon) c’est son rôle d’aider à l’intérieur, mais puisque Jokic reste lui même très bas et sur Sabonis, il n’y a pas besoin de coulisser pour couvrir le lituanien. Sur le 2e P&R en revanche (joué par McConnell), il se retrouve dans une position plus délicate, isolé sans personne sur sa moitié de terrain sans personne pour couvrir son shooteur s’il aide à l’intérieur. Or, un corner 3 grand ouvert à McDermott est sans doute le pire tir possible à concéder pour la défense de Denver, d’où sa réticence à aider sur Sabonis et à préférer autoriser le tir à mi-distance ouvert.

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Possession n°78

Enfin quelques changements notables au niveau des line-ups : Myles Turner fait son retour sur le terrain pour la première fois depuis 7 min à jouer dans le 3e QT ! En partie pour consolider la défense des Pacers (non abordée dans cet article). Il remplace McConnell.

En réponse, et pour matcher, Mike Malone fait appel à Plumlee, qui remplace Morris.

Indiana repart donc sur son « cinq de départ » (excepté McDermott à la place de Lamb)…sauf que Malone choisit de ne pas conserver le sien : Grant n’est plus poste 4, mais bien poste 3 avec l’entrée de Plumlee. Pourtant, sur le début de match et pendant de longues séquences, Denver avait affronté la configuration à 2 intérieurs des Pacers avec le petit Morris en meneur et Grant en ailier fort. Pourquoi changer ?

La raison est simple : ne pas bazarder ses marquages individuels.

Le simple poste pour poste ne fonctionne évidemment pas : Morris qui défendait sur McConnell ne peut pas se charger de son remplaçant, Myles Turner. Mais remettre Morris sur Brogdon entraînerait un chamboulement total : Grant quitte Warren pour Turner, Craig quitte McDermott pour Warren, Barton quitte Brogdon pour McDermott. Trop d’implications qui viendrait altérer des marquages défensifs qui semblent enfin convenir. Qui plus est, Denver a choisi à la mi-temps de ne plus mettre Morris sur Brogdon, donc cette possibilité de garder le 5 de départ avec Morris en meneur et Grant en ailier fort ne fonctionne pas.

Utiliser Plumlee permet donc de faire un match-up poste pour poste (sur Turner) sans toucher à Grant – Craig – Barton.

Voilà donc la configuration quand McMillan lance un « Veer » pour McDermott : Sabonis feint de venir jouer le P&R avec Brogdon plein centre…avant en réalité de poser un Pin Down pour McDermott.

Ici, ce n’est pas tellement un manque de qualités pour suivre des shooteurs Off-screen qui est à reprocher à Craig (il n’y a pas de raison de paniquer et de lui retirer le marquage de McDermott, en somme). Il se fait tout simplement avoir par le système et la feinte du P&R.

Plus encore, de la même manière qu’il était relativement acceptable pour Barton de se faire éliminer sur un P&R tant que ça Hedge, le fait que Craig soit en retard sur McDermott n’est pas si catastrophique que ça…si Jokic monte en effet sur l’écran comme prévu par le plan de jeu.

Saur que, une nouvelle fois, Jokic tire la langue sur ce 4e QT. Ses changements de direction sont de plus en plus lents, et ses placements de moins en moins précis. Au moment où McDermott reçoit la balle, Jokic est censé être déjà très haut pour le priver d’espace, mais ce n’est pas le cas (Possession n°60 par exemple, entre autres). Plutôt que d’être gêné et de devoir abandonne la balle, McDermott a au contraire plein d’espace devant lui pour attaquer et faire la passe, librement.

En théorie, voilà comment la défense aurait dû se dérouler : Jokic monte haut à temps, et en compagnie de Craig, gêne McDermott. Et si ce dernier arrive quand même à transmettre à Sabonis qui plonge au cercle, Plumlee se tient prêt à aider au cercle pour compenser. Ici, Jokic est non seulement en retard sur McDermott, mais il fait également machine arrière pour tenter de gérer Sabonis. Plumlee ne peut pas vraiment aider, alors que le lituanien termine le travail avec aisance face à un Jokic à reculons en essayant de couvrir un grand espace.

Une question s’impose donc, ici : Mike Malone s’est il planté sur ses marquages défensifs ?

Plus précisément, étant donné l’état de fatigue combiné aux qualités intrinsèques lacunaires de Jokic pour défendre dans le périmètre, pourquoi ne pas avoir fait rentrer Plumlee…pour le faire défendre sur Sabonis ?

C’était de toute façon à peu près sûr que Turner allait se contenter de rester loin du ballon, non impliqué dans l’action : la probabilité qu’un titulaire quasiment pas du tout utilisé sur une mi-temps rentre et soit impliqué directement dans une action dans le money time à la place d’un intérieur en énorme réussite est plus faible que de gagner au loto. En sachant donc que ce serait Sabonis qui serait utilisé sur un P&R, à bouger, poser des écrans, plonger au cercle, et se déplacer sur tout le terrain pendant que Turner resterait planté dans le corner, n’aurait il pas été plus pertinent de mettre l’intérieur frais et mobile sur Sabonis, et le l’intérieur limité et cramoisi sur le shooteur statique ?

Dans le meilleur des cas, Jokic aurait pu prendre une possession pour se reposer, pendant que Plumlee se coltine le P&R et que Grant apporte l’aide depuis le côté faible. Dans le pire des cas, McMillan demande à Turner d’être le poseur d’écran pour cibler Jokic…mais Turner étant un bien moins bon joueur de P&R, la situation à gérer aurait été beaucoup moins dangereuse pour Denver.

À noter d’ailleurs que contrairement à Grant, Plumlee est un vrai pivot de formation et défenseur compétent au poste bas. L’éventualité qu’Indiana et Sabonis le perçoivent comme un mismatch et l’attaque au poste bas était donc à exclure. Et même s’ils l’avaient fait, l’opération n’aurait pas été rentable.

Pour tout un tas de raison, elle est un peu pour Malone celle-ci. Et le pire, c’est que McMillan n’a même pas eu à se démener ou à inventer soudainement une manière de punir Denver : il a simplement fait comme d’habitude. Ça la fout mal, pour Malone.

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Possession n°79

Cette fois, Mike Malone prend le taureau par les cornes et ajuste ses marquages défensifs. Problème : ce ne sont pas forcément les bons qu’il corrige.

Craig repasse sur Brogdon en tant que défenseur sur l’homme/au point d’attaque, tandis que Barton revient sur McDermott, en défenseur Off-Ball. Plumlee et Jokic, eux, ne changent rien : le Serbe reste sur le lituanien pendant que l’ancien pivot des Blazers reste sur Turner.

Pourquoi un tel changement réalisé par Mike Malone ? Possiblement, c’est une simple action-réaction très primaire (à la Mike Malone) d’enlever Craig de McDermott puisqu’il s’est fait avoir sur l’action précédente.

Néanmoins, il se peut aussi que ce soit un vrai choix de mettre le meilleur défenseur possible (Craig) sur le porteur de balle adverse, surtout quand on voit comme Barton s’est également fait battre sur un écran On-Ball il y a quelques minutes (Possession n°77). Comme nous l’avions expliqué Possession n°61, avoir Craig Off-Ball/Barton On-Ball est une optimisation de leurs qualités (plus de valeur ainsi qu’en faisant l’inverse)…mais c’était en plein milieu du match.

Or, ici, nous sommes dans le money time à disputer les toutes dernières possessions du match : chaque possession a donc plus de valeur. Revient donc ici l’idée capitale de la différence entre échelle globale et échelle unique. De la même manière qu’il est plus rentable de prendre des 3pts tout le match, mais un tir à mi-distance sur une seule dernière action à jouer il est possible que sur de longues séquences ce soit une meilleure optimisation que d’avoir Craig en Off-Ball/Barton en On-Ball…mais qu’en toute fin de match la possession compte plus, c’est plus important de réussir à défendre à tout prix, et donc plus intelligent de remettre Craig, le meilleur défenseur possible On-Ball, sur Brogdon.

Laissons à Malone le bénéfice du doute.

De son côté, Nate McMillan ne cherche pas à réinventer la roue : Brogdon, Sabonis, High P&R.

Avec une nuance primordiale, cependant : tout comme pour les Possession n°44, Possession n°47 et Possession n°48 : Warren coupe depuis l’aile jusque sous le cercle pour avoir une configuration à 3 joueurs à plat le long de la ligne de fond plutôt que 2 d’un côté et 1 de l’autre.

De manière assez évidente, en fin de match, Indiana sait à quoi s’attendre, sait quels ajustements fonctionnent ou non, quels détails régler, et ne se prive pas de s’en servir.

Difficile de reprocher à Barton l’échec de cette possession : encore une fois, à un échelle unique, c’est plus probable que Sabonis rentre un jump-shot dans la raquette plutôt que McDermott un tir à 3pts, donc sa décision de quitter McDermott pour aller sur Sabonis se défend. Ici, la question de la rentabilité ne se pose pas puisque celle-ci ne s’exprime que dans de gros volumes. Seul compte ici quel est le tir le plus probable de rentrer.

Denver est dans une urgence absolue du « défendre cette possession à tout prix comme s’il ne restait qu »elle à jouer », une urgence qui même il y a quelques minutes n’était pas là : Possession n°77 Craig choisit de rester sur McDermott quitte à laisser Sabonis ouvert. Ce qui se comprend aussi, à ce moment là du match. Avec plus de 2 minutes 30 à jouer, et donc entre 6 et 7 possessions à jouer, Denver ne pouvait pas jouer le tout pour le tout quitte à concéder des tirs rentables à Indiana (sur 6 ou 7 possessions, il suffit que seulement 2 ou 3 rentrent pour que le match soit plié). Mais ici, l’urgence est plus grande, et la valeur de chaque possession exponentiellement plus grande. Ergo, un bon choix de Barton de concéder un 3pts là où sur le reste du match et même quelques minutes plus tôt, ça aurait été un très mauvais choix.

Difficile de reprocher quoi que ce soit Barton, donc….mais : impossible en voyant cette action de ne pas se souvenir de la Possession n°44.

Cette Possession n°44 est la seule fois de tout le match où Denver est arrivé à endiguer le P&R des Pacers quand Indiana s’est positionné sur une configuration de 3 attaquants à plat ligne de fond (et donc où le weakside defender est isolé). Or, qu’on fait les Nuggets sur cette action ? Ils n’ont pas aidé via le côté faible…mais depuis le côté fort. C’était Grant, sous le cercle qui était remonté pour couvrir Sabonis pendant que Morris, côté fort, coulissait sur l’attaquant de Grant et que Jokic, côté fort, car impliqué sur le P&R, revenait sur l’attaquant de Morris. Dans ce qui ressemblait à une sorte de « Scram Switch » improvisé.

Le point clé de cette problématique est le suivant. L’aide vient généralement du côté faible pour une raison : en dézonant pour aider, le défenseur laisse forcément quelqu’un d’ouvert, il est donc préférable que l’attaquant ouvert se trouve côté faible, loin du ballon où il est difficile à trouver, plutôt que côté fort proche du ballon. Mais une autre notion doit rentrer en jeu : le fait de pouvoir compenser la rotation assez rapidement. Le but des rotations en 2nd rideau va au-delà de simplement apporter une aide sur le ballon, c’est véritablement de gérer et d’absorber un espace en infériorité numérique pendant un laps de temps. Or, ici, une fois que Barton fait sa rotation, il n’y a plus personne pour compenser, Denver laisse juste un excellent shooteur ouvert. Ça peut paraître contre-intuitif, mais dans ce genre de situation ce n’est pas tant du côté faible que doit venir l’aide, mais du côté où Denver a assez de pions à bouger pour compenser. Et ce, même si c’est le côté fort.

Quand on rajoute à l’équation le fait que McDermott est un shooteur d’élite (contrairement à Turner et Warren à qui on accepte bien plus de concéder un tir ouvert), et même le fait que Sabonis est beaucoup plus à l’aise pour passer sur sa gauche que sur sa droite, il est possible d’argumenter que Barton n’aurait pas du aider.

Dans le feu de l’action, en une fraction de seconde, ça semble très dur de développe de tels raisonnements, peser le pour et le contre et prendre la bonne décision. Mais : Grant semble être en train de commencer à aider, et on ne parle pas ici que de scénario totalement théorique : cette défense qui vient depuis le côté fort, sur ce système-là en particulier, Denver l’a déjà fait dans ce match. Ca aurait pu, ou du, servir de point de repère.

Là où le ba blesse pour Mike Malone, c’est que sur cette fameuse Possession n°44, c’est Torrey Craig qui se trouve dans le corner en tant que défenseur côté faible, et qui fait le bon choix de ne pas aider pendant que Grant et Morris s’en chargent. Encore une fois, n’aurait il pas été plus pertinent d’avoir un défenseur comme Craig, plus intelligent et compétent Off-Ball, capable également de couvrir plus de terrain rapidement, dans cette position là ? Sans doute que si.

L’autre question que l’on pourrait se poser ici (encore) : pourquoi ne pas avoir placé Plumlee sur Sabonis, plutôt que Jokic ? Plumlee serait sans doute monté beaucoup plus vite sur Brogdon (et donc peut être aurait un peu mieux gêner/empêcher la passe), ou aurait carrément pu « Hard Hedge » pour forcer Brogdon à perdre du temps en le contournant. Voire même carrément : à switcher.

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Possession n°80

Aux grands mots, les grands remèdes : cette fois-ci, Mike Malone change enfin les marquages défensifs de ses intérieurs. Jokic et *enfin* exempté de défendre Sabonis et le P&R, pendant que Plumlee fat le chemin inverse en abandonnant Turner pour être sur le lituanien.

Le but est assez simple ici : le Hedge entraîne beaucoup d’implications conséquentes, d’espaces concédés et de possibilité d’être puni. À l’inverse, un Switch absorbe tout décalage sans rien concéder.

De la même manière ici se retrouve la dualité d’échelle globale vs unique : pratiquer du switch pendant tout un match est bien trop énergivore, difficile et risqué vu le personnel de Denver, mais sur une seule action Malone a absolument besoin d’une possession défensive réussie. Or, obliger Indiana à attaquer sur ISO est forcément plus rentable (car plus difficile pour les Pacers) que de défendre en Hedge en laissant des ouvertures dans la défense.

Première chose ici : le choix de McMillan. Malgré les nouveaux match-up défensifs proposés par Mike Malone, Indiana ne semble pas trop hésiter : les Pacers préfèrent continuer d’attaquer avec leur meilleur joueur (Sabonis) quitte à faire face à un meilleur défenseur (Plumlee) plutôt que de passer par un moins bon attaquant (Turner) juste pour continuer à cibler le moins bon défenseur (Jokic). Le choix se défend.

Deuxième chose : Indiana ne semble pas hésiter trop longtemps non plus sur quel « mismatch » attaquer après avoir obtenu le switch : plutôt Brogdon face à Plumlee que Sabonis contre Torrey Craig. Au-delà du fait que le différentiel entre Craig et Sabonis est peut-être un peu plus faible que le différentiel de niveau entre Plumlee, c’est aussi la manière d’attaquer qui importe : c’est plus facile de créer du jeu via un porteur de balle sur drive et/ou dans le périmètre qu’en envoyant un intérieur jouer le post-up près du cercle ou attaquer en tête de raquette.

Troisièmement, du côté de Denver cette fois : le switch Off-Ball entre Grant et Jokic. Dans un premier temps, ce switch permet de ne pas laisser Warren ouvert en sortie d’écran, mais dans un second temps (et surtout), ce switch à aussi pour but d’éloigner le plus possible Jokic de l’action. Le Serbe n’est pas du tout un bon protecteur de cercle sur des rotations dynamiques/en mouvement, donc va ainsi pourvoir se contenter de rester sur Warren  tandis que Grant sera celui qui sera chargé d’aider au cercle. D’ailleurs, c’est rebelote une fois que Turner se dirige vers l’autre corner : Grant communique avec Craig pour rester proche du cercle et continuer d’être dans la zone propice pour aider (sous le panier) plutôt que suivre son attaquant dans le périmètre.

Très clairement ici, il est difficile de ne pas se souvenir de la Possession n°61, déjà à l’époque la dernière possession du QT, avec des circonstances identiques : un switch de Plumlee sur Brogdon. Sauf que, sur cette dernière possession du 3e QT, Plumlee était resté trop bas, concédant ainsi un pull-up 3 suffisamment ouvert à Brogdon. Ici, Plumlee ne veut plus se faire avoir une deuxième fois d’affilée : il monte très haut pour défendre/empêcher ce tir-là, et inciter Brogdon à driver vers le cercle où Grant attend pour aider.

L’ajustement de Plumlee est très bon. C’est « juste » que le surajustement, le contre-move, la réponse à la réponse de Malcolm Brogdon est encore meilleure.

La clé de l’action ici est véritablement le sens du timing de Brogdon, déjà souligné sur la Possession n°30 : l’arrière avait attaqué pile quand les défenseurs commençaient à faire machine arrière, et ici, attaque pendant que les défenseurs communiquent et ne sont pas totalement attentifs.

Quand Denver s’est aventuré à lui envoyer deux défenseurs sur la tronche pour le contenir, Brogdon a su faire la passe rapide pour exploiter le surnombre (Possession n°79). Quand Denver a choisi de défendre en Drop, Brogdon a puni en rentrant le pull-up 3 (Possession n°35). Quand Denver a switcher en restant bas pour contenir son drive, Brogdon a sanctionné sur pull-up 3 (Possession n°61) et quand il a été pressé trop haut, le leur a fait payer sur du drive (Possession n°80). Sur ce match ultra complet, Malcolm Brogdon n’est pas loin d’avoir démontré toutes les qualités nécessaires au rôle de porteur de balle dominant, capable d’apporter une solution à n’importe quelle problématique défensive.

Indiana passe de +3 à +5 sur ce drive, à quelques secondes du terme.

Jeu, set et match, Malcolm Brogdon.

 

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2 réflexions sur “Inside the Film Room : Denver vs Indiana, la guerre du Pick & Roll (4/4)

  • WarriorsBucksKid #A

    Sabonis est vraiment un joueur incroyable !

  • Xavito04

    @Guillaume : Bravo pour ces 4 articles qui ont dû te demander beaucoup de travail.
    C'était PASSIONNANT, un grand merci. J'ai découvert des dizaines de détails super intéressants grâce à toi et je ne regarderai plus de la même manière un pick & roll.
    Vivement de nouveaux articles de cet qualité !

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